Béli François Nignan avait à peine 19 ans quand il entamait sa carrière d’instituteur. Il a consacré près de 40 ans de sa vie à enseigner et à éduquer des enfants dans plusieurs régions du Burkina Faso. Le 27 septembre dernier, à l’occasion de la 2e édition des Journées de reconnaissance du député à l’enseignant (JOURDEN), Alassane Bala Sakandé, le président de l’Assemblée nationale du Burkina Faso, l’un de ses anciens écoliers, lui a rendu hommage et a même croisé les bras pour le saluer. Radars Info Burkina est allé à la rencontre de cet instituteur du PAN à Pouni, dans la province du Sanguié, où il vit depuis 1991.
Radars Info Bukina : Pouvez-vous revenir sur les grandes lignes de votre carrière d’enseignant ?
Béli François Nignan : J’ai d’abord servi à Nobini pendant 6 ans. C’est là que j’ai eu comme élève l’actuel président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala Sakandé en classes de CP1 puis de CP2. Ensuite, j’ai officié dans d’autres contrées du pays comme Poura. En 1991, j’ai été affecté à Pouni, dans la province du Sanguié. C’est là que je réside depuis que je suis à la retraite.
RB : Que représente pour vous le métier d’enseignant ?
BFN : Si j’avais à choisir un métier, je choisirais encore celui d’enseignant. J’ai toujours aimé les enfants. Ce métier, si vous le faites bien, vous ne le regretterez jamais. Vous voyez par exemple que j’ai été honoré par le président de l’Assemblée nationale. Je ne m’y attendais pas du tout !
RB : Justement, comment vous vous êtes senti quand Alassane Bala Sakandé a croisé les bras devant vous pour vous saluer ?
BFN : Quand je suis arrivé à Nobini en 1971, j’ai partagé le même bâtiment que son père. J’étais leur voisin. Bala s’est attaché à moi alors qu’il n’avait que 2 ans. Il m’aidait à m’occuper de ma volaille. C’est même moi qui ai proposé à son père de l’inscrire dès l’âge de 6 ans à l’école. Sa mère y était réticente, vu qu’il n’avait pas encore 7 ans. Mais son père, lui, était partant. Alassane Bala Sakandé m’a vraiment honoré. En dehors de Dieu, je ne pense pas que j’aurai encore pareil honneur.
RB : Que retenez-vous de l’écolier Bala Sakandé ? Était-il turbulent ?
BFN : Non, Alassane n’était pas turbulent ; c’était plutôt un enfant intelligent. Il s’exprimait déjà en français avant d’être inscrit à l’école. Il était là quand je préparais mes cours et en classe, il participait aux cours et cela incitait ses camarades à participer également.
RB : Aujourd’hui quand vous observez le système éducatif, quels sentiments vous animent ?
BFN : Il faut avoir l’honnêteté de dire qu’aujourd’hui, ce que nous avons accepté, les jeunes enseignants ne l’acceptent plus. On m’a affecté dans un village où il n’y avait pas d’école. Les habitants du village m’ont même conseillé de repartir. Mais je ne l’ai pas fait car moi-même j’avais 3 enfants à scolariser. J’ai donc proposé aux habitants de construire un hangar. Ensemble, nous avons construit ledit hangar afin que je puisse enseigner les enfants.
RB : Quel conseil pouvez-vous donner aux jeunes enseignants d’aujourd’hui ?
BFN : A mes frères qui sont encore sur le terrain, je souhaite beaucoup de courage. Il n’est écrit sur le front d’aucun enseignant la localité dans laquelle il doit être affecté. Quel que le soit le lieu où on vous affectera, il faut donc y aller car ce sont aussi des gens qui y vivent. Un enseignant qui exerce son métier avec compétence ne peut jamais le regretter.
Propos recueillis par Péma Néya