Vivre avec le lupus (il s’agit d’un dérèglement du système de défense de l’organisme) n’est pas chose aisée au Burkina Faso, au regard des conditions climatiques, environnementales et de l’indisponibilité des médicaments. Madame X (Ndlr : une femme âgée de 49 ans et mère de deux enfants ayant requis l’anonymat), qui souffre du lupus depuis l’âge de 18 ans, nous raconte dans cette interview son quotidien et comment cette maladie a transformé sa vie.
Radars Info Burkina (RB) : Quel est votre quotidien en tant que personne vivant avec le lupus ?
Madame X (MX) : Déjà la nuit, je n’arrive pas à bien dormir à cause des douleurs articulaires. Les médecins m’ont donc prescrit un antidépresseur pour me permettre de dormir. Qu’en je n’en prends pas, je passe une nuit blanche et je me réveille le matin tout épuisée. Je me réveille souvent avec des difficultés pour marcher à cause des douleurs articulaires. Tous les jours au réveil je me demande si je me sentirai mieux. Juste après le petit déjeuner, je prends les médicaments qu’on m’a prescrits en rhumatologie et en cardiologie, soit environ 9 comprimés par jour. Après cela, arrivée au service j’ai des moments de somnolence due aux cachets que j’ai pris, si bien que je « fonctionne au ralenti ». Quelques fois j’ai eu des crises malgré la prise des médicaments. Il y a eu des fois où on a dû m’évacuer d’urgence en clinique. A cause du lupus, j’ai dû arrêter de travailler pour me soigner. Je travaillais dans le privé et vous n’ignorez pas que dans ce secteur, les absences répétées ne sont en général pas tolérées. C’est dire à quel point cette maladie affecte ma vie.
RB : Vous prenez environ 9 comprimés par jour. Ces médicaments ne sont-ils pas coûteux, vu que ce sont des spécialités ?
MX : Ils sont vraiment coûteux et si tu n’as pas de revenu, c’est vraiment difficile. Moi je rends grâce à Dieu d’avoir une famille compréhensible et qui me soutient. Mes médicaments me coûtent environ soixante-dix mille francs CFA par mois. Certains de ces produits peuvent faire le mois mais d’autres non. Il faut toujours prévoir pour éviter d’interrompre la prise. C’est pourquoi quand je le peux, j’achète à l’avance mes produits pour éviter les ruptures et je vis ainsi depuis plus de cinq ans.
RB : Quels ont été les premiers signes du lupus chez vous ?
Au début, lorsque j’étais exposé au soleil j’avais des palpitations, des malaises et je perdais connaissance souvent. La fièvre ne me quittait jamais aussi et c’était comme si j’avais régulièrement le palu. On m’administrait des traitements antipaludéens mais cela ne me soulageait guère. J’avais constamment des douleurs articulaires, de la fièvre et ma peau se « calcinait » à cause de la forte fièvre. J’avais des taches en forme de papillons sur le visage. J’ai souffert ainsi pendant plus de vingt avant que le diagnostic révèle qu’il s’agissait du lupus.
RB : C’est lorsque votre santé s’est vraiment dégradée que le diagnostic a été posé alors ?
MX : Oui c’est lorsque j’ai eu les crises que le diagnostic a été fait. A ce moment-là, j’avais des plaies partout, même sur la tête. Tout mon corps est resté paralysé deux fois de suite pendant trois mois. J’ai été plusieurs fois hospitalisée et j’ai même fait un infarctus.
RB : Le lupus a-t-il affecté votre vie en tant que femme au foyer et en tant que mère ?
MX : Le lupus a altéré ma vie familiale, surtout ma vie de couple. Je n’ai plus une vie régulière avec mon mari mais je rends grâce à Dieu parce qu’il me comprend et me soutient. La maladie crée un trouble de la sensibilité et des sautes d’humeurs. Souvent je n’ai envie de parler à personne, ni même de manger. Par moments, j’ai du mal à supporter mes enfants de même que mon entourage.
RB : Comment se sont passées vos périodes de grossesse ?
MX : Elles ont été très difficiles. Chaque fois, j’étais confrontée à des risques d’avortement parce que mon organisme rejetait le fœtus. Il a fallu m’interner à l’hôpital et m’interdire certaines activités. C’était vraiment pénible.
RB : Votre mot de la fin ?
MX : J’invite tous ceux qui, comme moi, souffrent de cette pathologie à s’en remettre à Dieu car il est la solution. J’invite également les proches des personnes atteintes du lupus à toujours les soutenir.
Elza Nongana (Stagiaire)