vendredi 26 avril 2024

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Coronavirus et psychose : Quelle est la prise en charge adaptée pour en venir à bout ?

psykozL'apparition du COVID-19 a engendré chez plusieurs personnes au Burkina Faso et même un peu partout dans le monde une grande panique. C'est ce que les spécialistes de la santé mentale appellent la coronapsychose. Pour en savoir plus sur cette peur liée au coronavirus et surtout comment elle peut être prise en charge, nous avons tendu notre micro au Professeur Kapouné Karfo, psychiatre et expert en psychotraumatisme.

RB : Qu'est-ce qui permet de faire la différence entre la psychose de manière générale et la coronapsychose ?

KK : La différence avec la psychose, c’est que la personne atteinte de coronapsychose sait que quelque chose ne va pas en elle, qu’elle doit chercher la solution qu’elle ne trouve pas, d’où la panique, la perte de son propre contrôle et du contrôle de la situation d’en face. La réalité ici, c’est le calme, la sérénité, la maîtrise de soi que nous devons avoir face à une situation. Quand on perd tout ça, on a perdu le contact avec la réalité de la situation, la réalité de la maladie, la réalité de la réaction normale d’une personne face à une situation.

RB : Qu'est-ce qui fait perdre le contrôle aux gens ?

KK : C’est l’arrivée massive des informations chaotiques effrayantes au niveau de notre psychisme. C’est donc la non-maîtrise du flux d’informations reçues qui aboutit à la psychose. En temps normal, l’organisme s’autorégule face aux vicissitudes de la vie, il ramène toute modification à la normale. En outre, l'intensité de la psychose varie selon les individus puisque nous n’avons pas la même résistance, le même mécanisme de traitement de l’information (il y en a qui sont plus fragiles que d’autres ; d’autres encore sont naturellement paniqueurs). Ce n’est pas déjà la « folie » mais un trouble mental quand même car il y a à peine deux mois au Burkina Faso, personne n’avait peur, d’aucuns pensaient même que le Covid-19 était une maladie artificielle, d’Européens ou de Chinois, qui n’arriverait jamais en Afrique noire. Dans la coronapsychose, tout le monde sait que la maladie est réelle et cherche à se protéger, à s’en sortir ; on s’inquiète pour soi-même, pour les autres ; toute information sur la maladie est prise comme vraie, mieux on en rajoute.

RB : Comment se manifeste la coronapsychose ?

KK : La psychose, dans ce contexte, se manifeste par une hypervigilance polarisée sur la maladie, c'est-à-dire que tout ce qui concerne la maladie est recherché avec les moyens à sa disposition. Tout bobo est anormalement perçu et vite relié à la maladie. Dans le cas de COVID-19 on n’a plus de simples céphalées, un simple rhume. Même les rhumes chroniques perdent leur caractère chronique connu par l’intéressé. On peut aussi constater une anxiété permanente, exacerbée par n’importe quelle sensation inhabituelle. Le patient à l’impression que quelque chose va arriver et que c’est le coronavirus. Il peut même penser qu’il a la maladie et se constituer malade, voire se trouver confronté à la réalité de la mort, d’autant plus qu’on ne sait pas encore comment traiter cette maladie. A cela peuvent s'ajouter des troubles du sommeil qui peuvent être soit de l'hypersomnie ou l'insomnie d'endormissement.

Ces troubles mentaux ont une répercussion sur le corps et on va observer une accélération du rythme cardiaque, une augmentation de la fréquence respiratoire, des troubles digestifs de type diarrhée, des douleurs abdominales, des vomissements. Ces troubles exacerbent la peur et la personne se retrouve dans un circuit fermé de la peur.

RB : Comment alors venir en aide à une personne en proie à la coronapsychose ?

KK : Pour calmer la peur, il faut rompre le circuit, enrayer le stress. C’est là le rôle du psychiatre, du psychologue. Il faut calmer la personne paniquée, la persuader, la rassurer. Il faut qu’elle revienne au contact de la réalité, qu’elle reprenne son élan de départ, l’élan pour se défendre. Cela peut se faire par un contact rassurant, on peut déjà avoir de bons résultats. Tout le monde peut le faire (les responsables religieux, coutumiers, administratifs, tout agent de santé, psychiatre, psychologue, etc.) ; les instructions données par le ministère de la Santé en font largement partie. Ou encore par un entretien structuré, pour les cas graves et pratiqué par les personnes initiées en la matière (psychiatres, psychologues, agents de santé mentale). Ces entretiens s’adressent particulièrement à ceux qui ont perdu le contact avec la réalité, ceux qui ont besoin d’un soutien psychologique pour reprendre vie, ceux qui sont très sensibles. Ils s’adressent également aux agents de santé qui sont sur le terrain des opérations, aux décideurs qui ont en charge la gestion quotidienne de la crise, à ceux qui ont été choqués par la perte de proches des suites du Covid-19 ou à ceux-là mêmes qui en sont atteints. Ces derniers ont développé certainement un état de stress post-traumatique qu’il faut prendre en charge.

Ces entretiens s’adressent enfin aux personnes présentant des troubles liés aux mesures prises pour limiter la propagation de la maladie. Le confinement peut développer chez certaines personnes des troubles tels la dépression, la clinophilie, l’inversion du sommeil, les addictions aux substances psychoactives et aux écrans, les violences conjugales et familiales, etc. Le lavage répété  des mains  peut développer chez certaines personnes  essentiellement des troubles obsessionnels compulsifs et des troubles phobiques.

Dans le cas du Covid-19, la prise en charge elle-même peut être source d’angoisse pour le malade et le thérapeute par sa technique ; l’entretien face à face, même dans le respect des consignes sur les mesures barrières, est une grande source d’angoisse. Dans cette situation, il faut libérer son génie créateur. C’est pourquoi nous proposons des sensibilisations individuelles ou collectives en ligne (par WhatsApp, Skype…) pour ceux qui, malgré tout ce qui est fait par le ministère de la Santé et les médias, n’arrivent pas à gérer leur angoisse.

Propos recueillis par Armelle Ouédraogo

                                                                             

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Très logique mon Pr que Dieu vous bénisse

Boua Cohen
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