jeudi 25 avril 2024

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Situation sécuritaire du Burkina : Maixent Somé se prononce

maix uneDepuis 2016, le Burkina Faso est soumis à une spirale d’attaques qui endeuillent le pays. Une guerre contre un ennemi inconnu qui a déjà fait de nombreux morts et blessés, tant parmi les civils que les militaires et paramilitaires. Tout dernièrement, le député-maire de Djibo et trois de ses compagnons ont été fauchés par les balles assassines de terroristes. Alors que le pays n’a pas encore fini de les pleurer, c’est un convoi de travailleurs de la mine d’or SEMAFO SA qui tombe dans une embuscade des forces du mal. Bilan : une quarantaine de morts et de nombreux blessés, ce qui en fait le plus gros carnage du fait des groupes après celui du Splendid Hôtel en 2016. Pour comprendre cet acharnement des groupes terroristes sur le pays des Hommes intègres, Radars Info Burkina a tendu son micro à Maixent Somé, analyste et activiste politique.

Radars Info Burkina: Comment vous appréciez la situation sécuritaire du Burkina Faso depuis 2016 ?

Maixent Somé : Il y a une lente dégradation malgré nos efforts pour la montée en puissance de notre armée et le Programme d’urgence pour le Sahel (PUS) décidé par le gouvernement.

Notre pays est en train de s’enfoncer dans une crise sécuritaire durable.

 

RB : Qui attaque le Burkina Faso ? Pourquoi l'attaquent-ils ?

MS : Il est extraordinaire que nous en soyons encore à nous poser ces deux questions après cinq ans de lutte antiterroriste. Qui attaque le Burkina Faso ? Les différentes bandes armées plus ou moins liées à Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) et à l’Etat Islamique. Mais dans ce chaos, l’opportunisme s’installe et il y a beaucoup d’actes de grand banditisme et de règlements de comptes également.

RB : Pourquoi attaquent-ils le Burkina?

MS : D’abord parce qu’ils en ont l’opportunité. Ensuite parce qu’ils veulent dominer certaines parties du pays afin d’y exercer le pouvoir politique, judiciaire et économique. Ils veulent se substituer à l’État moderne dans le cadre duquel ils ne peuvent pas être les dominants.

 

RB: Certaines attaques sont revendiquées, d'autres pas. Qu'est-ce qui explique cela selon vous ?

MS : Il y a les attaques pour la conquête territoriale. Elles n’ont pas besoin de publicité. Et il y a les attaques pour la propagande qui, elles, sont revendiquées.

C’est assez logique...

RB: Au départ, ces attaques visaient essentiellement les FDS. Aujourd'hui, elles n’épargnent personne (civils, politiques religieux...). Quelle analyse cela vous inspire-t-il ?

maix 2MS : Non, si la presse et les réseaux sociaux ont commencé à parler du phénomène lorsque les FDS ont été très ciblées, ce n’est pas par eux que cela a commencé, mais bien par les notables dans le Soum.

Ces groupes terroristes s'implantent toujours suivant le même schéma, qui est d’ailleurs le même que celui des mafias :

Phase 1: À défaut de pouvoir s'implanter en cooptant les notables, ils recrutent des déshérités qu’ils instrumentalisent pour défaire le tissu social.

Phase 2 : Ces déshérités, souvent des marginaux, sans référentiel social et culturel, tuent les notables et les dignitaires pour terroriser la population afin de l’obliger à la collaboration ou au silence.

Phase 3 : Ils harcèlent les FDS pour se procurer plus d’armes, mais également pour les pousser à commettre des erreurs, par exemple des bavures sur la population locale: arrestations arbitraires, dénonciation calomnieuse, exécutions extrajudiciaires de personnes soupçonnées.

L'opinion se braque contre les dirigeants qui sont accusés d’incompétence et de manque de vision, bref, de ne pas être à la hauteur et l’État est encore plus discrédité et déconsidéré.

La théorie du " si on tire, je fuis, qui est bête pour mourir pour ces politiciens" s'installe.

L'état-major militaire expliquera qu'il s'agit de l'effet de surprise, de complicités locales, de repli tactique, etc.

Mais plus personne ne croira à la communication officielle. Par contre, les gens n’auront plus aucun esprit critique face aux théories les plus délirantes dès lors qu’elles désignent un coupable qui leur convient : des adversaires politiques, une ethnie, une religion, un groupe d’intérêts, un pays étranger.

La population locale basculera du côté des plus forts pour se protéger.

Je pense que nous en sommes là aujourd’hui.

RB : Aujourd'hui, le pays pleure les travailleurs de la mine d'or de SEMAFO SA, tombés sous les balles des terroristes. Pourquoi, à votre avis, s'en prennent-ils aux travailleurs des mines ?

SM : Quelles sont les ressources du Burkina ? C’est l’agriculture, l’élevage, l’or et, on l’oublie souvent, le tourisme. Ils ont déjà réussi à désorganiser l’agriculture et l’élevage dans certaines zones en faisant fuir les populations. Ils ont fait fuir les touristes et les ONG. Il ne leur reste plus qu’à faire fuir les entreprises minières industrielles qu’ils ne contrôlent pas alors qu’ils ont pris le contrôle de beaucoup de mines artisanales…N’oubliez pas que c’est avant tout une guerre pour le pouvoir sur les ressources économiques.

 

RB : D'aucuns estiment qu'il faut que Roch et Blaise se parlent pour trouver une solution. Qu’en pensez-vous ?

SM : Qui vous dit que ces deux là ne se parlent pas soit directement, soit à travers des émissaires ? Ceux qui répètent le nom de Blaise Compaoré en boucle comme solution à ce problème le font pour des raisons politiciennes ou par manque de discernement.

C’est comme si les Maliens appelaient Alpha Omar Konaré et Amadou Toumani Touré aujourd’hui pour solutionner le problème du terrorisme au Mali…

Je dis cela parce que Blaise Compaoré a eu exactement la même stratégie que ces deux anciens présidents maliens face à ces groupes terroristes : un pacte de non-agression.

Au Mali comme au Burkina, cela a donné un calme en trompe-l’œil. On voit le résultat maintenant.

 

RB : La lutte contre les terroristes est-elle militaire ou politique ? Quelle solution vous proposez pour venir à bout des forces du mal ?

MS : Ce matin, dans l’émission Débats sur Actualité, Juan Gomez posait la même question. Ils m’ont contacté et j’ai refusé de participer à l’émission car je pense que cette question n’a pas de sens.

Opposer politique et militaire dans la lutte antiterroriste n’a pas de sens.

Il faut une solution politique dans laquelle les armes ont toute leur place, mais également le développement des zones abandonnées depuis des décennies par l’État.

Ce qu’il faut, c’est un rapport de force militaire en faveur de la force publique, et des actions pour assécher les sources de financement et de recrutement de ces groupes.

Je constate que l’on parle enfin de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme…

Il y a également des expériences très intéressantes menées au Niger pour la réinsertion des jeunes transfuges de ces groupes.

Le Niger a eu l’intelligence de ne pas appliquer les DDR prônés par l’ONU tels quels. Ils ont adapté la démarche. Pour un jeune radicalisé formé et inséré, il y a 4 jeunes qui, eux, n’avaient pas rejoint ces groupes terroristes. Cela évite le phénomène de “Prime à la Kalache” qu’on a pu observer dans d’autres pays.

Propos recueillis par Péma Néya

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