FESPACO 2025 : Kevin Arkadie et Rahmatou Keïta partagent leurs savoirs-faires cinématographiques avec des étudiants burkinabè
PLAN B et GCOM en partenariat avec Burkina Info et Radars Info, ont organisé un Master Class spécial FESPACO, au profit des étudiants de l’ISTIC (Institut Supérieur des Technologies de l’Information et de la Communication), de l’ISIS (Institut Supérieur de l’image et du son), de l’IAIC (Institut africain des industries culturelles), de Clap en Herbe et certains venus des zones à fort défis sécuritaires notamment la région de l’Est, la Boucle du Mouhoun. C’était ce mercredi 26 février 2025, au Centre International de Leadership et d’Excellence 22&SIX. Le thème de ce Master Class était : « Rendre la Production mondiale accessible, atteindre un public plus large tout en créant un impact local avec vos films ».
Durant environ deux heures, ces étudiants ont eu la chance d’apprendre auprès de deux professionnels du cinéma. Il s’agit de Kevin Arkadie, producteur et réalisateur de Hollywood venu des États-Unis et Rahmatou Kéita, réalisatrice nigérienne venue de la France.
Kevin Arkadie, a partagé ses connaissances sur la production télévisuelle, la production des séries, le timing qu’il faut en fonction de l’histoire à raconter dans les séries, les circuits éventuels pour la diffusion des films. Selon lui, avant de se lancer dans un projet, il faut avoir un objectif précis : est-ce pour vendre sa production ou non ? Parce que l’objectif recherché doit guider le travail en cours et pour avoir une grande audience, l’on doit ignorer sa personne. « N’écrivez pas une histoire qui vous plait, n’écrivez pas pour vous-mêmes. Ecrivez l’histoire pour votre entourage, votre ville, votre pays, vos voisins et vous verrez le streaming venir à vous-même », a-t-il conseillé les étudiants. Il a souligné que les compagnies de streaming ne paient pas les films déjà connus du public, mais s’intéressent à ceux nouvellement produits pour la souscription.
L’une des préoccupations des étudiants était le risque de disparition des salles de ciné face à l’essor des sites de streaming. En réponse, le producteur américain a notifié, que les salles de ciné et les sites de streaming sont complémentaires car, les films projetés dans les salles de ciné, se retrouvent quelque temps après, sur les sites de streaming.
Pour sa part, Rahmatou Keïta, productrice, scénariste, journaliste et réalisatrice du Niger, pionnière du cinéma nigérien en fiction, en série et en long métrage, l’une des 100 femmes les plus influentes au monde, a parlé de son parcours dans le monde du cinéma, les difficultés rencontrées et prodigué des conseils aux jeunes étudiants qui veulent approfondir leurs études et se lancer dans cet 7e art. Elle confie être venue dans le cinéma par passion et sa première production cinématographique a vu le jour, grâce à l’accompagnement du gouvernement burkinabè particulièrement le ministère de la culture avec à sa tête Mahamoudou Ouédraogo.
Sur la question de la création, elle a exhorté les étudiants à être authentiques. « C’est l’authenticité africaine le plus important. C’est à nous d’inventer le cinéma, parce que l’avenir du cinéma est en Afrique. C’est à nous de nourrir le cinéma par nos belles histoires, notre beauté, notre originalité, notre générosité, nos puissances. Il faut raconter des histoires authentiques, vos propres histoires, arrêtez de copier les autres. Ce n’est pas la peine d’aller chercher ailleurs », a-t-elle laissé entendre. Elle a également insisté sur l’importance de la recherche.
« On n'a pas d'industrie de cinéma. Il faut qu'on crée. Il faut qu'on raconte nos histoires. Il faut qu'on existe dans le monde et d'ailleurs on existe. Il faut que nous disions au monde qui nous sommes, pas au monde de dire qui il veut qu'on soit », a soutenu Rahmatou Keïta
Par ailleurs, elle a attiré l'attention, des participants sur les conflits qui existent de nos jours avec les jeunes qui pensent que les anciens doivent leur céder la place.
« Le cinéma est une passion. Pour relever toute sorte de défis, il faut apprendre, se cultiver, lire des livres. Il faut connaître l'histoire des choses qu'on veut raconter. Il faut avoir beaucoup d'humilité devant le gigantisme du public. Le cinéma, c'est de l'amitié, du partage, de l'amour. Il ne faut pas chercher à vouloir écraser d'autres parce que vous avez fait un film », a-t-elle conseillé.
Et de poursuivre : « il n'y a pas un ancien qui vous fera une place puisque, être dans le cinéma, ce n'est pas être fonctionnaire dans un bureau et quand on est à la retraite on s'en va et quelqu'un d'autre vient nous remplacer. Si vous avez peur, parce que votre cinéma n'est pas assez fort pour les rattraper, ne rêvez pas qu'il vous laisse la place. Travaillez le mieux que vous pouvez, faites les plus beaux films, il y a de la place pour tout le monde », a-t-elle indiqué.
Des professionnels du domaine cinématographique ne se sont pas fait raconter cette opportunité. C’est le cas de Georgette Paré, comédienne et actrice de cinéma, qui estime qu’on ne finit jamais d’apprendre.
« J'ai beaucoup appris. C'est vraiment instructif. Quand on fait un Master Class, c'est toujours pour éclairer, pour apporter un plus, renforcer les connaissances. »
Elle n’a pas manqué de fournir des conseils à ceux qui souhaitent faire carrière dans le cinéma. « Pour faire le cinéma, il faut qu'il y ait de la passion. Il faut aimer le travail. On ne vient pas au cinéma parce qu'on veut se faire voir à la télé. Il faut le faire parce que vous avez envie de faire ce travail. Pour pouvoir bien faire ce métier, il faut le vouloir, s'y mettre, faire des recherches, ne pas être paresseux, chercher à créer », a-t-elle dit.
Les futures stars de la réalisation et de la production repartent ragaillardies et sont déterminées à se frayer un chemin dans le cinéma.
« Après avoir assisté à ce Master Class, mes attentes ont été atteintes. On a appris comment le monde du cinéma fonctionne réellement. On a beaucoup échangé avec M. Kevin Arkadie, spécialiste stories times, accompagné de Rahmatou Keïta du Niger, qui nous ont expliqué comment on monte un film. On a beaucoup appris. Je suis satisfaite », a affirmé Évelyne Ouédraogo, étudiante à l’IAIC.
Si les bénéficiaires ont exprimé leur satisfaction, ce ne sont pas les organisateurs qui diront le contraire. En effet, selon Boubié Richard Tiéné, représentant du groupe organisateur, la tenue de ce Master Class, est un pari gagné. « Nous sommes vraiment satisfaits. Nous sommes ravis de trouver cette mobilisation. Pour nous, le pari de l’organisation du Master Class spécial FESPACO 2025, a été tenu », a-t-il déclaré. Il a également salué la pertinence des questions posées par les différents participants, ce qui démontre à son avis, leur volonté d’apprendre et qui motive à faire mieux les prochaines fois. À l’en croire, une compétition avec des films courts de deux à trois minutes sur des thématiques précises, qui a lieu à la 28e édition du FESPACO, sera reconduit à l’édition prochaine.
Une prestation artistique a mis fin à ce Master Class.
Flora SANOU