Procès assassinat Thomas Sankara : Début d’un marathon judiciaire historique
Le procès sur l’assassinat de Thomas Sankara et de ses compagnons d’infortune s’est ouvert ce lundi 11 octobre 2021 à la salle des banquets de Ouagadougou, transformée en tribunal militaire pour la circonstance. 12 accusés sur 14 ont répondu présents à l’appel du tribunal militaire. Seuls Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando sont absents. Mariam, la veuve de Thomas Sankara, était présente. Radars Info Burkina a pu recueillir quelques avis au sortir de la première journée de ce jugement renvoyé au 25 octobre à la demande des avocats de la défense.
34 ans, c’est le temps qu’il a fallu attendre avant de voir enfin ce procès se tenir. « C'est un jour de vérité pour moi, ma famille et tous les Burkinabè », a déclaré la veuve de Thomas Sankara, Mariam, à l’ouverture dudit procès. Pour Me Prosper Farama, avocat de la partie civile, la tenue de ce procès est une première grande victoire. Mais, poursuit-il, nous ne sommes là ni pour une chasse aux sorcières ni pour une vengeance, encore moins pour une revanche ; seulement pour la vérité et la justice. Et toujours selon l’avocat de la partie civile, l’absence de Blaise Comparoé ne gêne en rien la manifestation de la vérité. « La justice recherche la vérité. Pas la vérité forcément de la bouche de Blaise Compaoré ; il aurait pu être présent sans dire la vérité », a-t-il déclaré. Si ce jour est historique eu égard au caractère emblématique que revêt ce procès du père de la Révolution, les avocats de la défense ne l’entendent pas de cette oreille. Il rejette catégoriquement que ce procès soit enregistré sous quelque forme que ce soit. Selon Me Moumouni Kopio, avocat de la défense, on ne peut pas déroger à la loi pour un dossier que les uns « jugent emblématique ». « J’ai dit que je ne veux entendre ma voix ni dans une radio ni dans une télé parce que je ne vais pas m’aligner sur une violation de la loi. La loi dit qu’on n’enregistre pas », a-t-il ajouté pour justifier son refus. Pour l’histoire et les générations futures, il n’y aura donc pas d’archives audio ni visuel. Et Me Moumouni Kopio d’ajouter : « Le tribunal n’a pas pour vocation de constituer les archives de l’histoire ; c’est pour rendre la justice, il ne faut pas se tromper sur l’objet du tribunal ». C’est une « grande déception », a pour sa part jugé Me Prosper Farama. Etant du même avis que ce dernier, Sam’K exprime sa déception également. « Ma seule déception aujourd’hui, c’est que la décision a été prise de ne pas enregistrer ce procès. Je trouve que c’est vraiment dommage. Pour l’histoire, Sankara ce n’est pas n’importe qui », a soufflé Sam’s K Le Jah, membre de la société civile.
A en croire Me Bénéwendé Sankara, ce procès ne sera pas une partie de plaisir. Et, confie-t-il, j’ai un pincement en cœur de ne pas être en robe du fait de mes occupations gouvernementales. « Nous allons enfin savoir la vérité même si c’est une vérité partielle. Nous allons enfin savoir qui a fait quoi, comment et pourquoi le 15 octobre 1987 », a déclaré Jean Hubert Bazié, compagnon de Thomas Sanakara.
Ce sera un tribunal militaire constitué pour la circonstance qui aura la lourde charge de dire le droit. Le Bâtonnier Siaka Niamba se réjouit que ce pas soit franchi. « Le tribunal a été très bien composé. Ceux qui ont été retenus pourront faire efficacement leur travail », a-t-il soutenu. Une notification va être envoyée au domicile de Blaise Compaoré, absent à l’appel, qui aura 10 jours pour répondre. Faute de quoi, il sera jugé par contumace et là, il risque la peine maximale s’il est reconnu coupable, nous dit Me Prosper Farama. Idem pour Hyacinthe Kafando, l'ancien chef de la sécurité de Blaise Compaoré.
En rappel, le procès a été suspendu à la demande de la défense pour mieux prendre connaissance des 20 000 pages du dossier. Il est supposé reprendre le lundi 25 octobre 2021 à 9h. Le Tribunal militaire, chargé de juger cette emblématique affaire, est composé de 3 juges assesseurs titulaires, à savoir le colonel major Boureima Ouédraogo, le colonel major Alfred Somda et le colonel de gendarmerie Saturnin Poda. Il est en outre constitué de trois assesseurs suppléants qui sont le commandant Christine Sougué, le commandant Abdoul Karim Ky et le capitaine Hygia Capuce. Me Urbain Méda assure la présidence dudit tribunal. Il est assisté d’une conseillère.
Sié Mathias Kam