La douance peut être définie comme le fait pour une personne d’avoir des capacités intellectuelles au-dessus de la normale. Plus spécifiquement, c’est quand un enfant ou un adulte possède des facultés d’attention, de concentration, de mémorisation, d’orientation et de dextérité élevées, qui lui confèrent une certaine facilité et une rapidité dans les apprentissages. Leur quotient intellectuel se situe généralement au-dessus de 130 pour une moyenne normale de 100. Ce don de la nature n’a pas seulement que des avantages, car les enfants à haut potentiel intellectuel sont souvent stigmatisés par leur entourage. Pour mieux comprendre ces enfants dotés d’un quotient intellectuel hors pair, Radars Info Burkina a pris langue avec le Professeur Christian Napon, neurologue et chef du service de neurologie du Centre hospitalier universitaire de Bogodogo.
Radars Info Burkina : Est-ce qu’il existe des facteurs qui expliquent qu’un enfant soit surdoué ?
Christian Napon : Non, pas forcément dans la mesure où c’est un don. Ce sont des capacités innées offertes par la nature. On ne peut pas présager la naissance d’un surdoué. On sait seulement que ce sont des enfants qui possèdent plus de cellules nerveuses que l’enfant lambda et des réseaux de neurones partageant des connexions plus importantes que chez l’enfant dit « normal ». Et on conçoit aussi que ce sont des enfants qui naissent avec un lobe frontal (partie antérieure du cerveau chargée des capacités d’attention et de concentration) plus développé qu’à l’état normal.
RIB : Qu’est-ce qui caractérise un enfant surdoué ?
CN : L’enfant surdoué est curieux et toujours en quête d’apprentissage ; il est perfectionniste et aime même la perfection à l’excès. On retrouve aussi chez lui une précocité dans les facultés à lire et à écrire et une culture générale très développée. Il est souvent solitaire parce que stigmatisé par son entourage et il a un sens élevé de la justice. Par contre, son affectivité est parfois en décalage avec sa maturité intellectuelle. Il a des difficultés à prendre des décisions s’il est confronté à un problème ne pouvant être résolu uniquement par la logique (problème sentimental, émotionnel). Donc on voit bien la dualité dans les caractéristiques de l’enfant surdoué : de grandes capacités dans le domaine logique mais des difficultés dans l’affectivité et les émotions.
RIB: Quelles peuvent être les répercussions de la douance sur la vie sociale du surdoué ?
CN : Les répercussions sur le plan social, c’est d’abord la stigmatisation, la jalousie des autres enfants qui finalement isolent le surdoué qui peut être menacé de dépression, d’anxiété. A cela s’ajoute la fuite de l’entourage devant un individu perfectionniste, jamais satisfait de ce qui est fait et qui cherche toujours à faire mieux. Ce qui fait qu’il est souvent incompris par son entourage qui peut, de ce fait, le rejeter. Sur les plans des émotions et de l’affectivité, ce sont des enfants peu sensibles et leur comportement d’indifférence ou de détachement devant une situation sentimentale ou émotionnelle forte peut aller jusqu’à choquer l’entourage. Il ne faut pas tout de même avoir des clichés tous faits sur l’enfant surdoué, car certains d’entre eux possèdent aussi des émotions et une affectivité normale. Il faut dire que parmi eux, certains peuvent être amenés à cacher leur douance pour être mieux acceptés par les autres.
RIB : Comment canaliser un enfant surdoué qui n’est pas attentif en classe ?
CN : L’enfant surdoué est souvent en avance sur les autres enfants au point que, parfois, il peut avoir l’impression de perdre son temps avec ceux qui mettent plus de temps à appréhender les choses. Cela l’amène parfois à divaguer, conduit par sa quête effrénée d’exploration de nouveaux horizons. Il est difficile de ce fait de le canaliser. L’idéal aurait été qu’il soit parmi d’autres enfants surdoués, ce qui atténuerait un tant soit peu cet état de fait.
RIB : Est-ce que douance rime forcément avec réussite scolaire et professionnelle ?
CN : En général, la réussite scolaire et même professionnelle est au rendez-vous en cas de douance. Mais réussir, c’est aussi savoir vivre avec les autres, tant dans ses rapports sociaux que dans son travail. C’est en cela que le surdoué peut avoir des difficultés d’adaptation et d’intégration, car dit plus haut, il demeure faible dans son rapport à autrui, tant dans ses émotions que dans son affectivité, ce qui peut être un frein à sa réussite professionnelle.
RIB : Quelles précautions peuvent prendre les parents d’un enfant surdoué ?
CN : L’enfant surdoué doit être éduqué avec les mêmes exigences que l’enfant dit à quotient intellectuel normal. Il ne faut pas penser qu’il se suffit à lui-même et qu’il peut s’autogérer. Il a besoin d’être encadré et éduqué suivant les valeurs sociales morales que prône la société et remis dans le droit chemin lorsqu’il enfreint les règles qui régissent la vie en communauté. Les parents doivent être aussi sensibles aux situations de stress que traversent leurs enfants surdoués et veiller à leur apporter un soutien psychologique adéquat ou recueillir l’aide d’un psychologue, voire d’un psychiatre le cas échéant.
Propos recueillis par Armelle Ouédraogo