Le 23 juin 2020, le gouvernement burkinabè a procédé à la remise du premier lot des 300 ambulances du projet présidentiel au profit des communes du Burkina. Dans son n°206 du 26 juin 2020, le journal « Courrier Confidentiel » s’est penché sur le mode et le coût d’acquisition de ces ambulances. « Ce marché de 300 ambulances à 14,1 milliards aux relents de surfacturation est un endettement aveugle du contribuable au profit d’entreprises avec lesquelles le pouvoir a des intérêts financiers », a écrit le journal. Radars Info Burkina s’est entretenu avec Yacouba Ladji Bama, rédacteur en chef dudit journal. Lisez plutôt.
« Quand nous avons eu les comptes rendus de nos confrères sur cette cérémonie de remise d’ambulances il y avait des choses qui interpellaient les consciences. On a présenté l’opération comme une largesse du président du Faso à l’endroit de ses administrés. Et pour une opération aussi grande, si l’on s’en tient aux chiffres, ils s’élèvent à 14,1 milliards de francs CFA. Mais des éléments essentiels ne ressortent pas des comptes rendus qu’on a pu lire. Par exemple, on ne précise pas quelle procédure a été utilisée pour acquérir ces ambulances, on n’a pas dévoilé non plus le coût des ambulances au cours de la cérémonie. Or généralement à ce genre de cérémonies, ce sont des choses qui se disent de façon très naturelle. Cela nous a donc amenés à nous interroger et à ne demander s’il n’y a pas des choses qu’on cherche à cacher dans cette affaire», a expliqué Yacouba Ladji Bama.
C’est ainsi que le journal, dans ses investigations, a découvert qu’il s’agissait d’un crédit-bail. «C’est le même procédé qui a été utilisé pour l’acquisition des 77 véhicules par la mairie de Ouagadougou. Et quand on a vu les chiffres concernant le coût de ces ambulances et les acteurs qui sont impliqués dans l’opération, notamment FIDELIS Finances, qui a piloté cette affaire de la mairie, ainsi que la maison d’assurances qui est Raynal assurances, citée également dans l’affaire de la mairie, nous nous sommes dit qu’il y avait quelque chose qu’il fallait chercher à comprendre dans cette affaire. Nous avons donc creusé et découvert ce que nous avons écrit dans le n°206 de notre journal qui vient de paraître », a soutenu le rédacteur en chef de « Courrier confidentiel ».
L’attitude du ministère de la Santé lors de l’investigation sur les conditions d’exécution de ce marché a « vraiment intrigué CC ». « A la fin, on a estimé qu’il ne pouvait pas en être autrement. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’après plusieurs jours d’attente, le ministère a fini par nous dire que ce marché n’a pas été géré par lui ; que c’est un marché du gouvernement de façon beaucoup plus élargie et qu’à ce titre, c’est le ministère des Finances qu’on devait voir pour obtenir des informations sur ce marché d’acquisition d’ambulances. Cela nous a paru assez ahurissant. On s’est adressé au ministère des Finances, qui s’est étonné que celui de la Santé ait dit que c’est le département des Finances qui a exécuté ce marché. En réalité, le ministère de la Santé ne sait pas comment se défendre dans ce dossier et il a voulu refiler la patate chaude à d’autres acteurs qui n’ont rien à voir dans le dossier », a-t-il confié.
Selon l’enquête du bimensuel d’investigation, il y a des membres du gouvernement qui tirent des dividendes économiques importants de ce marché. « C’est une imbrication d’intérêts particuliers qui s’entrechoquent. On a compris que c’était une affaire où le conflit d’intérêts était vraiment manifeste », a souligné M. Bama.
S’agissant de la suite à donner à cette affaire, le journaliste d’investigation a affirmé : « Nous avons fait notre part du boulot, nous attendons que la justice prenne le relais pour situer les responsabilités et s’il y a des fautifs dans cette affaire, qu’ils répondent de leurs actes. »
Aly Tinto