« La sécurité est l’affaire de tous ; où qu’il se trouve, chacun peut contribuer à la sécurité par le renseignement. » C’est ce qui ressort du rapport d’étude sur les relations entre civils et Forces de défense et de sécurité (FDS). Au Burkina Faso, dans le contexte sécuritaire actuel marqué par les multiples attaques terroristes, la collaboration entre populations et FDS est plus que jamais nécessaire si on veut endiguer ce phénomène. Cependant, c’est un truisme d’affirmer qu’il y a une crise de confiance entre les deux parties susmentionnées, ce qui crée un climat de méfiance conduisant souvent à des conflits ouverts entre ces deux dernières.
« Tout ce que je sais des missions des Forces de défense et de sécurité, c’est ‘’Attrape-le ! Attache-le ! Frappe-le ! Et tue-le !’’ » Ces propos d’un habitant de la capitale burkinabè rapportés par le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD) dans une de ses études montrent à quel point les populations ne perçoivent pas le rôle protecteur de nos agents de sécurité. Selon ladite étude, dans de nombreux endroits, les populations civiles regardent les Forces de sécurité avec suspicion, comme des prédateurs plutôt que des protecteurs. Dans le même temps, de nombreux militaires et policiers se méfient de la société civile, remettant en question ses intentions. Pour certains Burkinabè, et toujours selon le CGD, la crise dans la collaboration s’explique aussi par le manque de réactivité des Forces de défense et de sécurité aux sollicitations (alertes) tandis que d’aucuns estiment que ce sont les FDS, elles-mêmes, qui donnent l’identité de leurs informateurs aux bandits. Sur ces aspects, des FDS pointent du doigt le manque de moyens roulants et les fausses alertes. Selon ces dernières, des individus malintentionnés appellent à des numéros verts, provoquent des sorties sans objet et dispersant ainsi le peu de moyens mis à la disposition des FDS. En outre, ils estiment que certains informateurs révèlent fièrement dans des débits de boissons qu’ils ne sont pas n’importe qui parce qu’ils travaillent avec des FDS. Or, à en croire le CGD, être informateur ne veut pas dire bénéficier de la protection des FDS dans ses frasques.
Par ailleurs, d’aucuns estiment que le faible niveau de communication est aussi un élément explicatif du hiatus entre populations civiles et corps habillés. Considérées comme la « grande muette », les Forces de défense et de sécurité sont, à tort ou à raison, réduites au silence sur certaines questions sur lesquelles les populations souhaitent pourtant entendre leurs réactions. Une certaine opinion estime que les Forces de défense et de sécurité font dans l’exagération en matière de devoir de réserve, ce qui laisse le champ libre à tous les commentaires et procès d’intention.
Nous estimons qu’avec autant de victimes dans les rangs de nos vaillants combattants, chacun à son niveau de responsabilité devrait faire sienne cette guerre asymétrique qui nous est imposée par cet ennemi commun. C’est d’ailleurs le vœu qu’a formulé le chef d’état-major général des armées fraîchement installé, le général de brigade Moïse Miningou, dans son allocution. De plus, nous pensons que la création de cadres formels de communication entre les populations et les FDS dans les différents villes et villages, comme l’a indiqué l’étude, pourrait être une des solutions dans cette lutte contre le terrorisme. Pour terminer, il importe de faire remarquer que les agissements de certains éléments des Forces de défense et de sécurité, qui abusent de leur pouvoir en infligeant des sévices à des innocents, contribuent beaucoup à accentuer ce climat de méfiance entre FDS et populations.
Saâhar-Iyaon Christian Somé Békuoné