Le gouvernement a décidé de la réglementation des interventions des agents publics de santé dans les structures sanitaires privées au Burkina. Ainsi, il ressort que ces agents ont l’autorisation d’intervenir dans les structures privées sur une durée de 2 ans maximum pour les spécialistes et d’un an pour les autres corps de la santé au bout desquels, tous doivent choisir entre le privé et le public. Interrogés par Radars Burkina, certains acteurs donnent leurs avis sur la question.
Selon le Dr Ibrahima Karambiri, médecin spécialiste en médecine du travail, le décret portant horaires et organisation du travail dans la Fonction publique hospitalière (FPH), adopté en 2020, ne prévoyait pas de limitation dans le temps en ce qui concerne la prestation des fonctionnaires de la FPH dans les structures privées et cela posait problème au regard de l’absence des agents dans les hôpitaux publics.
« Je suis personnellement contre l’absentéisme dans les hôpitaux publics qui est devenu actuellement l’un des plus grands maux de nos hôpitaux », soutient-il.
Cependant, il estime que l’application des textes ne sera pas sans conséquences sur le contrat des fonctionnaires de la FPH, car il « existe une injustice dans le traitement des agents de la fonction publique qui pourrait expliquer en partie la fuite des agents de santé à la recherche de complément de fin du mois ». Selon lui, pour deux médecins X et Y, avec la même formation, le même diplôme, de même catégorie P, il y a deux traitements totalement différents. C’est pourquoi, dit-il, il y a risque de perdre un grand nombre d’agents publics. Ainsi, « si l’Etat veut conserver son personnel, en ce qui concerne les médecins en tout cas, il va falloir revoir la rémunération qui témoigne de l’injustice dans le traitement des agents l’Etat ». Ce, pour soulager la population qui souffre déjà aujourd’hui pour bénéficier des prestations d’un médecin dans les hôpitaux publics.
De plus, pour une bonne résolution de ce problème, « le gouvernement se doit de doter les hôpitaux d’un plateau technique qui réponde aux compétences des agents. Il faut également une lutte énergique contre la corruption de façon générale et dans le secteur de la santé en particulier », a suggéré le Dr Karambiri.
Djamila Sawadogo, étudiante en 6e année de médecine, n’accueille pas favorablement cette décision gouvernementale. Selon elle, même si être médecin est un sacerdoce, médecins généralistes comme spécialistes ne gagnent pratiquement rien. « C’est leur intervention dans les structures sanitaires privées qui leur permet de joindre les deux bouts. Ces textes vont obliger les agents de santé à se contenter d’un revenu qui ne leur permet pas de couvrir leurs besoins essentiels », défend-elle.
Pour elle, « si chaque fois ce sont des textes d’interdiction qui sont pris, en fin de compte plus aucun étudiant ne voudra faire médecine à l’université de peur de finir ses études et de se retrouver dans cette pauvreté». « La médecine est un métier libéral, ce qui veut dire qu’on peut l'exercer dans le public comme dans le privé. Le gouvernement peut donc imposer le nombre d’heures à faire dans les structures publiques aux agents public de santé et laisser ces derniers disposer du reste de leur temps comme bon leur semble », a-t-elle souhaité.
Taïba Sebgo, étudiante également en 6e année de médecine, dit être du même avis en ce qui concerne les spécialistes parce que cela leur permettra d’être « efficaces à 100%. Sinon en voulant être sur deux terrains à la fois, on se perd ».
Tout compte fait, elle est inquiète en ce qui concerne les autres agents qui parfois, après leur intégration à la fonction publique, peuvent chômer pendant 1 an et demi mais s’occupent dans le privé en attendant leur prise de service.
Flora Sanou