Le géant des médias sociaux, Meta, a annoncé le mardi 9 janvier 2024 qu'il cacherait désormais les contenus inappropriés, comme les messages sur le suicide, l'automutilation et les troubles de l'alimentation, des comptes d'adolescents sur Instagram et Facebook. Ainsi, ce type de contenu ne s’affichera « plus dans leur fil d'actualité, même s'il est partagé par un compte qu'ils suivent ». Sur cette nouvelle mesure, des acteurs du domaine des médias sociaux ont donné leur point de vue à Radars Info Burkina.
Selon Méta, les utilisateurs adolescents, à condition qu'ils n'aient pas menti sur leur âge lorsqu'ils se sont inscrits sur Instagram ou Facebook, verront leurs comptes placés sur les paramètres les plus restrictifs des plateformes et il leur sera interdit de rechercher des termes susceptibles d'être nuisibles, en plus des contenus inappropriés qui leur seront cachés.
Pour Cyrille Guel, président de l’organisation Educommunik (organisation spécialisée dans l'éducation aux médias et à l'information (EMI), cette décision de Méta « est déjà un bon début quand on sait que les jeunes, surtout les adolescents, n’ont ni le recul nécessaire ni les outils intellectuels requis pour exploiter de manière pertinente, critique et réfléchie, les nombreux contenus distillés sur les réseaux sociaux numériques ». De plus, à son avis, la pertinence de la mesure peut se situer au niveau de l’impact, c’est-à-dire « la portée de ces contenus sur la santé mentale des jeunes ». De ce fait, même s’il est vrai qu’elle (mesure) vise à contribuer à protéger les plus jeunes, il faut que ces derniers jouent franc-jeu en n'utilisant pas des données erronées lors des créations de leurs comptes ou pages ».
Certaines opinions estiment que c'est une décision tardive de la part de Méta, en l’occurrence le groupe de défense des enfants en ligne Fairplay. Sur ce volet, Sieur Guel pense qu’il vaut mieux tard que jamais.
D’ailleurs, « tous les acteurs de la société ont chacun leur part de responsabilité quant à la protection des personnes vulnérables face aux dangers liés aux réseaux sociaux numériques », a-t-il fait remarquer.
C'est ce qui justifie l’engagement de la structure dont il est le premier responsable « dans l'éducation aux médias et à l'information (EMI) pour les catégories plus jeunes, surtout si l'on considère qu'ils sont nés et ont grandi avec les nouvelles technologies et que celles-ci font partie intégrante de leur vie », a-t-il soutenu.
Ange Kambou, président de l’Association des blogueurs du Burkina (ABB), soutient également que c’est une bonne décision qui est à saluer, parce que le plus souvent, il n’y a pas de limitations d'âge sur l'accès aux contenus disponibles sur Internet, de façon générale, et particulièrement sur Facebook. C’est une règle qui permettra d’assainir la plateforme et de réduire les dommages causés aux utilisateurs, notamment la production et la prolifération de tout ce qui est contenu nuisible comme les appels au suicide et autres, selon lui. Et parler de moins de dégâts signifie qu'il n’y a pas de risque zéro. C’est pourquoi il estime que la présente décision de Méta aura des résultats très limités.
« Comme l’entreprise l’a elle-même reconnu, les adolescents peuvent mentir sur leur vrai âge, surtout que la machine n’est pas capable de distinguer les vraies informations des fausses, à moins que Facebook n’exige désormais les pièces d'identité ou passeports pour les inscriptions, ce qui sera compliqué.
Tant qu'il faut juste renseigner un nom, un prénom, une date de naissance, il n'y aura pas vraiment une efficacité par rapport à cette décision de protéger les enfants », défend-il.
Sur la question du retard évoquée par certains critiques, le président de l’ABB pense que malgré les conséquences déjà enregistrées, il n'est jamais trop tard pour bien faire, donc il faut simplement saluer la décision.
De son point de vue, ce travail ne revient pas uniquement à Méta, il faut également un contrôle parental rigoureux.
« C’est la responsabilité de chaque parent d'avoir un regard sur sa progéniture. Il revient aux parents de prendre des précautions sur l’utilisation du téléphone et d’Internet par les enfants en analysant en amont la nécessité d’offrir un téléphone à un adolescent. C’est dommage parce que c’est une triste réalité de notre société actuelle. L’on est face à un retour du bâton de l'hyper liberté.
Il nous faut savoir trouver le juste milieu : bannir les maltraitances d'enfants, mais aussi garder notre manière africaine d'éduquer nos enfants afin qu'ils soient des êtres socialement reconnus et appréciés, des hommes et des femmes bien accomplis », a-t-il argué.
Flora Sanou