vendredi 22 novembre 2024

Protéines recombinantes : Une technologie  très attendue dans le domaine de la santé à l’issue des travaux de thèse de Kader Pingdwendé Bamogo

addsLe 21 septembre 2020, Kader Pingdwendé Aziz Bamogo a soutenu avec brio une thèse de doctorat sur la production de protéines recombinantes à l’Université Joseph Ki-Zerbo. Radars Info Burkina est allé à sa rencontre pour en savoir davantage sur cette technologie.

Plus jeune, Kader Pingdwendé Bamogo rêvait de faire de la biotechnologie. Ainsi, il a travaillé à construire sa carrière dans ce sens. Après un parcours en agronomie, il a d’abord fait un master en protection et amélioration des plantes. Ensuite, il est allé faire de la biologie moléculaire et du génie génétique. «J’ai mis ces deux sciences ensemble  pour mieux connaître les plantes et maîtriser  ce qu’on appelle l’ADN. Je suis plus particulièrement intéressé par le domaine médical parce que cette technologie peut être utilisée pour beaucoup de choses. Et moi je veux soigner les gens », a affirmé M. Bamogo.

Le scientifique explique que les protéines recombinantes sont des éléments qui revêtent un intérêt pour l’agriculture, l’industrie et la santé humaine et animale. « Une protéine  recombinante est une protéine produite à partir de la technologie de la transgénèse. La transgénèse est la science qui consiste à partir d’un ADN identifié sur un organisme  donné qu’on va appeler l’organisme A qui produit un produit qui nous intéresse », a-t-il ajouté.

Il a ajouté : « Par exemple dans le domaine de la santé,  les vaccins des éléments qu’on injecte dans l’organisme  pour entraîner nos défenses et ces éléments sont des protéines. Au lieu de vous exposer à un virus normal vivant, on peut prendre le bras ou le pied du virus qu’on produit de façon recombinante  ailleurs, qu’on purifie et qu’on vous injecte. L’organisme va reconnaître ce bras ou ce pied comme le virus et s’entraîner à ça et le jour où  il est exposé au vrai virus, il le détruit ».  

Les protéines recombinantes utilisées dans le cadre de ses travaux de thèse  sont produites de façon transitoire, c’est-à-dire qu’on fait en sorte de ne pas se retrouver avec une plante modifiée pérenne mais d’exploiter la plante pour produire la protéine   et par la suite on la retire. « Dans notre cas, comme on ne va pas implémenter ça dans la plante, on pourra l’utiliser comme insecticide qu’on va pulvériser dans les champs », a-t-il souligné.

recomb 2Dans le domaine industriel, les personnes diabétiques sont  obligées de prendre l’insuline. « L’insuline est une protéine produite par l’organisme humain. Mais à l’aide de la technique de production de protéine recombinante, on peut trouver cette insuline chez d’autres organismes et la purifier pour soigner les personnes souffrant de diabète », a fait savoir le Dr Bamogo.

Dans le cadre des travaux de sa thèse, il a réussi à produire trois protéines différentes. D’abord une protéine d’intérêt en laboratoire a été produite. « Dans les laboratoires d’analyses médicales, il y a des consommables qui sont utilisés et parmi ceux-ci il y a ce qu’on appelle des protéases. Ce sont des protéines qui sont en mesure de réaliser des clivages », a-t-il indiqué.

Après cette protéine, en collaboration avec ses partenaires français et brésiliens, une protéine d’intérêt agronomique a été produite afin de  trouver des moyens de lutte contre anthonomus grandis, un insecte qui s’attaque au coton au Brésil.

« Les chercheurs au Brésil ont tout fait pour trouver une résistance chez les plantes contre cet insecte mais sans succès. Il se trouvait que le haricot avait un gène qui codait beaucoup une résistance aux insectes. Ce gène, curieusement, n’était pas non plus   efficace contre anthonomus garndis. Nos partenaires brésiliens ont utilisé la séquence qui code cette protéine et ils ont réalisé d’autres modifications génétiques sur la séquence. Donc ils ont obtenu une grande banque de variants de ce gène. Leur espoir, c’était que parmi les éléments de cette banque certains variants présentent des propriétés nouvelles ou améliorées qui seraient efficaces contre l’insecte cible chez le coton. C’est cette banque que nos partenaires brésiliens nous ont transmise et ils nous ont demandé d’évaluer tous les variants. Dans ce cadre, nous avons opté de travailler en mettant en place un système efficace de production mais aussi économique. Nous sommes ainsi arrivés à produire deux variants de cette protéine qui lors des tests de fonctionnalité se sont révélés efficaces », a-t-il détaillé.  

recomb 3La troisième protéine produite est une protéine à propriété vaccinale contre les leishmanioses chez le chien et chez l’homme également (plaie inguérissable après piqûre d’une mouche). Cette leishmaniose est causée par un parasite. « La recherche avait démontré que certaines protéines de ce parasite permettaient de challenger notre immunité et de la préparer contre ce parasite. Nous avons cherché la séquence de cette protéine et  nous avons produit la protéine en système plante », a dit M. Bamogo.

En marge de ces trois protéines, une quatrième chose réalisée a été de développer un vecteur viral pour améliorer les rendements de production en système plantes. « Nous exploitons des virus de plantes. Nous avons opté de choisir un virus qui est endémique en Afrique et qui fait des ravages sur le riz et de modifier ce virus de sorte à en faire l’outil qui va nous permettre de contourner les mécanismes de défense de la plante et de produire  la protéine  en quantité abondante. Nous avons eu la chance d’avoir des résultats concluants avec ce virus modifié. Nous avons fait preuve de sa multiplication sur le riz. On l’a aussi utilisé pour améliorer les rendements de production de la protéine   vaccinale contre la leishmaniose », a soutenu Kader Bamogo.

Cette technologie permet d’adresser toutes sortes de maladies. « Les maladies sont causées chez l’homme ou chez l’animal ou même chez la plante par ce qu’on appelle les micro-organismes comme les champignons,  les parasites (le cas du paludisme), les virus (le cas du VIH), les bactéries. A travers cette technologie, ces micro-organismes, nous pouvons produire certaines de leurs parties et les présenter au système de défense qui va les reconnaître et se préparer pour le jour où le virus normal viendra et là il pourra le détruire », a-t-il précisé.

Pour lui, c’est une technologie qui est beaucoup attendue dans la lutte contre les cancers. «Le problème qui se pose avec les cancers, c’est l’efficacité des traitements. Cette technologie permet d’encapsuler un traitement et d’aller le délivrer spécifiquement sur la cellule cancéreuse », a relevé le Dr Bamogo.  

Quand il a fait ses premiers tests sur le virus modifié, il a été contacté par Medicago, une grande firme pharmaceutique canadienne qui produit également des médicaments en système plantes. « Leur souhait, c’était de prendre notre outil développé et d’enlever le gène que nous avons mis, pour y mettre leur gène et voir s’ils arrivent aussi à bien le produire. Ils ont fait leurs essais et le retour était qu’ils avaient un  gène un peu complexe et donc ça n’a pas forcément marché pour eux », a-t-il souligné.

Après les preuves de fonctionnalité de l’outil, il a pris attache avec les organismes habilités pour le breveter. Ce processus est toujours en cours. 

Tout en remerciant les institutions qui ont rendu possible le projet, Kader Bamogo souhaite que les autorités universitaires ou celles de la recherche scientifique et le gouvernement   aient un regard attentif sur cette technologie.

Aly Tinto

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