Des débits de boissons relativement frelatés jouxtent de nombreux établissements d’enseignement au Burkina Faso. Durant les heures de pause et même de cours, certains élèves préfèrent quitter le cadre scolaire pour aller prendre un verre.
La rupture de la relation élèves et débits de boissons ne semble pas être encore à l’horizon ! Au Burkina Faso et plus précisément à Ouagadougou, l’on assiste à une floraison de débits de boissons aux alentours des écoles.
Il est 10 heures lorsque nous arrivions au quartier Tanghin, situé dans l’arrondissement numéro 4 de la ville de Ouagadougou. On peut lire sur la devanture d’un de ses débits de boissons « Maquis, restaurant, cave à vin, glacier ». Ce maquis est à quelques mètres du Lycée technique Bethel. A l’intérieur de cet établissement de vente de boissons tout genre, il est donné de voir deux groupes d’élèves. Le premier groupe composé de trois élèves de sexe masculin était au tour d’une table en train de consommer de la boisson alcoolisée. Sur la tenue de ces écoliers, il est écrit « LTB Lycée Technique Bethel ». Compte tenu de l’heure qu’il faisait, le maquis ne jouait pas de la musique. A l’aide d’un téléphone portable et un appareil haut-parleur, ces élèves ont décidé de mettre leur propre musique.
De l’autre côté, c’est un groupe de cinq garçons et trois filles qui consomme de la sucrerie et de l’alcool. Les trois filles dont il est question, sont les serveuses du maquis. Paradoxalement, un message sur un papier format A4 est affiché au mur : « A votre attention. Le port de la tenue scolaire est formellement interdit ici. Merci de votre bonne compréhension ».
C’est un exemple parmi tant d’autres, car pendant les pauses, ils sont nombreux à fréquenter ces débits de boissons. Un soir, aux alentours de 18 heures dans le quartier Kossodo, nous sommes tombés sur un élève saoule, vêtu de son uniforme scolaire où il est écrit Lycée Privé La relève, qui dandinait.
Cette situation ne rend pas la tâche facile aux enseignants. Pour Wamsibiri Frédéric KAGAMBEGA, enseignant de Sciences de la vie et de la terre (SVT), les élèves qui prennent l’alcool aux heures de pauses constituent un sérieux problème à la reprise. « Pour les classes de 4e et 2nd où j’ai vécu l’expérience, il y a certains qui somnolent pendant que d’autres par contre perturbent le bon déroulement des cours. Ils ont des comportements épidermiques. En réalité, ils veulent forcement que les enseignants les renvoient de la salle », a-t-il expliqué. Pourtant pour certains élèves, boire l’alcool permet de bien suivre les cours. « Lorsque je bois la bière, cela m’aide à mieux comprendre et je ne me fatigue pas », nous a confié un élève qui a préféré garder l’anonymat.
En ce qui concerne les boissons alcoolisées que les élèves consomment, il y en a de plusieurs types. Le « kêmê-kêmê », qui désigne la somme de cinq cent (500) francs CFA en Djoula (langue majoritairement parlée dans l’Ouest du pays), est communément utilisé pour l’achat de la bière nationale Brakina. Cette pratique est en pleine croissance à Ouagadougou. En plus des bières industrielles, il y a ceux qui s’adonnent aux boissons locales communément appelées « dolo ». Quant à la consommation des whiskies frelatés, elle prend de plus en plus de l’ampleur compte tenu de son coût très accessible. « Avec le whisky Fighter qui est vendu à cent (100) francs CFA l’unité dans les sachets, il n’est pas rare de surprendre un enfant qui traîne avec cela dans son sac », a déclaré Wamsibiri Frédéric KAGAMBEGA.
Un débit de boisson en face du Centre polytechnique d'enseignement industriel et commercial
Face à ce phénomène, il est du devoir de chaque parent de veiller à la bonne conduite de son enfant. Les fréquentations des enfants hors de la maison doivent être suivies de près. Pour ce faire, la communication parent-enfant doit être privilégiée à la maison. Les autorités et la ligue de consommateurs doivent prendre cette affaire à bras le corps afin d’arrêter cette pratique qui jusqu’à présent se passe sous leur nez.
Cryspin LAOUNDIKI