Dans certains quartiers populaires, les Hommes ne sont pas les seuls à emprunter la route. Et pour cause, en plus des piétons, des cyclistes, des motocyclistes et automobilistes, on y rencontre d’autres « usagers », surtout aux débuts et fins de journées. Il s’agit des animaux qui s’invitent souvent dans la circulation au grand dam des usagers ordinaires.
Quartier Hamdalaye, secteur 8 de Ouagadougou. Les usagers de la route vaquent à leur train-train quotidien. En matière de circulation, cela se traduit par des zigzags plus ou moins dangereux auxquels les uns et les autres s’adonnent, se jetant souvent des noms d’oiseaux, lorsque en pleine circulation, un usager commet par exemple l’erreur de ne pas indiquer-par la main-le coté vers lequel il compte tourner, et ce même s’il fait usage de ses clignotant.
C’est dans ce méli-mélo que les animaux s’invitent souvent, eux aussi, à la circulation, comme pour la rendre plus complexe. Les habitants pour leur part manquent de mots pour exprimer leur désarroi face à cette situation. « Vraiment les animaux dérangent les gens et cela augmente le nombre d’accidents dans la ville. J’ai déjà assisté à un grand nombre d’accidents dus à des animaux », s’insurge Ali SANKARA, pour qui, il faudrait prendre des mesures pour maintenir les animaux en brousse. Mahamadou Zongo est du même avis : « La place des animaux, c’est à Yagma, pas ici [à Ouagadougou].En plus des accidents, il n’est pas rare de que des animaux viennent manger la nourriture des gens. Lors des cérémonies par exemple causant des malentendus inutiles », argue-t-il.
Eleveur de son état, demeurant à Hamdalaye, Hamidou Diallo appelle à dépassionner le débat, tout en réfutant le terme de « divagation ». pour lui, c’est juste « présence des animaux dans la ville ». « Nous éleveurs, sommes conscients qu’avec l’urbanisation il y a des choses qui ne sont pas permises, mais nous les acceptons comme telles », explique-t-il.
Pour le vieux Diallo en effet, le phénomène a une explication que les uns et les autres ignorent. Sous la période révolutionnaire, il était prévu que l’on mette dix (10) terrains à la disposition des éleveurs, mais un seul leur a été octroyé. Une zone de cinquante(50) hectares a été mise à la disposition des éleveurs alors organisés en association pour éviter les problèmes avec les agriculteurs. Tous ces quartiers alentours [du stade du 04 Aout] n’étaient alors que des champs. Cet espace était censé être divisé en trois parties dont une partie réservée à l’installation des fermes, une autre devrait servir de cadre du parc à bétail et autres commodités. Mais la zone mise à leur disposition manque de toutes les commodités d’où les réticences de certains éleveurs à y adhérer. « Il s’y pose des difficultés liées à l’accès à l’eau puisqu’aucune retenue d’eau n’y a été construite, d’espace voire de sécurité », explique-t-il. . Il rappelle que les éleveurs avaient demandé une extension de la zone mais les événements du 1er Septembre 2009 n’ont pas facilité les choses. « C’est à Yagma que les sinistrés ont été relogés. Nous avions à l’époque écrit aux autorités compétentes, mais la compassion à la détresse des humains a été primordiale ». Quoi qu’il en soit, il reconnait que cette proximité avec les animaux est source de conflits...
« Avec l’urbanisation galopante, il n’y a aucune possibilité pour les éleveurs d’avoir un quelconque autre terrain dans la province du Kadiogo. Nous craignons même de perdre celui qu’on a », soupire-t-il. Lui qui fut par ailleurs président du développement socio-économique du secteur, observe que les éleveurs qui ont adhéré à l’association (qui compte cent-trente(130) éleveurs) ont rarement des animaux présents en ville, en tout cas en ce qui concerne les extrémités de la journée.
En attendant, lorsqu’un accident survient, le tort revient toujours à l’animal et donc à son propriétaire dont beaucoup ont déjà eu à réparer des préjudices causés aux usagers de la route. Pour le vieux Diallo, le développement du Burkina Faso ne peut pas se faire sans l’élevage et ce secteur mérite mieux d’égards. Tout de même « Il y a un motif d’espoir à la survie du secteur puisque beaucoup de personnes s’adonnent maintenant à l’élevage intensif en lieu de celui extensif pratiqué jusqu’ à présent. C’est une bonne alternative que l’Etat doit encourager davantage » analyse t-il.
Soumana Loura