Symbole de l’union entre une femme et un homme, la dot va au-delà des individus et uni deux familles. Composée d’un taurillon, de génisses, de cauris, de volaille et d’années de travaux champêtres chez le beau-père, la dot varie d’une localité à une autre. En raison de sa particularité, nous avons rencontré les membres de la lignée des Bèkounè pour en savoir davantage.
Dans la lignée des Bèkuonè du département de Disshin Kpopéri, la dot peut être subdivisée en trois phases : la première est la plus symbolique et consiste en un don de 360 cauris. Cette première tranche de cauris, selon Nayiré Evariste Poda, peut être qualifiée de « cauris de consécration » ; c’est elle qui scelle réellement le lien entre le jeune homme et la jeune fille. Cette tranche de cauris est appelée « libi tuo » en dagara (cauris amers) en raison du double traitement dont elle fait l’objet, d’abord dans la famille de l’époux et ensuite dans celle de la femme. La seconde phase varie d’une femme à une autre et est fonction du nombre de cauris qui avait été utilisé pour doter la mère. Mais généralement, c’est un montant de 13 000 cauris qui est demandé. Cette tranche de cauris, encore appelée « libir dira » (cauris que l’on peut dépenser), peut être qualifiée de « cauris compensatoires ». Le beau-père peut en disposer pour ses propres dépenses ou pour acquitter la dot d’un des frères de la fille cédée. La troisième phase est constituée d’autres prestations comme l’exécution de travaux agricoles dans la famille des beaux-parents du futur marié. A cela il faut ajouter trois têtes de bœufs (un taurillon et deux génisses). Cette tradition instaurée par les ancêtres a pour rôle d’harmoniser et de sacraliser l’union entre l’homme et la femme en pays dagara. Pour Jacques Méda, membre de ce clan, de nos jours la première tranche de cauris ne peut pas être convertie en francs CFA. La seconde phase, quant à elle, peut l’être. Il précise que de nos jours si l’on considère qu’un cauri a une valeur de 5 francs, il faudra 65 000 F CFA pour 13 000 cauris. De même, il indique que sur les trois têtes de bœufs, seules les deux génisses peuvent être converties en espèces, le taureau ne pouvant l’être. Car pour celui-ci, cet animal fait partie des animaux qui doivent être immolés pour la cérémonie traditionnelle du mariage. Alfred Méda précise que quand les génisses sont données en nature, à leur reproduction les petits peuvent servir également à doter les femmes des frères de la jeune fille pour qui la dot a été prise.
Selon cette tradition, l’acceptation des 360 cauris est le symbole que la jeune fille est passée de la vie de célibataire à celle de femme mariée. Et pour ce faire, elle doit être fidèle à son mari, faute de quoi, elle encourt plusieurs risques.
Selon Alfred Méda, la dot est très sacrée dans la société dagara et doit être considérée comme telle. Par ailleurs, il précise qu’elle n’est jamais prise en intégralité, surtout la dernière génisse. Car étant un humain, la femme ne doit pas être donnée entièrement à l’autre famille, il faut toujours qu’il y ait un crédit. Pour lui, si la dernière génisse est prise pendant que la femme n’a pas atteint l’âge de la ménopause, elle peut ne plus enfanter.
Saâhar-Iyaon Christian Somé Békuoné