mercredi 13 novembre 2024

Interrogatoire du lieutenant-colonel BAMBA dans le cadre du procès de putsch de septembre 2015 : BAMBA estime que le malheur de sa vie, c’est d’avoir fait la connaissance du capitaine Abdoulaye DAO

07Journée marathon au tribunal militaire de Ouagadougou en son audience de ce mercredi 26 septembre 2018. Après le capitaine Abdoulaye DAO qui, pour ce mercredi était à son cinquième jour d’audience et le colonel Omer BATIONO qui a passé moins de deux heures à la barre du juge Seydou OUEDRAOGO, c’était au tour du lieutenant-colonel Mamadou BAMBA de vider son sac dans le cadre du procès du putsch de septembre 2015. Contrairement à ses prédécesseurs, le médecin-colonel a reconnu sa part de responsabilité, car ayant été celui-là qui a lu la déclaration de baptême de feu du Conseil national de la démocratie (CND), organe des putschistes, et les autres communiqués faisant état de la consommation du coup d’Etat. Toutefois, il dit l’avoir fait à son corps défendant, car après avoir pesé le pour et le contre, il était dans une situation de faiblesse absolue et avait donc peur des représailles que pouvait entraîner son refus d’autant plus qu’il ignorait les véritables auteurs du coup d’Etat.

 

C009e mercredi 26 septembre 2018, le lieutenant-colonel, Mamadou BAMBA, était à la barre du juge Seydou OUEDRAOGO pour dire ce qu’il savait des évènements du 16 septembre 2015 et jours suivants. Il est notamment accusé de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, de meurtre et de coups et blessures volontaires. Contrairement à d’autres officiers militaires qui l’ont devancé, cet officier de l’armée burkinabè a reconnu sa part de faits, d’autant plus qu’il dit avoir été utilisé pour lire les déclarations et communiqués des putschistes à la télévision nationale qui annonçaient la consommation du coup d’Etat avec le général Gilbert DIENDERE comme président du Conseil national de la démocratie (CND). Toutefois, il dit n’avoir pas eu en ce moment-là dans son rétroviseur, les conséquences que pouvait engendrer ce coup de force contre les autorités de la Transition. « Je reconnais ma part des faits, mais je ne pouvais pas prévoir les conséquences », a-t-il déclaré au tribunal. 

Selon son récit, le 16 septembre dans l’après-midi, il était avec le colonel-major TAPSOBA, qui après avoir reçu un appel, l’a informé qu’il y avait des mouvements au palais présidentiel et au camp Naba Koom II. C’est par les informations d’une de ses amies qu’il aurait su que le Conseil des ministres était pris en otage, mais pour lui, cela était un autre épisode des crises que connaissait l’ancien régiment de sécurité présidentielle. Sans s’être plus inquiété de cette nouvelle, il serait rentré chez lui dans le quartier Kouritenga et ce serait aux environs de 4h du matin que par appel téléphonique, le capitaine DAO, commandant du groupement d’intervention et de sécurité du RSP, au moment des faits, l’informait du coup d’Etat et de sa désignation pour lire la déclaration et des communiqués à la télévision nationale. Après avoir pesé le pour et le contre, il aurait accepté. C’est plus tard que le capitaine DAO, celui-là même qu’il considère aujourd’hui comme l’objet de tous ses malheurs l’aurait stipulé de se mettre en tenue terre du Burkina Faso pour accomplir sa mission. « Si tu ne pars pas ça peut créer des problèmes. Si tu pars aussi ça peut créer des problèmes », a déclaré le lieutenant-colonel afin de montrer la situation confuse, embarrassante et dangereuse dans laquelle il se trouvait.

accusés procUne fois à la télévision, il affirme que le capitaine DAO serait resté avec lui jusqu’à la fin de sa mission et aurait été celui-là même qui réceptionnait les communiqués et qui lui a donné sa propre insigne du drapeau national pour qu’il l’accroche à sa tenue avant le début de sa mission de lecture. Et il est formel, le communiqué qui a fait du général DIENDERE le président du CND a été signé par le colonel-major KERE.

Ces déclarations du lieutenant-colonel, si elles sont de nature à monter que lors des évènements du 16 septembre et jours suivants, il a été comme un cheveu tombé dans une soupe, elles serrent toutefois les écrous du capitaine DAO qui a affirmé à la barre n’avoir pas eu connaissance du contenu des communiqués avant sa lecture et surtout qui affirme que le médecin-colonel se serait proposé volontaire pour cette mission à la télévision nationale, au cours de l’une de leur conversation téléphonique. « J’ai écouté DAO le premier jour, j’ai pleuré et je me suis dit pourquoi j’ai connu cet homme. J’aurai souhaité ne pas le connaître », s’est indigné le lieutenant-colonel BAMBA en rappelant des déclarations du capitaine DAO.

A la question de savoir pourquoi le médecin-colonel aurait accepté de lire les déclarations tout en sachant que c’était un coup d’Etat, l’accusé répond : « Avant d’accepter, j’ai pesé le pour et le contre… les faiblesses étaient positifs, tous les autres éléments étaient négatifs… il y a des moments où il faut réfléchir pour savoir s’il faut mourir pour la patrie ou vivre pour la patrie. On connait la loi, mais parfois la situation commande des manœuvres. La constitution de ce pays ne pas me tuer… ».

salle audiSelon donc, ce médecin-colonel qui ne relevait nullement de l’ex RSP, son malheur a été d’avoir fait la connaissance du capitaine DAO. A l’en croire, ce capitaine qui fait parti des éléments essentiels de l’ex RSP a usé de ses faiblesses pour l’utiliser dans ce qu’il avait avec ses paires formaté comme coup contre les autorités de la Transition.

A cinquante-six ans, le lieutenant-colonel Mamadou BAMBA est médaillé d’honneur et chevalier de l’ordre national. Jamais condamné, il dit avoir lui-même appelé le commandant de la gendarmerie pour se mettre à la disposition de la justice au regard de ce qu’il avait posé comme acte qui renforçait le coup d’Etat. Par ailleurs, il dit être tout au long de ces tristes évènements resté en contact avec l’ancien ambassadeur des Etats-Unis au Burkina Faso, Tulinabo MUSHINGUI à qui il a beaucoup facilité les visites au premier ministre Yacouba Isac ZIDA. D’ailleurs, il dit avoir su que le chef du gouvernement de l’époque était détenu lorsque MUSHINGUI lui a demandé comment allait le premier ministre Yacouba Isac ZIDA.

Aussi, au moment des évènements, il dit s’être partagé la somme de dix millions de francs CFA avec le colonel Abdoul Karim, qui par la suite avait des suspicions sur lui, au regard des rumeurs qui disaient qu’il s’était rendu à la gendarmerie. Chacun d’eux s’est donc rempli les poches avec la somme de cinq millions de francs CFA qui n’est rien d’autre selon lui qu’un geste du général.

 

Candys Solange PILABRE/YARO

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