La compétition dans le cadre de la 36e édition de la coupe du Faso s’est achevée le dimanche 28 mai 2023 avec pour vainqueur l’Etoile filante de Ouagadougou (EFO). Salifou Guigma, journaliste sportif, livre sa lecture de l’organisation de cette compétition et de l’avenir même du football burkinabè dans cette interview.
Radars Burkina : Quelle appréciation faites-vous de l’organisation de la coupe du président du Faso 2023 ?
Salifou Guigma : Techniquement ça a été très bien organisé parce qu’il fallait tenir compte du championnat national qui n’était pas encore arrivé à son terme (les deux compétitions se jouaient en même temps). La ligue de football professionnel qui est en charge de l’organisation s’est débrouillée malgré l’absence des infrastructures pour pouvoir tenir cette coupe jusqu’à la finale.
Au plan technique également, ça a été du succès parce que les arbitres sont venus de la Côte d'Ivoire. Il y a une convention entre la FBF et la fédération ivoirienne de football qui permet qu’à chaque finale si la coupe est organisée en Côte d’Ivoire, ce sont les arbitres burkinabè qui y vont et vice versa. C’est dans le cadre d’un partenariat et cela a beaucoup aidé parce que les fans qui ont toujours des appréhensions par rapport aux arbitres locaux, cette fois-ci pour des techniciens venus d’ailleurs, c’était quand même difficile de dire que ce n’est pas bien arbitré dans la mesure où ils ne connaissent aucune équipe.
Pour la finale, on peut s’en féliciter. D’abord sur le plan mobilisation, le stade était plein à craquer du fait sûrement de la présence effective du président de la transition qui est aujourd’hui apprécié par la jeunesse.
Aussi, l’Etoile Filante de Ouagadougou qui est le club le plus populaire de la ville et qui au regard de la dynamique surtout qu’elle a enclenché même au niveau du championnat à savoir les dernières journées a pu faire le rappel des troupes, revenir à un niveau qui a forcé l’estime de ses fans.
De plus, les prolongations ont été évitées, le match s’est déroulé en 90 mn. Au niveau du déploiement du branding ça a été l’un des jours où on a remarqué le stade par un éclat remarquable. Les organisateurs ont réussi à relever le défi jusqu’à la remise du trophée. C’est l’une des finales les plus réussies à mon sens.
Enfin, l’aspect sécuritaire qui mettait quelques doutes dans la tête de certaine personne a été également pris à bras le corps car les forces de sécurité étaient là du matin jusqu’à la fermeture du stade.
Radars Burkina : A la lumière de cette compétition, quel est le niveau actuel du football burkinabè ?
Salifou Guigma : En tant qu’observateur, le niveau est en mon sens moyen. Il n’est pas très bon mais il y a des aspects dont on peut se satisfaire. Il y a eu beaucoup de buts marqués sur coup franc, sur balle arrêtée, en attaque placée. C’est quelque chose de formidable. Il y a également eu de très bonnes aptitudes au niveau des gardiens de but. C’est un compartiment de jeux où il y avait toujours des difficultés au niveau de notre football. Il y a des gardiens de but qui se révèlent, je pense que c’est bon. Également on a remarqué depuis un certain temps, des équipes font sortir de balles assez bonnes, on ne dégage plus à l’emporte-pièce, ça met en actif la direction technique intentionnelle avec les techniciens pour arriver à une situation où il faut lancer à partir de la défense, construire le niveau du milieu et essayer de finaliser : marquer les buts. C’est peut-être à ce niveau que ça pêche toujours. À mon avis le péché mignon de notre football, c’est la finition.
En somme si c’était à noter, je dirais qu’on est au-dessus de 5. On n’a peut-être pas forcément 7 mais on a la moyenne.
Radars Burkina : L’avenir du football burkinabè est-il prometteur ?
Salifou Guigma : Toujours avec l’œil d’observateur, l’avenir du football burkinabè promet parce que, que ça soit au niveau du championnat ou de la coupe du Faso, il y a des jeunes qui s’illustre. Ce qui veut dire qu’il faut de plus en plus faire confiance en ces jeunes. Il y a du surclassement dans notre championnat, double surclassement même par moment, parce que je pense que la moyenne tourne autour de 20-21-22 ans et c’est très bien. Ça veut dire qu’on va avoir des joueurs aguerris qui auront au moins trois saisons dans les zones avant de toquer aux portes des différentes sélections.
Il y aura quand même une certaine expérience hormis les U17 où la compétition de cette catégorie n’a pas encore véritablement pris donc on ne peut pas se prononcer à ce niveau. Sinon au niveau des autres catégories je pense que c’est très bien. On peut quand même oser dire que si les acteurs restent concentrer sur l’objectif, si les techniciens restent focus sur les performances, individuelles et collectives, on devrait avoir un bon niveau d’ici là, capable de titiller le reste de l’Afrique, excepté l’Afrique du Nord qui a quand même une bonne avancée par rapport aux autres. En regardant notre championnat, je pense que nous tirons vers 90 à 95% de techniciens locaux à travers les équipes, ce sont des Burkinabè qui entraînent ces équipes or dans le temps c’était des oiseaux rares. Les entraîneurs qu’on partait chercher en Côte d’Ivoire, au Ghana, aujourd’hui je regarde au niveau de l’échiquier ils sont pratiquement tous des Burkinabè et cela veut dire qu’il y a du travail qui est fait. Ça met en relief la direction technique qui travaille à améliorer le niveau des techniciens.
Radars Burkina : Que pensez-vous de la présence du président de la Fecafoot à la finale ?
Salifou Guigma : La présence de Samuel Eto’o, la star africaine qui a fait les beaux jours du Barça et qui est aujourd’hui le président de la fédération camerounaise de football (Fecafoot) a rehaussé le niveau et a sonné la mobilisation.
Aujourd’hui, le football est transversal et a aussi atteint le niveau de mondialisation un peu comme dans les autres domaines. Vous ne pouvez pas rester dans votre carcan et espérer vous développer. Il faut compter avec les autres. Samuel Eto’o est une figure emblématique du football africain. Sa présence ici donne à respecter notre équipe. Je pense qu’il faut rééditer cela. Il faut qu’on puisse, si l’occasion se présente aller chercher d’autres figures pourquoi pas les Drogba. Mais mon cri du cœur c’est peut-être faire appel aussi à certains internationaux qui sont là et qui ont fait la pluie et le beau temps de l’équipe nationale. C’était quand même beau de voir Pitroipa et Bakary Koné, Charles Kaboré, Ziko, au stade qui peuvent parrainer certains matchs. Ça permet à la génération de faire plus connaissance avec ces joueurs locaux internationaux qui n’officient plus mais qui ont marqué l’histoire du football burkinabè.
Propos recueillis par Flora Sanou