samedi 23 novembre 2024

hdj uneAprès un mois passé à La Mecque, où ils ont accompli le 5e pilier de l’islam, les premières vagues de pèlerins rentrent au bercail. Le jeudi 21 juillet 2022, Radars Info Burkina a assisté à l’arrivée de certains « ladji » et « hadja » dans la soirée à l’aéroport international de la capitale burkinabè.

Il est 17h à l’aéroport international de Ouagadougou le jeudi 21 juillet 2022. Femmes, hommes et enfants, tous étaient  présents pour accueillir les « ladji » et « hadja ». La joie se lisait sur les visages.  « Nous sommes contents. On a hâte de les voir. Je suis venu accueillir mon frère. Il y aura une fête ce soir en attendant la grande fête appelée ‘’walim’’ en arabe et ‘’doua’’ en langue nationale mooré. Ce ‘’doua’’  consistera à rendre grâce à Dieu pour le retour de notre frère car il y a des personnes qui y sont restées », nous confie Mamadi Soumdaogo, venu accueillir son grand frère.

Annoncée pour 17h, c’est finalement à 19h que cette vague de pèlerins est arrivée le jeudi 21 juillet 2022 à l’aéroport international de Ouagadougou.  Sourire aux lèvres, accolades et scènes de liesse étaient au rendez-vous. Tous ceux d’entre eux avec qui nous avons échangé sur le déroulement du pèlerinage ont affirmé que « tout s’est bien passé ». C’est le cas de Zacharia Niampa, qui nous a relaté son voyage : « Notre séjour à La Mecque cette année s’est bien passé. Nous n’avons pas rencontré de problème de documents ni de difficulté particulière à notre aller. Lorsque nous sommes arrivés aussi tout a été normal et bien géré. Nous faisions parti du groupe Rangouma voyage. L’organisation était vraiment impeccable. Nous n’avons eu aucune difficulté. Au début on avait peur à cause de la longue distance qu’on allait parcourir mais finalement nous n’avons pas senti cela car c’est comme si c’était dans notre pays. Nous avons fait escale à Médine où nous avons passé 4 jours avant de continuer à La Mecque. Au 8e jour sur les lieux du pèlerinage, nous nous sommes perdus et cela nous a beaucoup effrayés. Mais fort heureusement avec la maîtrise de la langue arabe et la reconnaissance de nos numéros, nous nous sommes tous retrouvés le soir.  De là, nous sommes allés dans un lieu appelé ‘’Arafat’’ où nous avons fait 3 jours. Là aussi, c’était très intéressant. Nous avons été sur la colline et nous avons  prié pour la paix au Burkina Faso et toute l’Afrique. Nous avons prié aussi pour ceux qui souhaitent aller à La Mecque mais qui n'en ont pas les moyens afin que Dieu le leur permette. Le troisième jour, c’était le vendredi, veille de la Tabaski. Nous avons accompli le rituel de la lapidation de Satan. Nous disons merci au gouvernement burkinabè et à tout le comité d’organisation qui nous ont permis d’effectuer ce pèlerinage. Si nous sommes en bonne santé et que tout va bien, nous souhaitons repartir l’an prochain. Qu’Allah bénisse le Burkina Faso. »

hdj 2Fatoumata Sawadogo a abondé dans le même sens que son coreligionnaire. « Le hadj s’est bien passé. Nous n’avons pas eu de problème », nous a-t-elle affirmé. À la question de savoir comment ils ont vécu le décès de leur ‘’sœur'' et compatriote burkinabè au cours du pèlerinage, elle répond n’avoir pas eu connaissance de ce drame, car les pèlerins étaient nombreux.

Un troisième pèlerin ayant requis l’anonymat a, lui, fait cas de fatigue, mais il a indiqué que le voyage s’est déroulé dans de bonnes conditions.

D'autres pèlerins fouleront le sol burkinabè dans les prochains jours.

Flora Sanou

asbAprès la circulaire en date du 19 juillet 2022 du chef du gouvernement, Albert Ouédraogo, annonçant la restitution des salaires des travailleurs irrégulièrement suspendus ou complètement retenus pour «fait de grève», Radars Info Burkina a rencontré le Secrétaire général de la Fédération des Syndicats nationaux des travailleurs de l’éducation et de la recherche (F-SYNTER), Souleymane Badiel. Il a donné son avis sur cette décision gouvernementale.

L'affaire avait marqué plus d'un en mars 2020. Couper les salaires de travailleurs pour fait de grève, c'était surréaliste, voire inimaginable, pour certains agents de la fonction publique à l'époque. Cependant, avec les autorités actuelles du pays, c'est un nouveau vent qui souffle. En effet, tous ces salaires coupés seront remboursés, a assuré le Premier ministre, Albert Ouédraogo.

De quoi réjouir le SG de la F-SYNTER, Souleymane Badiel, qui semble saluer l'engagement des autorités de la transition à cet effet. Il confie que l'État avait déjà été condamné par les juridictions à payer non seulement les salaires injustement retenus ou coupés, mais aussi à payer des dommages et intérêts pour le préjudice subi par les victimes desdites mesures.

Cette restitution est donc pour lui une manière pour l’État de rendre justice aux travailleurs. « Le remboursement des salaires suspendus, notamment en mars et avril 2020, par le gouvernement de l’époque n’est que justice pour les travailleurs. Justice en ce sens que c’est une décision illégale, abusive et les autorités actuelles, elles-mêmes reconnaissent ce caractère répressif de cette action vis-à-vis des travailleurs», a-t-il affirmé.

Et de poursuivre : « Le ministre de la Fonction publique nous avait écrit sur la question et nous lui avons répondu en lui faisant le point des travailleurs qui nous ont saisis et avec lesquels nous sommes allés en justice. L’ensemble des travailleurs qui ont saisi nos organisations, et qui ont accepté que leurs dossiers soient portés en justice, nous avons fait un point exhaustif sur leur situation.»

Souleymane Badiel relève un souci en ces termes : « Il se trouve que le gouvernement de l’époque avait lui-même créé une autre injustice en remboursant le salaire d’un certain nombre de ces travailleurs et c’est le même gouvernement qui a suspendu les travailleurs qui est l’employeur».

Le secrétaire général de la F-SYNTER s’est voulu on ne peut plus clair : « Si des travailleurs ne sont pas pris en compte et qu’ils nous saisissent, l’action continuera pour qu’ils puissent rentrer dans leurs droits».

Pour l'heure, M. Badiel dit n’avoir pas de réponse sur une probable sortie de crise entre les travailleurs et l’État. Cette appréciation, à l’en croire, ne sera possible que lorsque tous les droits seront rétablis. «Une sortie de crise, je n’en sais rien. Nous attendons que le dossier soit entièrement vidé. Quand il le sera, nous pourrons apprécier pour voir si effectivement  sur cet aspect notre contentieux avec l’État n’existe plus».

En rappel, en février 2020, le gouvernement avait décidé unilatéralement de l’extension de l’application de l’Impôt unique sur les traitements et salaires (IUTS) aux primes et indemnités des agents publics de l’Etat. Face à l’indignation des travailleurs, des initiatives sur le plan syndical ont été prises pour fédérer les énergies, afin de lutter contre ce qu'ils ont qualifié «d'injustice».

Ainsi, une cinquantaine d’organisations syndicales s’étaient regroupées pour engager une lutte autour d’une plateforme portant sur l’arrêt des mesures de baisse du pouvoir d’achat et pour l'amélioration de celui-ci en rapport avec le coût de la vie. Sans oublier l’arrêt des atteintes aux libertés démocratiques et syndicales.

Flora Sanou

acntsLes agents du Centre national de transfusion sanguine (CNTS) observent un mouvement d’humeur les 21 et 22 juillet 2022 pour revendiquer la satisfaction de leur plateforme revendicative. Ils réclament également de meilleures conditions de travail et un service de qualité pour les donneurs de sang.

Pour Léonard Yaméogo, responsable de la sous-section SYNTSHA du CNTS Ouagadougou, leurs points de revendication sont, entre autres, la sécurisation des agents et la disponibilité du matériel. Il précise qu’on assiste, en outre, à « une remise en cause des acquis des travailleurs depuis un certain temps ».

Le Syndicat des travailleurs de la santé humaine et animale du CNTS de Ouagadougou indique que l’administration est restée muette, bien qu’il lui ait adressé plusieurs correspondances pour solliciter une audience. « Nous avons constaté qu’elle n’était pas disposée à nous recevoir, donc nous avons initié ce sit-in pour réclamer nos droits », a souligné le responsable de la sous-section SYNTSHA du CNTS Ouagadougou.

Durant ces deux jours de sit-in, le service ne reprend qu’à partir de 12h30.

« Nous avons informé les autorités de la tenue de ce sit-in et il leur revient, si elles le veulent bien, d'agir pour que tout rentre dans l'ordre », a ajouté Léonard Yaméogo, responsable de la sous-section SYNTSHA du CNTS Ouagadougou.

« Nous espérons qu’après ces deux jours, nous aurons des conditions meilleures nous permettant de répondre au mieux aux attentes des donneurs de sang », a-t-il conclu.

Nafisiatou Vébama

smbouéLe Togo a fini par devenir lui aussi la cible d’attaques terroristes, qui étaient depuis plus de six ans le lot de son voisin le Burkina Faso. Dans la nuit du 14 au 15 juillet 2022, le pays a enregistré l’attaque terroriste la plus meurtrière de son histoire qui a aussi occasionné des déplacements massifs. Dans une interview qu’il a accordée à Radars Info Burkina le mardi 19 juillet 2022, le journaliste burkinabo-togolais Edouard Kambossoa Samboé revient sur l’historique des attaques au Togo ainsi que les inquiétudes qui l’animent.

Radarsburkina.net : Comment vivez-vous les récentes attaques dont le Togo est victime ?

Edouard Kambossoa Samboé : Il faut dire que lorsqu'on est issu de deux nations qui toutes deux sont en proie à de graves difficultés, on ne peut qu'être meurtri. Nos parents ici sont attaqués, ceux de l'autre côté le sont également, où allons-nous ? Donc c'est vraiment difficile dans la mesure où moi-même j'abrite chez moi des déplacés. Ma grande sœur, par exemple, est chez moi avec sa famille depuis qu’ils ont été chassés de Dori. Donc je comprends la douleur que peuvent ressentir mes autres parents qui sont au Togo et qui aujourd'hui se déplacent petit à petit. C'est aussi difficile quand on doit traverser les deux frontières, les deux zones d'insécurité pour aller leur rendre visite. Donc je vous assure que c'est difficile ; nous sommes meurtris et cela a trop d'incidences sur nous.

Est-ce que les voyages vers le Togo sont déjà impactés ?

Les gens se déplacent toujours de Ouagadougou jusqu'à Dapaong, puisque STAF (NDLR : Une compagnie burkinabè de transport par voie terrestre) s'arrête à Cinkansé et d'autres compagnies vous amènent à Dapaong et ainsi de suite. Mais la peur est là dans la mesure où dans la localité de Bittou il y a eu des incursions des groupes armés terroristes, une zone que STAF traverse, de Tenkodogo jusqu'à Bittou. Même du côté du Togo, de Cinkansé à Dapaong, c'est toujours inquiétant parce que du côté Est il y a eu des déplacements des groupes armés terroristes. Donc il y a une peur qui est là. Ça fait que quand on veut voyager, on se demande à quelle sauce on sera mangé.

Quelles sont les parties du Togo qui connaissent les attaques ?

Le Togo compte cinq régions. Et c'est la région septentrionale, donc le nord, qui fait frontière avec le Burkina, qu'on appelle la région des savanes, qui vit les attaques des groupes armés terroristes depuis 2021. Il y a aujourd’hui huit mois que le Togo a été victime de la première attaque terroriste. Au cours de ces huit mois il y a eu quatre incursions armées. La première attaque a été revendiquée par le GNIM (le Groupe de soutien à l'Islam et au musulmans) qui avait frappé un poste avancé de l'armée togolaise. Mais à l'époque les militaires togolais ont pu riposter et il n'y avait pas eu de mort. Puis il y a eu une seconde attaque qui a été dirigée contre les positions des militaires et elle a été une attaque de grande envergure où il y a eu jusqu'à huit militaires tués et des engins explosifs ont été posés sur la voie pour cibler des véhicules militaires. Ensuite il y a eu une troisième attaque à Gouloungoussi. C'est une zone que partagent le Togo, le Burkina et le Ghana, donc c'est un peu plus à l'ouest. Cette fois-ci les groupes armés terroristes se sont déplacés de l'est, c'est-à-dire à la frontière avec le Burkina, dans la Kompienga, pour aller à la frontière ghanéenne à l'ouest. Mais les militaires sont arrivés à repousser aussi cette attaque et il n'y a pas eu de mort. La dernière attaque, c’est-à-dire, la quatrième, a été la plus meurtrière. Des individus armés sont arrivés, dans la nuit 14 au 15 juillet, et vont de maison en maison pour égorger les gens.  Cette attaque n'a pas encore été revendiquée par un groupe particulier, mais les survivants témoignent que les assaillants ont dit qu'ils reviendraient. Et que leurs bœufs et leurs moutons avaient été saisis par l'armées togolaises et tant que les choses ne seront pas restituées ils reviendront. Et c'est ça qui a entraîné un déplacement massif des populations qui ont quitté ces zones pour aller vers Dapaong et d'autres villes comme Mandjouri. Donc la situation est chaotique et le gouvernement tente d’appeler les populations à rester sur place et à ne pas se déplacer. Le maire de Kpendjal 1 avait même assuré que les militaires étaient sur place pour sécuriser les populations. Donc les déplacements qui continuent malgré cela, montrent combien la psychose est montée et que les gens ne croient plus que la sécurité est garantie.

Cette zone abrite des déplacés depuis quand ?

Il faut noter que depuis une des grandes attaques de Kompienga, il y a eu beaucoup de Gourmantché qui s'étaient déplacés de la Kompienbiga à Dapaong. Cela parce que non seulement c'est proche mais c'est leurs parents. C'est une zone où on parle gulmancéma et c'est plus facile pour les parents de se déplacer de part et d'autre. Maintenant à l’intérieur du Togo, l'attaque qui a eu lieu dans la commune de Koundjouari, dans la préfecture de Kpendjal, a entraîné beaucoup de Togolais qui étaient de ce côté, au nord-est à la frontière avec le Bénin et le Burkina, à se déplacer pour aller vers l'ouest, vers Dapaong. Donc ça montre à quel point la situation qui prévaut au Burkina n'est pas loin de se déporter au Togo et qu'il faut trouver des solutions communes.

Est-ce que le gouvernement togolais a pris des mesures dont vous avez connaissance ?

Oui, en effet. D'abord ils ont décrété que la région de Savane est une région d'insécurité en décrétant ce qu'on appelle l'état d'urgence sécuritaire. Deuxièmement, ils y ont déployé des contingents qui sont des forces spéciales, des forces d'élites pour lutter contre le terrorisme. Ils ont aussi mis en place un Fonds spécial qui permet de construire des infrastructures socio-économiques pour développer un peu la zone parce qu'ils ont aussi compris que la question sécuritaire peut aussi bien s'asseoir sur la question économique. Donc c'est un engrenage et il faut désamorcer la bombe en évitant qu’elle s’enracine.

Quelle est votre peur aujourd'hui ?

La peur, c'est surtout la question humanitaire. En effet, nos parents sont des agriculteurs et nous en période d'agriculture, c'est des moments où les gens ont déjà semé. Ce n'est pas des personnes qui ont travaillé dans des villes ils ne savent rien faire d'autre que l'agriculture et l'élevage. C'est des paysans, donc que d'un jour à l'autre on tue des gens et on dit de quitter et abandonner tout pour aller ailleurs, comment vont-ils survivre ? C'est cela la question. Deuxièmement, on peut prévoir tout mais on ne peut pas prévoir la situation terroriste. Quelle peut être l'envergure de la situation dans les prochains mois. Si au bout de six mois, c’est en l'espace seulement de 24 heures on a enregistré des déplacements massifs, quelle va être la situation future ? Et cette situation vient se greffer à une situation qui existe déjà, la situation d'insécurité alimentaire, ça montre à quel point les prochains jours seront tragiques pour les populations. C’est pourquoi on a longtemps décrié qu’il y a la nécessité d’apporter tout le soutien nécessaire aux pays comme le Burkina Faso dans la lutte contre le terrorisme. Ce sont des digues. Si elles cèdent, ça va gangrener tous les autres pays sans distinction. Mais s’il y a une chose qu'on peut saluer, c'est l'accord qui a été signé entre le Burkina, le Togo, le Niger et le Bénin qui dit que pour lutter contre le terrorisme, les gens peuvent aller au-delà des frontières, mais au-delà, pour qu'il y ait des échanges d'informations, de stratégies, etc. Nous, les populations, pensons que c'est ce qu'il faut renforcer.

Y a-t-il des rencontres entre ressortissants togolais au Burkina sur cette question ?

Déjà dans les groupes WhatsApp surtout, les gens commencent à se demander ce qu'il faut faire, ce qu'on peut faire ? Et personnellement, moi je pense qu'il est temps que nous nous organisions pour voir ce que l'on peut faire. Qu’on ne soit pas seulement des gens qui critiquent, même si cela est constructif, et aller au-delà de la veille citoyenne pour apporter notre touche sur le terrain, peut-être en renseignement et tout le reste.

Interview réalisée par Etienne Lankoandé

bracTrois individus résidant à Bobo-Dioulasso sont accusés de braquage et de vol à main armée au sein d’une société financière en Côte d’Ivoire. Interpellés par Interpol, ces présumés coupables ont été remis à la justice burkinabè pour répondre de leurs faits.

En mars 2022, quatre individus font irruption dans une société financière à Grand-Bassam, une ville de Côte d’Ivoire, maîtrisent le personnel  avec leur arme et vident la caisse de la banque. Après leur forfait, ils vont dans une forêt où, selon leurs dires, ils se partagent cette somme et chacun repart avec 25 millions de francs FCFA.

Devant le tribunal, les trois présumés coupables reconnaissent les faits. Mais, ils ne reconnaissent qu’avoir pris la somme de 108 millions puisqu’ils étaient quatre et ont reçu chacun  25 millions et le reste, qui était de 8 millions, ils se le sont aussi partagé.  La société financière indique, quant à elle, que le jour du forfait, c’étaient 158 millions 500 mille qui étaient dans le coffre-fort.

Les présumés coupables disent n’avoir pas compté l’argent quand ils ont fini de commettre leur vol. « L’argent a été réparti à chaud et à la fin, on a vu que chacun avait 25 millions et il restait 8 millions », indique un des prévenus.

Les trois personnes coupables de vol à main armée et de braquage ont indiqué qu’elles ont investi cet argent dans leurs affaires.

Cependant, ils reconnaissent la gravité de leur acte et le regrettent. « Je ne nie pas les faits et je sais que c’est trop grave. Quand on a fini de partager l’argent, j’ai dit à l’autre de ne plus m’entraîner dans des affaires de ce genre », a déclaré l’un d’eux.

Ils ont demandé la clémence du juge afin de pouvoir travailler et rembourser ladite somme à la société financière.

La partie civile ayant pris la parole affirme qu’il est bon de reconnaître les faits, mais il leur faudra une sanction qui leur fera comprendre qu’on s’enrichit au prix du travail et des efforts fournis.

Le dossier est renvoyé au 2 août 2022 pour délibération.

Nafisiatou Vébama

financLa Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) définissent le financement du terrorisme comme «l’aide financière de toute forme au terrorisme ou à ceux qui encouragent, envisagent ou s’engagent dans ce cadre». De nos jours, l’exploitation minière artisanale au Burkina semble avoir une corrélation avec ce phénomène. Le chargé de l’analyse à la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF), Joachim Kientéga, s’est prononcé sur la question.

Le secteur minier peut être une source de financement des terroristes, un refuge pour ces derniers. Selon le chargé de l’analyse à la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF), Joachim Kientéga.  Il y a un risque de financement terroriste au Burkina Faso par le biais de l’exploitation  minière artisanale.  Ainsi, une étude réalisée par l’observatoire économique et social au Burkina  révèle que de 2016 à 2020, les terroristes ont récolté 140 millions de dollars, soit environ 70 milliards de FCFA dans les attaques contre les mines d’exploitation minière artisanale, a-t-il soutenu.

Le financement du terrorisme associé à l’or

Le secteur des mines, notamment les mines semi-mécanisées, artisanales et sauvages, est l’un des secteurs les plus vulnérables qui peut être utilisé à des fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, selon M. Kientéga.

L’or est considéré comme un véhicule de blanchiment d’argent. En effet, le métal jaune présente deux grandes caractéristiques qui le rendent attrayant pour les groupes criminels. Il s’agit, dans un premier temps, de la nature et de la taille du marché lui-même qui dépend fortement des liquidités en tant que mode d’échange. Les modes d’échange se font en espèces. Dans un second temps, il concerne l’anonymat généré par les propriétés de l’or, ce qui rend difficile le suivi de ses origines. Ces facteurs le rendent  très attrayant pour les criminels qui souhaitent dissimuler, déplacer ou investir leurs produits illicites.

L’or passé en contrebande

Dans le secteur de l’exploitation minière, il y a aussi une marge considérable qui revient aux groupes terroristes et aux groupes criminels organisés, a souligné Joachim Kientéga. L’or extrait illégalement est introduit en contrebande dans une autre juridiction. A cet effet,  des passeurs sophistiqués transportent illégalement le minerai extrait au-delà des frontières pour recourir au commerce transfrontalier afin de blanchir les produits de la contrebande d’or. À l’en croire, l’or est facilement passé en contrebande car la majorité des opérations de blanchiment d’argent et des infractions relatives au marché de l’or sont associés au commerce international et national.

Au regard de ce qui précède, M. Kientéga a donné des perspectives en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux/ financement du terrorisme dans le secteur des mines. Il s’agit de la mise en place d’un dispositif efficace de supervision et de contrôle des assujettis du secteur non financier. Il a préconisé également une évaluation sectorielle des risques de financement du terrorisme dans le domaine de l’orpaillage.

Par ailleurs, il a proposé la diffusion des guides de contrôle et de supervision à l’autorité de contrôle du secteur des Mines, notamment la Direction générale des Mines.

Flora Sanou

dbchIl n’est pas rare de voir des enfants en groupe tard la nuit qui se promènent. On se demande où ils vont et ce qu’ils ont bien pu raconter à leurs parents pour qu’ils les autorisent à traîner dehors à pareille heure. De plus, en période de fête ou à d’autres occasions, des mineurs se retrouvent dans des maquis, où ils fument, s’enivrent sous le regard coupable des gérants de maquis qui se plient à leur volonté. Tous ces mômes hors du contrôle parental sont exposés à la consommation de la drogue, au banditisme et même à la prostitution.

Les enfants de la rue ne sont pas seulement ceux qui mendient et dorment dans la rue. Un autre phénomène est là et semble prendre de l’ampleur. Il s’agit des enfants mineurs qui restent pendant des heures loin du cadre familial et s’adonnent à des actes déviants. Qu’est-ce que des enfants qui ont un âge compris entre 6 et 17 ans peuvent bien avoir à faire dans les rues tard la nuit ? Pourtant, on les voit souvent agglutinés, têtes baissées sur l’écran d’un Smartphone, se passant à tour de rôle une bouteille contenant sûrement de l’alcool et, pire, élaborant des plans de vol ou de braquage.

A qui incombe la responsabilité de ces enfants ? Le gouvernement a déjà commencé à jouer sa partition à travers le ministère de la Femme qui, en 2018, avait initié une opération de retrait des enfants de la rue. Beaucoup d’entre eux avaient, à cette occasion, été placés dans des centres d’accueil et d’insertion sociale. Les yeux sont à présent rivés sur les parents. Ou bien ces derniers seraient-ils aussi devenus impuissants face aux agissements de leur progéniture ?

L’avenir de ces mineurs risque d’être hypothéqué s’ils continuent à se livrer à ces pratiques malsaines et, par ricochet, celui du pays.

Il faut que des moyens soient trouvés pour recadrer ces enfants car si rien n’est fait et qu’ils continuent sur cette lancée, ils risquent de se retrouver sans repères et sans avenir.

Nafisiatou Vébama

bjam uneLe vendredi 15 juillet 2022 à Ouagadougou, au deuxième jour de la Journée de l’artisan minier (JAM), une communication a été donnée sur  les technologies innovantes d’exploitation et de traitement de minerais au Burkina Faso. Ce thème, traité sous forme de panel, a été conjointement développé par le directeur de l’Encadrement technique de l’ANEEMAS (Agence nationale d'encadrement des exploitations minières artisanales et semi-mécanisées), Abdou Gafar Romba, le coordinateur national de l’ONG ARM (Alliance pour une mine responsable), Désiré Nikiéma, Mamoudou Koama de l’association des Artisans miniers,  l’économiste  Salofou Trahoré et Seydou Kabré de l’ONG canadienne Artisanal gold consulting (AGC).

Au Burkina Faso, les artisans miniers se servent des produits chimiques dans l’extraction du minerai malgré l’interdiction des textes réglementaires. Or ces produits chimiques, notamment le mercure, le cyanure, les explosifs et autres,  dans le traitement de l’or sont hautement nocifs pour l’homme et l’environnement.

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 C’est pourquoi, selon les panélistes,  de nouvelles technologies de traitement de l’or ont été développées pour réduire, voire mettre un terme à l’utilisation de ces substances. Il s’agit des chaînes de traitement de l’or qui permettent de concentrer le minerai et de passer directement à la fusion sans obligatoirement utiliser le mercure. De ce fait, plusieurs machines interviennent dans le processus. Il s’agit, entre autres, du Goldkacha, de la table vibrante, du broyeur, du concasseur et du Gold drop.

Le traitement mécanique améliore la rentabilité. En effet, l’utilisation de ces technologies innovantes dans le secteur minier artisanal permet  d’améliorer le taux de récupération de l’or en le faisant passer de 70 à 80%, de réduire la pénibilité du travail et de protéger l’homme et l’environnement contre l’utilisation des substances dangereuses.

bjam 3Ces nouvelles technologies d’exploitation et de traitement du métal jaune présentent d’énormes avantages, a en croire le représentant des artisans miniers, Mamoudou Koama. Cependant, l’État doit permettre d’abord aux artisans miniers d’acquérir des permis d’exploitation car les nouvelles technologies ne peuvent pas être utilisées sur des sites non reconnus, a-t-il souhaité. De plus, ces technologies ne sont pas accessibles aux artisans du point de vue des coûts, toujours selon lui. De ce fait, il a plaidé, au nom des artisans miniers, pour des mesures d’accompagnement afin de leur permettre d’acquérir ces machines.

A en croire le directeur de l’Encadrement technique de l’ANEEMAS, Abdou Gafar Romba, des réformes ont déjà été engagées par l’Etat  pour permettre aux artisans d’entrer en possession desdites technologies. 

Par ailleurs, il a exhorté les artisans miniers à s’organiser  en coopératives. Ainsi, ils pourront mobilier assez de fonds pour acquérir ces outils. Il existe, en outre, des mécanismes d’accompagnement  à travers des structures financières comme les banques pour l’acquisition de ces technologies, a expliqué M.  Romba.

Cependant, la mécanisation à outrance pourrait porter préjudice à la main-d’œuvre. C’est pourquoi  il faut y aller prudemment, a conseillé Abdou Gafar Romba pour conclure.

Flora Sanou

byalaChaque peuple a un repère traditionnel de mesure du temps. Le repère scientifique africain de mesure du temps est ancien à celui européen. Dans une interview réalisée le mercredi 13 juillet 2022, Bayala Linhoué Imhotep, doctorant en étude culturelle africaine et membre fondateur de l’école 2 heures pour Kamita, explique que ce calendrier, dans lequel l’année commence à chaque 19 juillet, est à l’an 6258. Il montre la célébration qu’ils organisent à l’orée de l’an 6259 et appelle à prendre conscience que la science moderne issue de l’Occident trouve ses origines en Afrique.  

Comment on peut appeler la pratique culturelle africaine dont vous faites la promotion ?

Je dirai que c’est le culte des ancêtres. Nous on utilise rarement l’expression religion parce que la religion est un phénomène historique qui a des buts idéologiques et politiques. Par contre, la spiritualité est le fait que tout être existe ou doté d’esprit.

Est-ce différent de ce qu’on appelle animisme ?

Ce n’est pas différent. Animisme signifie que tout est animé. On considère que la nature, les herbes, les roches, la terre, l’air, le feu, tout ceci est animé. Et quelqu’un qui tente de démontrer le contraire se rend compte du contraire. Parce que l’arbre qui est là, pour lui enlever la dignité d’être animé il faut le couper ou l’écorcer. Et tout de suite, il en sortira de la sève. Cette sève sur le poisson sera du sang ou autre liquide. Donc nous sommes en tradition africaine et si on quitte l’hypocrisie occidentale, on se rend compte que tout est vie. C’est pourquoi dans la démarche du croyant africain, à partir du moment où tout a été créé par Dieu, on considère qu’il a eu à ensemencer dans chacune de ses créatures, une parcelle de lui-même. Donc c’est une spiritualité mathématique et je dirai scientifique.

Certains parle de Kemitisme et on appelle les membres les Kamite. Expliquez-nous leur signification.

C'est un courant idéologique qui part du fait que les africains ont nommé la terre qu'ils habitent Kamita. C'est comme quand Sankara a pris le pouvoir, il décide de donner une forme vivante au pays. La forme vivante c'est les valeurs que le nom revêt. Et ils vont dire que leur terre c'est Kamita qui veut dire en langue égyptienne copte, la terre des hommes aux visages cramés. Donc l'origine c'est l'Égypte antique mais on retrouve sa traçabilité dans toutes les entités de la linguistique africaine. Théophile Obenga a même écrit un prestigieux livre sur ça, “l'unité linguistique“. Donc l’expression de base, c'est kamina qui désigne la terre des hommes ou la terre de ce qui est cramé. Donc ils ont désigné et nommé leur terre en fonction de leur être, en fonction de leur propre perception d'eux-mêmes. S'il y a des blancs au Maghreb aujourd'hui, il faut repartir au 4ème siècle pour découvrir qu'ils sont venus du Yémen et ils sont entrés par le Carthage. Donc kamite qui désigne le territoire, kemite les citoyens.

Cheikh Anta Diop dans son ouvrage "Civilisation ou Barbarie" dit : "L'Africain qui nous a compris est celui- là qui, après la lecture de nos ouvrages, aura senti naître en lui un autre homme, animé d'une conscience historique, un vrai créateur, un prométhéen porteur d'une nouvelle civilisation et parfaitement conscient de ce que la terre entière doit à son génie ancestral dans tous les domaines de la science, de la culture et de la religion ". Est-ce cela la définition du Kamite ?

J'ai du respect pour cet homme dont l’intelligence n’a pas d’égale. En 1954 lorsque Cheick Anta Diop sort Nations nègres et culture, il n'était pas donné à tout le monde d'avoir une telle puissance d'esprit. Mais il a défié l'époque et il a poussé très loin. Et la définition qu'il a donnée répond trait pour trait à l'adjectif qui qualifie un citoyen Kamite, qui est ce noir doter d’une conscience historique.

Que voulait dire exactement Cheick Anta Diop et de qui parle-t-il dans cette citation ?

Il parle du Noir précisément parce que c'est lui qui a un complexe d'existence et de reconnaissance. Le noir souffre de complexe chez lui, il souffre de complexe quand il est hors de chez lui. C'est lui son identité humaine qui souffre. Des philosophes comme Gobineau ont théorisé sur l'inégalité des races. Ça veut dire qu'on a rendu scientifique, le caractère inhumain du Noir. Des barbares intellectuels comme Voltaire ou Molière iront jusqu'à ranger le Noir parmi les animaux. Il (Voltaire) dira que ''quand on prend les êtres les plus intelligents il y a d'abord les Blancs, après il y a les indiens et derrière les indiens il y'a les arabes. Mais les noirs qui ont des caractères proches des humains...'' Ah là, ça c'est la catastrophe. Quand il dit ''qui ont des caractéristiques proches des humains'', ça veut dire qu'il considère que le noir n'a pas une valeur humaine. Il revient pour dire qu'on peut tout de même le classer. Et dans cette classification, le singe vient en premier, ensuite vient l'éléphant et enfin les Noirs. Donc on considère que même dans le quotient intellectuel, le Noir arrive après deux animaux. C'est ce qu’on appelle l'occidentalo-centrisme. C'est pourquoi nous, on a conceptualisé l'afro-centrisme. Et Cheick Anta Diop l’a compris en rétablissant la vérité dans ses recherches. C’est pourquoi il dit que le noir qui nous aura lus, doit être animé de conscience historique, pour y tirer la puissance d’un géant qui est son ancêtre. Et un africain qui n’a pas encore lu Cheick Anta Diop, je considère qu’il est le plus grand des malheureux. Il perd des choses, que ni la Bible, ni le Coran ne peuvent compenser.

Pourquoi soutenez-vous cela ?

La falsification de l’histoire à consister à dire que l’homme noir n’a contribué à aucun élément de dignité et de sagesse en ce qui concerne les sciences, que ce soit les mathématiques, l’architecture, la physique et tout le reste. Cheick Anta Diop fait un sarclage scientifique et historique et démontre dans « Antériorité des civilisations nègres » ou il revient en détails sur le fait que les intellectuels pilleurs de bibliothèques nègres de l’Egypte antique se sont rendus propriétaires de ce savoir. Je parle de tous ces intellectuels comme Socrate, Aristote, etc. qui ont tous été les fruits du génie et de la qualité des enseignants qu’on avait au plan africain. Quand on prend dans la médecine, dans le livre II de Hérodote, il dit que 200 ans avant la venue d’Hippocrate, qui s’attribue un savoir que son cerveau ne permet pas d’établir, en Afrique on est passé de la médecine générale à la médecine spécialisée, particularisée. Nous avons des images où on fait de la chirurgie dentaire. Et ces éléments sont conservés dans les musées européens, ceux qui nous nient le génie noir pourtant tout leur patrimoine muséal est bourré de science noire. Et Cheick Anta Diop le précise dans son ouvrage. Il dit que c'est au moment où l'oligarchie occidentale se rend compte que tout ce qu'elle revendique, c'est-à-dire quand la Grèce qui a été vantée, et projetée au sommet de l'univers comme étant le berceau de toutes les civilisations et de toutes les grandeurs ; elle s'est rendu compte que tout ce qui faisait la gloire et la grandeur de cette Grèce venait des Africains qu'on taxait de sauvages. Donc l’Africain qui a lu Cheick Anta Diop, découvre qu'il a eu une histoire avant la colonisation. Dans son ouvrage, ''L'Afrique précoloniale'' Cheick Anta Diop montre qu'il y a eu une Afrique politique et économique avant la colonisation, une Afrique organisée sociologiquement, culturellement et spirituellement. Donc la notion de Dieu n'est pas devenue le quotidien de l'africain parce que des arabes sont venus lui dire est-ce que tu connais Allah. Non il le connaissait parce qu'aujourd'hui on est le seul peuple qui est incapable de dire Dieu au pluriel. Dans toutes les langues, l’appellation de Dieu c’est au singulier. Dieu est une entité unique qui se manifeste diversement.

On remarque qu’il y a de moins en moins de personnes qui s'intéressent aux religions africaines. Les RGPH successifs au Burkina en témoignent. Est-ce le constat que vous faites également ?

Moi je constate plutôt l'inverse en miniature. Dans les années 80 on est subjugué par la colonisation et par ses avantages entre griffes ; l'école, la langue française, on est mystifié. Mais à partir des années 2000 il y a un désenchantement par rapport aux promesses coloniales au plan politique et religieux. La colonisation a promis aux sociétés africaines que sur le plan politique par exemple, la démocratie allait faire des miracles. Aujourd'hui il y a une fatigue démocratique qui se constate par les instabilités. Donc même si les femmes et les hommes qui sont dans les religions coloniales demeurent nombreux, rien ne garantit qu'en 2025 on aura les mêmes statistiques et mieux, je vous le garanti en 2030, les statistiques vont être inversées. Les 9% d'animistes, ça c'est pour rester dans le conformisme de l'hypocrisie morale et religieuse. Beaucoup de leaders religieux utilisent de façon malencontreuse certaines recettes à titre de miracle. C'est une usurpation du pouvoirs mystiques traditionnels parce que chez eux rien ne peut pas faire un miracle. C'est dans les traditions qu'il y a le miracle. Il n'y a pas de miracle à l'église ni à la mosquée.

Justement il y a des personnes dans les religions coloniales qui ont recours aux pratiques ancestrales. D’autres même veulent y retourner mais ne savent pas comment faire. Est-ce qu'il n'y a pas de défaillance d'organisation au sein de la religion traditionnelle qui font que les gens n'arrivent pas à se réorienter vers celle-ci et restent dans les religions coloniales ?

Je suis d'accord avec vous c'est l'un des péchés. Mais cela n'est pas lié à la responsabilité historique de nos ancêtres. D'abord il y a eu un travail de déconstruction de la religion africaine. Que ce soit l'organisation économique, l'organisation sociale, tous les modèles d'organisations de la société africaine, jusqu'à la nomination des citoyens, ont été agressés. Donc le chrétien préfère s'appeler Barthélémy, ce qui veut dire margouillat en lieu place de Ratamalgré comme mon ami. Donc les institutions traditionnelles de prière africaines ont connu la même déstabilisation, la même déstructuration. Ce qui fait qu'aujourd'hui l'un des défis que nous devons surmonter c'est celui de réorganiser la croyance ancestrale pour faciliter l'adhésion et pour même faciliter la canalisation de ceux qui veulent faire le retour aux sources. Nous, nous en recevons des centaines qui nous disent qu'ils veulent retourner aux sources mais ils ne savent pas comment faire. Donc ça montre qu'il y a la pertinence d'un défi à relever en ce qui concerne l'organisation des institutions traditionnelles. L'un des éléments indicateurs, vous avez des chefs coutumiers chrétiens. Est-ce que vous savez que c'est un sacrilège spirituel. Vous avez par exemple à l'église protestante les chefs coutumiers protestants, à l'église catholique les chefs coutumiers catholiques, pour les musulmans vous avez les chefs coutumiers musulmans. Est-ce que vous pensez qu'on peut dans l'islam faire les pasteurs musulmans, ou les prêtres musulmans ? C'est donc une mal digestion spirituelle. Ces chefs souffrent d'un complexe en lieu et place de consolider les institutions spirituelles africaines pour faciliter l'adhésion et le retour aux sources de leurs fils et de leurs petits-fils. Ils ont préféré s'éparpiller dans des croyances coloniales, souvent pour des prébendes. Ce n'est pas parce qu'ils y croient. Parce que ce qu'ils font pour demeurer victorieux vis-à-vis des adversaires, ce n’est pas une foi qui est reposée sur la Bible ou sur le Coran.

Vous dites recevoir des centaines qui veulent retourner aux sources. Comment vous procédez ?

Nous avons déjà procédé depuis 9 ans par la mise en place d'une structure, d'un incubateur d'idées. Qui aide ceux mêmes qui veulent s'affranchir des religions coloniales sinon du modèle de civilisation occidentale à venir partager leurs idées. Et pour nous c'est un espace d'éducation au retour à la culture africaine, à la grandeur de la civilisation africaine. Une fois qu'il se dégage en eux l'assurance que l'Afrique est un continent que nous devons apprendre à connaître parce qu'il a des éléments précieux nous l'envoyons vers d'autres dimensions. Nous lui demandons s’il peut citer trois générations après son père ou son grand-père. Le retour aux sources ce n'est pas allé égorgé une pintade ou un poulet à midi sur un carrefour. Ça c'est du spectacle rituel. Il y a des gens qui arrivent avec des notions prébendiers. Je veux réussir au BAC, ma copine qui veut me quitter, moi je veux avoir de l'argent, etc. Non ça ne marche pas ainsi ce n'est pas ça la culture africaine. Qui veux réussir tu dois poser les conditions de sa réussite avant de demander soutien. Sinon si des ancêtres valident ça, c'est qu'on quitte le principe sacro-saint de la culture africaine qui est la Made. La made c'est la loi de l'équilibre, la loi de la justice.

Mais on remarque que c'est uniquement dans le milieu intellectuel précisément le monde universitaire. Est-ce que ça se déploie dans les localités hors Ouagadougou ?

Bien sûr ça se déploie. Mais ce qu'il fallait, c'était d'abord de voir des gens qui assument la particularité de la spiritualité africaine, sans complexe aucun. Qui l'assument pourquoi parce que tout le monde a passé son temps à vomir la spiritualité africaine, on la prenait pour diabolique. Et tout le monde avait peur de revendiquer qu'il fait partie de ce diabolisme, y compris les praticiens ; chacun se cachait. Nous sommes l'une des organisations précurseurs qui avons assumé sur l'espace public notre différence spirituelle et nous considérons qu'elle est d'ailleurs supérieure aux religions. Parce que les religions comme je l'ai dit sont des institutions politiques, des institutions de domination à but expansionniste. Mais nous, nous avons un avantage et cet avantage c'est Cheick Anta Diop qui nous l'a donné. Avec la faculté de lire et d'écrire et surtout avec la faculté universitaire, nous sommes dans nos recherches obligés de nous référer à une certaine bibliographie pour consolider nos positions. Pourquoi les gens ne vont pas faire du tourisme savant en Europe ? Pourquoi tous les musées occidentaux sont bourrés de patrimoine culturel africain et non de patrimoine culturel européen. Leur patrimoine culturel n'a rien, sauf la barbarie de Napoléon et l'imprudence de Jeanne-d'Arc qui ne peuvent pas être rechassé comme des actes de grandeur. Et nous qui avons eu accès à ce savoir, avons stimulé chez ces gens qui ne comprennent pas français. Et aujourd'hui nous avons compris qu'il faut délocaliser cette conscience que nous avons apprise pour la démocratiser, la populariser. On est seulement 2,3% qui parlons français, si cette conscience reste dans le français, par le chiffre même ça va être une barrière.

Est-ce que vous en aurez les moyens ?

Nous allons à notre rythme et c'est ainsi que nous fonctionnons. Ce sont nos membres qui financent. Nous leur avons dit il n'y aura pas de promoteur. Les imams ne vont pas venir promouvoir le retour aux sources, le Vatican non plus. Donc si notre spiritualité est importante, devenons les bailleurs de fond de notre spiritualité. Nous avons un jardin et un restaurant et nous mangeons dans des ustensiles africains. Nous avons créé une économie de souveraineté et c'est avec ça nous finançons à notre rythme. Aujourd'hui c'est à Koudougou on peut aller, mais avant d'aller à Koudougou on a fait six éditions à Ouagadougou parce que nos moyens ne nous permettaient pas d'aller dans les treize régions. Le jour où on sera capable d'aller au-delà de 100Km on ira à 300 Km à Bobo, au Ghana et pourquoi pas rejoindre nos cousins en Amérique Latine, etc. Nous partons à notre rythme mais notre ambition est indescriptible par sa monstruosité et sa grandeur.

Est-ce que c'est une idée qui peut survivre à Bayala ?

Bien sûr. Parce que Bayala n'est pas le seul à croire à l'urgence et à la cohérence morale de croire à nos ancêtres. Si on avait pas créé le cadre 2 heures pour nous, 2 heures pour kamita ; si ce cadre n'avait pas formé des gens dans toutes les sphères de notre société, au Burkina ou hors du Burkina, alors nous étions menacés. Mais nous sommes l'une des plateformes qui influencent les dernières décisions de notre jeunesse. On n'a pas pu compter le nombre de conférences que nous donnons par an. Et partout où nous partons, nous n'avons pas fini sans avoir quelqu'un qui vient se confesser. Et je vous avoue que si aujourd'hui je meurs, je pars soulagé parce que j'ai semé ma part.

L’évènement que vous organisez à Koudougou à partir du 14 juillet, de quoi s’agit-il ?

Il s'agit de la valorisation du calendrier africain qui a été conçu 4236 ans avant Jésus-Christ. C'est-à-dire que 4236 ans avant Jésus-Christ nos ancêtres savaient calculer le temps. Les grandes notions comme la semaine étaient un peu plus faciles. La semaine faisait 10 jours correspondaient à quelque chose de précis dans toutes les sociétés africaines que sont les cycles des marchés. Le mois faisait 30 jours, la journée faisait 24 heures et l'année 360 jours et non 365. Il y a cinq jours additionnels qui étaient réservés aux divinités. On se rend compte que 4236 ans avant Jésus-Christ nos ancêtres avaient créé un repère de temps dans l'espace, alors comment on peut se convaincre de la supercherie des papes Grégoire, Julien, etc. qui ont donné leurs noms au mois dans les calendriers. Ils n'arrivaient pas à les nommer parce que le voleur n'a pas pu prendre toutes les informations. Donc cet événement c'est pour célébrer le génie de nos pères, la fierté africaine, le sentiment de confiance que le noir doit reconvoquer dans son existence quotidienne. Aujourd'hui le noir est vidé de tout assurance, de toute confiance en lui parce qu'on lui dit que de tout ce qui articule la modernité rien ne vient de son génie. Et effectivement quand on regarde aujourd’hui, dans la maison d'un africain moderne, ce que Joseph Ki-Zerbo a appelé le “Chaos conjoncturel“, vous voyez un frigo France au-revoir, un matelas France au-revoir, des cheveux France au-revoir, etc. Mais c'est tout vous dire sur le complexe et le sentiment de non fierté que les africains ressentent du fait qu'on a bourré dans leurs têtes qu'ils n'ont rien de valeureux. Donc en présentant ce calendrier c'est pour booster la fierté, le Black Power, le Black spirit.

Dans le calendrier grégorien nous sommes en 2022, dans celui africain on est en quelle année ?

On est à l'an 6258. A partir du 19 juillet, on passe à l'an 6259. Donc le 19 juillet c'est notre nouvel an. Est-ce que vous savez qu'il y a le nouvel an indien, le nouvel an vietnamien ou le nouvel an chinois ? Mais comment se fait-il que les africains soient seuls à se convaincre qu'il n'y a qu'un seul calendrier ? Pourquoi il n'y a pas d'années africaines ? Quand nous avons posé cela, beaucoup d'Africains nous sont tombés dessus. Vous savez qui sont nos soutiens ? Ce sont les arabes, les chinois et même certains occidentaux français qui disent mais oui c'est juste. Et encore que vous avez la plus grande civilisation.

Pour le calendrier grégorien la référence c'est la naissance de Jésus-Christ, pour les musulmans je crois que c'est Mahomet. Et pour celui africain, quelle est la source ?

Il n'y a pas de source mais la conception finalisée de la mesure du temps c'est en 4236 ans avant Jésus-Christ. C'est le début de la mesure formelle du temps. Le processus de formalisation a pris 4000 ans parce que la loi scientifique on l'obtient par l'observation et par la régularité. Nos ancêtres ont pris 1460 ans d'observation parce qu’à chaque 1460 an, il se produit un phénomène. Donc il y avait des institutions pour transmettre le savoir. Nos ancêtres sachant qu’ils étaient mortels ont créé un système d'immortalité par l'éducation structurée (initiation dans certaines communautés et même des écoles pour certains empires). Quand l'Angleterre tardive rencontre le système scolaire au 17ème siècle disent qu’ils ont inventé l'école et l'Université cela fait rigoler. Mais en 1236 déjà il y avait les universités Sankoré, Djené, il y avait l'université de Tombouctou qui formaient au moyen âge plus de 2500 universitaires pluridisciplinaires qui venaient jusque de l'Afrique du Sud. Y compris les premiers savant arabes. Les Ibn Batuta, les Ibn Kadul. Il faut lire, eux-mêmes ont écrit. Les mathématiques, l'histoire, la géométrie, la philosophie, l'économie, etc.

Donc 1460 ans d’observation, ça montre à quel point nos ancêtres étaient patients. Ils ne sont pas dans le bouillonnement pressé de nos jeunes d'aujourd'hui. Donc ça nous enseigne la sagesse de la patience, de la persévérance. Ça nous montre que quand on fait quelque chose on ne doit pas le faire pour jeter de la lumière sur soi, on doit le faire pour que ça jette de la lumière sur l'univers. Vous voyez les rois d'Europe chacun revendique un phénomène dans l'histoire. Non en Afrique ce n’est pas ainsi. La conscience, la connaissance, la morale sont au-dessus de la mortalité humaine. On considère que l'être humain, c'est un abri de la vie, qui laisse le corps mourir pour rejoindre la vie et pour revenir à la vie.

Qu'est-ce qui est prévu comme événements pendant ces cinq jours de la célébration du calendrier africain ?

Il s'agira précisément d'un programme de conférences d'université Sankoré qui part du 14 au 18. Nous aurons une thématique globale sur la construction de l'Etat-nation. La première conférence c'est Rôle du système éducatif dans la construction de l'Etat-nation, animé par l’écrivain professionnel Adama Siguiré. Le deuxième jour c'est Recette pour la création d'un État multinational moderne et prospère : cas du Burkina Faso, qui sera animé par l'éminent journaliste d'investigation Boukary Ouoba du journal Le Reporter. Le 16 nous aurons La résolution des crises et la coexistence pacifique dans la société traditionnelle qui sera animé par moi-même et un confrère qui viendra de la Côte-d'Ivoire. Le quatrième jour on aura la problématique de la crise des valeurs dans le fonctionnement des États africains qui sera animé par l'éminent professeur et ex-ministre de la culture Abdoul Karim Sango et le dernier jour on aura les armées nationales face aux nouveaux défis sécuritaires : quelles perspectives pour une meilleure adaptation de sortie de crise, avec l'éminent analyste politique, Abdoulaye Barry, journaliste et politologue, doctorant en science politique. Et le 19 nous aurons la célébration de l'an africain. Toutes ces activités vont se dérouler à Koudougou et nous invitons la population du cavalier rouge et des villages environnant à se mobiliser, tous ceux qui sont à Ouagadougou et partout dans le monde qui nous entendent et qui peuvent nous rejoindre. Nous allons présenter le 19, de façon officielle, le calendrier africain 6259 ans. Nous l'avons en trois version, la première version c'est celle qu'on colle sur les murs ou dans les bureaux, la deuxième version c'est la version table, très élégante et la troisième version c'est la version poche.

Interview réalisée par Etienne Lankoandé

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