Circoncire son enfant est devenu un rituel incontournable au Burkina Faso. Si certains parents ont recours à la médecine moderne pour la circoncision de leur enfant, d’autres par contre, préfèrent faire appel à l’expertise des « wanzam », une communauté étrangère vivant au Burkina, reconnue pour sa dextérité dans le maniement du couteau et de la lame.
La circoncision désigne, dans sa forme la plus répandue, l’ablation totale ou partielle du prépuce, en supprimant ainsi sa fonction et laissant le gland du pénis en permanence à découvert. Au Burkina Faso, elle est généralement pratiquée pour des raisons davantage culturelles que religieuses, invoquant des motifs d’hygiène, de réduction des risques d’infection, mais aussi, par tradition et par masculinité.
Comme toute opération, le risque d’infections et de saignements n’est pas exclu lors d’une circoncision. Mais selon les spécialistes de la santé humaine, ce risque est quasi nul en milieu hospitalier, car l’opération y est faite dans des conditions de propreté adéquate. S’il est donc conseillé de la faire dans un cadre hospitalier, afin de réduire au maximum les risques opératoires, il faut noter qu’au Burkina Faso comme dans beaucoup d’autres pays africains, les gens préfèrent la faire de façon traditionnelle. En effet, en dehors du cadre culturel, qui exige un certains nombre de rituels avant et après la circoncision, bon nombre de Burkinabè font appel à l’expertise des « wanzam » au détriment de celle des chirurgiens pour la circoncision de leurs enfants.
Les « wanzam » ou coiffeurs traditionnels, sont spécialisés dans la coiffure traditionnelle et pratiquent surtout la petite chirurgie comme la circoncision. De l’ethnie Haoussa, les « wanzam » viennent essentiellement du Niger et du Nigéria. Encore appelés hommes au couteau, leur dextérité est légendaire, car il n’appartient pas à qui veut de pouvoir manier le couteau ou la lame. Leur savoir-faire se transmet de père en fils. Egalement, une telle adresse ne s’acquiert pas du jour au lendemain. Pour apprendre et maîtriser ce métier, Aboubacar, « wanzam », exerçant depuis plus d’une quinzaine d’années au Burkina Faso, a appris le métier de la circoncision en observant méthodiquement son père, pratiquer cette opération sur des enfants. « J’ai commencé à apprendre le métier depuis tout petit. J’étais en quelque sorte l’assistant de mon père et je suivais toutes ses opérations avec minutie et ce, pendant des années. C’est ainsi que j’ai appris et cerner tous les secrets du métier », a-t-il indiqué.
Comme dans leurs pays d’origine, les « wanzam » au Burkina Faso ont su aussi se faire un nom. En effet, ils sont très appréciés par la population pour la qualité de leur travail. « J’ai deux garçons et pour leur circoncision, j’ai fait appel à un wanzam, car avec lui, je suis sûr que la plaie va vite guérir et le résultat sera agréable à regarder », a confié M. DERME, enseignant. Même son de cloche pour Alizèta NANA, mère d’un garçon qui a elle aussi loué les services d’un « wanzam » pour la circoncision de son bébé âgé à peine de deux mois. « Les wanzam ne sont pas chers. En plus de cela, il n’ya pas d’ordonnance à payer comme à l’hôpital et la plaie guérit vite. Il suffit de suivre les instructions qu’ils donnent », a-t-elle déclaré.
Si, cette pratique semble connue et appréciée par certains Burkinabè, il y a aussi ses détracteurs. En effet, Mme OUEDRAOGO, ménagère ne fait pas du tout confiance aux « wanzam », car pour elle, ils n’ont aucune connaissance clinique en la matière. « Je ne fais pas confiance aux wanzam. Pour moi, aller vers eux pour circoncire son enfant, c’est comme jouer à la loterie. On ne peut jamais être sûr qu’ils réussiront. Pourtant avec les médecins, il n’y a pas de crainte, car ils ont fait de longues études et savent tous les risques et quels conseils ils peuvent donner afin que l’enfant ne souffre pas trop de cette opération », a-t-elle déclaré. « C’est ceux qui ne sont pas allés loin à l’école qui partent confier la circoncision de leur enfant aux wanzam. Comme quoi, l’ignorance est la mère des maux » a-t-elle conclu. Une théorie battue en brèche par M. DERME, pour qui, la médecine a montré ses limites en la matière. « Un chirurgien a fait la circoncision de mon neveux et l’a complètement raté. L’enfant était obligé de subir à nouveau cette vive douleur », a-t-il déclaré. Pour lui, la médecine moderne a beaucoup d’exigences en la matière, pourtant les résultats pour la plupart des cas ne sont pas satisfaisants.
Quoi qu’il en soit, Aboubacar wanzam, croit à son expertise. Il dit n’avoir jamais raté depuis qu’il pratique ce métier. Bien au contraire, ses clients le recommandent toujours à d’autres parents pour la circoncision de leur enfant, surtout qu’ils n’ont pas de prix fixe et offrent les médicaments postopératoires. « Je n’ai pas de tarifs fixes. Tout dépend de la bourse des parents. Il y en a qui payent cinq mille (5000) francs CFA, d’autres dix mille (10 000) francs CFA. Nous savons que les gens n’ont pas l’argent donc nous sommes très flexibles », a-t-il expliqué. « Nous avons un produit noir, dont nous seuls avons le secret de sa fabrication, que nous mettons sur la plaie, et remettons aux parents pour application tous les trois (3) jours. Cela permet à la plaie de guérir rapidement si toutes les conditions d’hygiène sont réunies », a t-il ajouté.
Aboubacar wanzam fait venir son produit noir depuis le village. Selon lui, si toutes les conditions d’hygiène son réunies, le pénis circoncis, a au maximum sept (7) jours pour guérir. Son instrument de travail est la lame et il revient à chaque parent de payer la lame pour la circoncision de son enfant.
Mais il faut noter que la circoncision, qu’elle soit traditionnelle ou moderne réduirait selon une étude africaine, les risques de contracter le SIDA. En effet, les cellules du prépuce seraient sensibles au VIH. Cette étude a été menée sur un large échantillon de population au Kenya, en Ouganda et en Afrique du Sud. Les résultats, concluants, ont d'ailleurs mené l'Organisation mondiale de la santé (OMS) à inclure la circoncision des hommes adultes dans un son programme de prévention de propagation du SIDA en Afrique subsaharienne. Mais attention, la circoncision n'est en aucun cas une protection valable contre le SIDA. Chez le nourrisson, la circoncision diminuerait d'environ douze (12) fois les risques d'infections urinaires. Or, 0,7 % des bébés sont hospitalisés dans leur première année à cause d'une infection urinaire. Aussi, l'épaississement du revêtement cutané du gland à la suite de la circoncision réduirait les problèmes d'éjaculation précoce, même si ce trouble résulte davantage de causes psychologiques que physiologiques. En outre, la circoncision diminue légèrement le risque de cancer du pénis, une forme de cancer toutefois extrêmement rare.
Candys Solange PILABRE/ YARO