Un dépotoir à ciel ouvert qui jouxte des écoles primaires, c’est le spectacle désolant qu’il nous a été donné de voir au quartier Kalgodin de Ouagadougou. Depuis une dizaine d’années, personnel enseignant et élèves des écoles primaires publiques Kalgodin A, B, C et D coexistent à leur corps défendant avec des ordures déversées quotidiennement le long du mur de l’aéroport. Et le délabrement des murs de ces infrastructures scolaires n’est pas pour arranger les choses.
Dame Rasmata Sawadogo est enseignante dans une des écoles primaires publiques de Kalgodin depuis une quinzaine d’années. Quand elle y a pris fonction, le dépotoir existait déjà le long du mur de l’établissement. Et chaque jour, ses collègues et elle ainsi que les élèves dont ils ont la charge vivent, impuissants, toute sorte de désagréments liés à la présence du dépotoir. « Chaque jour, des personnes que nous ne connaissons pas viennent déverser et brûler des ordures. Franchement la fumée et les odeurs dégagées nous incommodent. Quand les ordures sont brûlées, nous suffoquons dans les classes ; nous n’arrivons même pas à respirer. Même les élèves vont souvent s’amuser et fouiller les ordures et ramasser des objets qu’ils mettent souvent dans la bouche. On a beau leur interdire de le faire, on ne peut pas les contrôler tout le temps, surtout quand ils rentrent à midi ou le soir», déplore-t-elle. Hadé Rayessé, également enseignante, abonde dans le même sens. « Ce n’est vraiment pas facile de travailler avec les ordures à proximité. Et quand on les brûle, c’est à peine si nous arrivons à respirer. Et ceux qui sont prédisposés à l’asthme ont souvent des crises dans les classes. Nous sommes obligés de rester dans les classes parce que nous n’avons franchement pas le choix. Et la fumée est souvent si importante que l’aéroport est obligé d’envoyer des citernes éteindre le feu. Le comble, c’est quand il pleut : l’odeur devient insupportable ». Elle ajoute qu’en plus de ceux qui déversent des ordures, il y a aussi les vendeuses de jus qui viennent y trier des bouteilles de boissons gazeuses pour conditionner leurs produits. Un véritable danger pour la santé des consommateurs, quand on sait les conditions dans lesquelles ces bouteilles sont parfois lavées avant utilisation.
A la question de savoir si les autorités communales ont connaissance du problème, Mme Alioro, directrice de l’école primaire Kalgodin B, affirme que le prédécesseur du maire actuel venait régulièrement avec des bulldozers enlever les ordures et nettoyer les lieux. Mais depuis l’arrivée de la nouvelle équipe, ce n’est plus le cas. Et cette situation a même favorisé l’installation anarchique d’habitations, construites à la lisière du dépotoir.
Pour leur permettre de travailler dans de bonnes conditions, le corps enseignant sollicite la construction d’un mur, au moins pour la sécurité des apprenants. « Nous souhaitons de tout cœur que notre mur délabré soit reconstruit, pour au moins protéger les enfants et éviter que les charrettes chargées de poubelles traversent la cour de l’école pour aller déverser les ordures ou les fouiller. Cela éviterait aussi que les gens traversent la cour de l’école. Il faut aussi sensibiliser la population afin que le dépotoir soit délocalisé pour le bien-être de leurs enfants qui fréquentent les écoles et pour nous, les enseignants, aussi », plaide Dame Alioro.
Acquérir des connaissances est bien, mais le faire dans un cadre sain et sécurisé est encore mieux. Il revient donc aux autorités communales de prendre à bras-le-corps ce problème de salubrité qui perdure depuis plus d’une décennie.
Armelle Ouédraogo