samedi 23 novembre 2024

2e congrès ordinaire de l’UPC : « Nous ne pensons même pas un seul instant que le peuple burkinabè peut encore accorder sa confiance au MPP », Adama SOSSO, 2e vice-président de l’UPC

 

20180723 133602Du 20 au 22 juillet 2018, l’Union pour le progrès et le changement (UPC) a tenu son 2e congrès ordinaire à Ouagadougou. Une halte voulue par le parti afin de battre le rappel des troupes afin que le lion puisse véritablement rugir en 2020 lors des élections présidentielles. Pour ce faire les congressistes venus des quatre coins du Burkina Faso et d’une quinzaine de pays frères, où les militants du parti sont organisés en fédération, ont réfléchi  et discuté sur le thème « UPC: Stratégies pour une victoire éclatante en 2020, synonyme de paix, d’unité nationale, de sécurité et de prospérité ». Quels sont les enjeux et la portée de cette rencontre grandeur nature organisée par l’UPC ? Dans l’interview accordée à Radars info Burkina, l’honorable député Adama SOSSO, 2e vice-président de l’UPC et par ailleurs président du comité d’organisation de ce 2e congrès ordinaire éclaire la lanterne des lecteurs.

 

Radars Info Burkina : Du 20 au 22 juillet dernier s’est tenu à Ouagadougou, le 2e congrès ordinaire de l’Union pour le progrès et le changement (UPC). Alors quels ont été les temps forts de cette instance suprême du parti ?

Adama SOSSO : Il faut noter que du fait que ce congrès soit ordinaire, il avait déjà son ordre du jour bien précis. Il s’agissait donc au cours de  ce congrès de faire le bilan du bureau sortant qui était en fin de mandat, après quatre années d’exercice. Il fallait aussi revoir les textes fondamentaux qui régissent la vie du parti (règlement intérieur) et mettre en place le nouvel organe dirigeant. Mais comme tout congrès, il a eu un thème principal autour duquel les participants ont réfléchi et échangé : « UPC: Stratégies pour une victoire éclatante en 2020, synonyme de paix, d’unité nationale, de sécurité et de prospérité ». Mais, une chose est de gagner des élections, une autre est de savoir gérer le pouvoir après la victoire. C’est pourquoi, nous avons voulu réfléchir sur notre boussole et notre ligne de conduite si nous accédons au pouvoir en 2020. Et pour ce faire, nous nous sommes dit qu’il faut qu’on s’attaque à la question de la paix, car rien de durable ne peut se faire, sans la paix ; et pour qu’il y ait la paix dans un pays, il faut forcement qu’il y ait l’union, car si les gens ne sont pas unis, il ne peut avoir la paix. Egalement, il faut qu’il y ait la sécurité qui est elle aussi, va de paire avec la paix. Toute chose qui conduit inéluctable au développement, car la paix, l’union et la sécurité sont les trois principaux préalables pour un développement harmonieux du pays.

RIB : Vous l’avez dit, votre parti se fonde sur la paix, l’union et la sécurité pour développer le pays. Pourtant, ce 2e congrès de l’UPC s’est tenu dans un contexte où la maison mère est divisée, avec une scission dans le groupe parlementaire UPC. Est-ce que ce congrès s’est véritablement penché sur la question des frondeurs ?

AS : La question des frondeurs n’était pas pour l’UPC une question centrale qui méritait que le congrès s’y penche, car elle avait déjà été résolue lors des réunions du Bureau politique national. Cette crise, nous l’avons trouvé normale, car pour toute organisation, il y a des moments de gloire et ceux de difficultés, des entrées comme des sorties. Ce fut un choc pour nous à un moment donné, mais Dieu aidant, nous avons pu aujourd’hui, mettre cette crise derrière nous, d’autant plus que l’UPC, car tous ceux qui ont quitté le groupe parlementaire UPC se réclament toujours du parti. Pour nous, il y a qu’une et une seule UPC. Ils ont décidé de créer un groupe parlementaire qui n’est pas autorisé par l’instance dirigeante de notre parti. C’est cela le point de discorde entre le parti et eux. Nous disons que si demain, ils décident volontairement de dissoudre ce groupe qu’ils ont créé, ils peuvent revenir à la maison. Mais s’ils décident de continuer ainsi jusqu’à la fin de leur mandat à l’Assemblée nationale, ils peuvent aussi décider de créer un autre parti et en ce moment les choses seront claires pour le parti. Jusqu’à preuve du contraire, nous disons que ce sont des militants de l’UPC. Ceux qui ont posé des actes contraires aux textes du parti, ont été sanctionnés, mais pour l’essentiel, nous n’avons pas eu au cours de ce congrès à traiter de façon particulière la question de cette fronde. Pour nous, cette question avait été discutée et vidée lors des réunions du Bureau politique nationale. Nous avons donc renouvelé nos structures sur l’ensemble du territoire national, et pas seulement dans les zones où il y avait des frondeurs.37674798 1660885797356523 3418666664785346560 n

RIB : Vous soutenez que l’UPC est une et indivisible, mais on voit que les frondeurs n’ont pas pris à ce congrès aux grands enjeux pour le parti.  Une des conditions de leur participation était le changement de la présidence du parti, mais tel ne fut pas le cas, car le président Zéphirin DIABRE a été reconduit à la tête du parti. Alors, d’ores et déjà, peut-on dire que le divorce est définitivement consommé entre eux et le parti ?

AS : Nous, nous pensons que tout doit être fait de façon démocratique. Quand on est animé d’une bonne volonté, on peut avoir son point de vue. Daouda SIMBORO est libre de vouloir un changement à la tête du parti. Cela est normal et ne nous cause aucun problème. Mais l’UPC, ce n’est pas l’avis de Daouda SIMBORO, ni celui  d’Adama SOSSO. C’est l’avis d’un ensemble de militants. Nous étions plus de 5 000 congressistes y compris ceux de la diaspora. Ce n’est pas possible que la voix d’une seule personne prime sur les 5 000 autres. C’est l’ensemble qui décide du ton à donner au parti. A partir du fait que la majorité ait décidé à nouveau de porter Zéphirin DIABRE à la tête du parti, les autres doivent s’y plier. S’il est démocrate, il doit prendre acte de la volonté de la majorité.

RIB : Au regard de cette condition posée par le chef des frondeurs, Daouda SIMBORO pour revenir à la maison mère, peut-on dire que la crise qui prévaut actuellement est plus un problème de personne ?

AS : Vous avez vu que depuis le début de la crise, ils ont donné tellement de raisons pour justifier leur départ au sein du groupe parlementaire UPC, qu’aujourd’hui, personne ne peut dire exactement quelle est la raison de leur départ. Au début, ce n’était pas Zéphirin leur problème, mais le choix du parti de rester dans l’opposition, au lieu de rejoindre la majorité. Et ce choix a été opéré par le Bureau politique nationale, lors d’une réunion extraordinaire, en l’absence  de Zéphirin DIABRE, car celui-ci était hors du pays. Comme cet argument n’a pas beaucoup prospéré, ils ont par la suite dénoncé la gouvernance du parti. Or dans le parti, ceux qui tenaient les rennes, c’était Zéphirin DIABRE, président du parti, le colonel Charles LONA (frondeur), vice-président à l’Assemblée nationale au nom de l’UPC et Daouda SIMBORO (frondeur), président du groupe parlementaire. Et s’il y a un problème de gouvernance, cela est forcément imputable à ces trois instances. Alors comment peut-on comprendre que vous qui êtes à la tête, vous dénonciez un problème de gouvernance ? A ce niveau aussi, les frondeurs ont vu que cet argument ne tenait pas la route. Donc ce qu’ils ont comme arguments actuellement c’est de démonter Zéphirin. Mais il faut savoir que dans notre parti, aucune décision n’est imposée, tout se fait dans le consensus. Zéphirin est un homme qui n’aime pas du tout l’autorité. Maintenant c’est aux frondeurs de décider de leur avenir. Si malgré la décision du congrès de maintenir Zéphirin à la tête du parti, ils ne sont pas d’accord, ils doivent faire preuve d’honnêteté intellectuelle et partir comme il se le doit. Vous savez, depuis qu’ils ont créé leur groupe parlementaire, ils votent tout le temps dans le sens contraire des autres députés UPC. Alors, quand on ne sent plus dans les idéaux d’un parti, le mieux à faire, c’est de partir tout simplement.

RIB : Au cours de ce congrès, le nombre des membres du Bureau politique national a triplé, passant d’une centaine à plus de trois cents personnes. Alors qu’est ce qui a valu ce renforcement des cellules à la base ?20180723 133619

AS : Cela s’explique par la croissance du parti. A la création du parti, le secrétariat de l’UPC comptait onze membres, avec huit députés à l’Assemblée nationale. Aux élections de 2015, l’UPC a eu trente-trois députés. Ce qui veut dire que le poids de l’UPC avait augmenté sur l’échiquier politique national. Il faut donc que les organes tiennent compte de cette évolution. Aujourd’hui, l’UPC couvre toutes les 45 provinces sans difficulté, donc, il s’avère important d’élargir le bureau politique afin de faire face aux défis.

RIB : L’UPC prône le vrai changement et Zéphirin DIABRE l’a encore réaffirmé au cours de ce congrès. Alors quel doit être ce changement ? Est-ce à dire que l’UPC estime qu’après trois ans de gestion, le pouvoir KABORE n’a toujours pas coupé le cordon ombilical avec les vieux démons ?

AS : Nous l’avons dit, mais aujourd’hui, ce n’est pas l’UPC seule qui fait le constat. Tout le monde le dit. Même au sein du MPP, le président Salifou DIALLO, paix à son âme avait dit que la gestion actuelle du MPP, n’est pas celle qui était attendue par le peuple. Cela veut dire qu’il était conscient qu’il y a des problèmes de gestion. Egalement, à Bobo-Dioulasso, un des membres influents du MPP avait laissé voir son pessimisme quant à ce que ce navire atteigne les échéances électorales de 2020. Les enquêtes du CGD et les rapports du présimètre montrent que la majorité des Burkinabè pense que la lutte qui avait vu le départ de Blaise COMPAORE du pouvoir n’a servi à rien. Pendant que nous en son temps, nous travaillions pour que le pays soit bien gouverné, le MPP avait à la limite une autre stratégie de conquête du pouvoir. Rien ne va actuellement : Sur le plan social, le Burkina n’a jamais enregistré autant de grèves que ce que nous connaissons avec ce pouvoir. Aujourd’hui, vous ne pouvez pas rentrer au marché « roodwoko » et ne pas entendre un commerçant se plaindre. Le pouvoir actuellement peine à résoudre les problèmes des Burkinabè. Peut-être que le chef de l’Etat a la volonté, mais il est mal entouré. Il ne met pas les personnes qu’il faut à la place qu’il faut.

37577153 1658163460962090 1799737794063499264 nRIB : Au regard de ce que vous venez de dire, est ce que aujourd’hui, l’UPC regrette l’insurrection populaire d’octobre 2014 ?

AS : Non ! Nous ne regrettons pas l’insurrection populaire, parce que nous avons la conviction qu’il n’est pas tard pour corriger. C’est pour cela que nous avons dit qu’en 2020, en accédant au pouvoir, nous allons corriger. Nous ne pensons même pas un seul instant que le peuple burkinabè peut encore accorder sa confiance au MPP. C’est vrai que ce n’est pas nous qui votons à la place du peuple, mais nous ne pensons pas que le peuple va encore confier son destin au MPP après avoir vu et vécu tout ce qui se passe, car les gens sont assez conscients dans ce pays et ils ne vont plus répéter cette erreur. Nous ne regrettons pas l’insurrection, car notre objectif ultime était de travailler à ce que dans ce pays, la démocratie puisse régner et que la seule façon de prendre le pouvoir soit de manière démocratique et que la constitution soit respectée ; et cet objectif, nous l’avons atteint, car je ne pense pas qu’aujourd’hui, il y ait un acteur politique au Burkina Faso qui ait envie de s’éterniser au pouvoir.

RIB : Concrètement donc, quel visage doit avoir le vrai changement que l’UPC prône ?

AS : Pour nous, le premier visage du vrai changement, c’est la bonne gouvernance qui implique une gouvernance vertueuse. Il faut que dans tous les secteurs, on mette des gens qui peuvent gérer et apporter leur pierre à la construction du pays, sans une quelconque étiquette politique comme critère premier du choix des hommes à responsabiliser. Quand vous mettez quelqu’un qui a déjà un passif très lourd en termes de gestion, il ne peut être ni efficace, ni objectif et indépendant. Il faut donc aussi des hommes à qui on ne peut rien reprocher en termes de gestion. Aussi, faut-il créer des conditions d’un vivre ensemble apaisé : il ne faut pas que les gens se regardent en ennemis. Etre adversaire politique, ce n’est pas être des ennemis. En outre, il faut véritablement que la justice puisse se faire, et cette justice ne doit pas être une justice des vainqueurs. Elle doit être véritablement indépendante et impartiale. Chacun doit également se dire que le Burkina Faso, n’est la propriété de personne : il appartient à tout le monde. C’est pourquoi, il faut une refonte, que l’on retourne à nos valeurs d’antan. Et le socle de tout cela, c’est offrir une bonne éducation aux enfants, tant dans la cellule familiale que dans la société.

RIB : Pour arriver à ce vrai changement, l’UPC est-elle prête aujourd’hui à faire une alliance avec le CDP pour faire tomber le troisième baobab politique burkinabè lors des échéances électorales de 2020?

AS : Lors de ce congrès, les participants ont demandé à la direction du parti d’entreprendre des démarches auprès de toutes les formations politiques et de la société civile pour établir des alliances et des accords de partenariats en vue de pouvoir résoudre ce problème de gestion de pouvoir à l’appareil étatique qui se pose actuellement. Cela dit, nous n’excluons personne. Les gens font une nuance : demander à quelqu’un de venir vous aider, ne signifie pas dire à la personne de venir porter ta charge. Nous disons donc que nous avons nos valeurs et notre programme et s’il y a des gens qui veulent bien nous aider à prendre le pouvoir, nous ne voyons pas d’inconvénients. Ainsi, si le CDP décide de nous aider à accéder au pouvoir, nous allons poser nos conditions et s’il est d’accord, nous ne voyons pas pourquoi nous n’allions pas travailler ensemble, d’autant plus que ce sont des Burkinabè qui forment ce parti. Ce n’est pas le nom du parti que les gens doivent voir. Des gens ont quitté le CDP pour créer le MPP. Le nom a changé, sans que véritablement les comportements ne changent. Et comme l’a dit le président du CDP, Eddie KOMBOÏGO à notre congrès, c’est la mauvaise graine du CDP qui est partie créer le MPP. Il faut donc qu’on arrête de faire de la politique politicienne, car cela ne fait pas avancer le pays.

Propos recueillis par Candys Solange PILABRE/ YARO

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