Suite à sa publication sur sa page Facebook et relative au « marasme » du showbiz burkinabè, Tibiafouba Madiega, journaliste culturel, s’est vu remonter les bretelles par de nombreux internautes. Radars info Burkina a approché Cyr Payim Ouédraogo, directeur de publication du journal Infos Sciences et Culture, pour avoir sa lecture de cette situation.
Radars info Burkina (RIB) : Quelle appréciation faites-vous de l’escalade verbale entre acteurs culturels sur les réseaux sociaux consécutive à la publication de Tibiafouba Madiega ?
Cyr Payim Ouédraogo (CPO) : A priori, cette publication visait à susciter un débat sur une thématique. Mais je pense qu’il y a des gens qui n’ont pas bien compris la pensée de Madieba et qui ont tout de suite réagi avec beaucoup de plaintes, lui attribuant un certain nombre de choses. Je pense que sur les réseaux sociaux, les gens manquent un peu d’humilité et de lucidité. Souvent on fait des commentaires sans prendre le soin de percevoir la portée réelle de ce qui est dit. Si la question que ce journaliste culturel a posée a donné lieu à ce qu’on sait, je me dis que c’est parce qu’il y avait un précédent entre lui et certains acteurs culturels. Selon moi, cette question n’aurait pas dû susciter une telle levée de boucliers.
RIB : Selon vous, quelle est la part contributive des journalistes culturels à la promotion de la musique burkinabè ?
CPO : C’est le journaliste culturel qui fait découvrir l’œuvre de l’artiste au public ou aux mélomanes. C’est le journaliste ou l’animateur de radio ou télé qui le fait. C’est un monde qui apporte l’expertise qu’il faut au développement de la musique. Parmi tous ceux qui évoluent dans le secteur de la culture, quand on est journaliste c’est un sacerdoce.
RIB : Quelle est la principale entrave à la promotion de la musique burkinabè ?
CPO: Je pense que la musique burkinabè n’a pas de problème. Dans tout secteur, il y a ceux qui émergent, ceux qui sont à un niveau intermédiaire et ceux qui tentent de pointer le nez. Côté qualité, il y a certaines œuvres qui volent très haut mais d’autres œuvres quand vous les écoutez, vous vous demandez ce que leur auteur est venu chercher dans le domaine musical et s’il ne s’est pas trompé de métier. Le problème majeur de la musique burkinabè, c’est son exportation. Le ministère de la Culture, en fin 2018, a organisé un atelier où il a fait venir des experts de la sous-région pour partager leur expérience avec ceux du Burkina en matière d’exportation de musique et de diffusion. L’objectif, c’était de voir comment nos journalistes peuvent briller au-delà de nos frontières. On attend les grandes conclusions de cet atelier. N’empêche, les artistes aussi doivent se battre avec leur staff pour leur émergence. Ça ne peut pas aller s’ils attendent tout de l’Etat. Chaque acteur de la chaîne musicale doit s’impliquer davantage pour la promotion dudit secteur. Je retiens qu’on peut faire de la bonne musique mais à laquelle les gens sont indifférents. Mais dès que l’artiste a une bonne équipe autour de lui, celle-ci travaille vraiment avec les moyens qu’il faut pour la promotion. Je vous cite un exemple : Awa Boussim, c’est une femme qui chantait très bien en province. Son album a mis du temps avant de décoller. C’est grâce à l’émission « Cocktail » diffusée sur la RTB que le public a découvert petit à petit la musique de cette artiste. Mais à présent, vous voyez qu’elle preste à l’international. On ne peut plus improviser, il faut se préparer et c’est ceux qui arrivent à planifier leur carrière qui s’en sortent. En revanche, ceux qui comptent sur la chance ou exclusivement sur le soutien de l’Etat passeront leur temps à attendre certaines choses qui ne viendront jamais ou bien verront que leur carrière est en berne à un moment donné. Et cela pose problème. Il faut se former, avoir un minimum de talent et faire des recherches si on veut faire une musique qui traverse les générations.
Aly Tinto (Stagiaire)