En matière de santé publique, des textes visant à éviter les maladies à caractère collectif existent. Mais le triste constat que l’on fait est qu’il y a un hiatus entre ce que prescrivent lesdits textes et la réalité sur le terrain. Et le moins qu’on puisse dire est qu’autorités et populations ont chacune leur part de responsabilité dans cette situation qui expose à de nombreuses maladies.
Devant la cour d’une dame que nous décidons de nommer Aminata et qui habite à l’arrondissement 6 de la ville de Ouagadougou, les eaux de vaisselle, de toilette ainsi que les urines sont canalisées dans un puits perdu à ciel ouvert dans la rue. Dans cette fosse, se trouvent toutes sortes d’ordures. Comme on peut aisément le deviner, cela constitue un nid de moustiques et un lieu de prolifération de différents germes de maladies. A l’exemple de cette cour, nombreuses sont les concessions à la devanture desquelles stagnent des eaux usées jetées par les occupants de ces cours. Pourtant, une réglementation relative à l’hygiène publique existe. Dans plusieurs quartiers populaires de la ville de Ouagadougou, les puits perdus de même que les excréta jonchent les rues, si bien qu’il en émane des odeurs nauséabondo-fétides. Or, selon l’article 2 du Code de l’hygiène publique burkinabè, tout déchet présentant des risques graves pour la santé, la sécurité publique et l'environnement, c’est-à-dire par exemple les eaux usées qui ont été utilisées pour l'alimentation et les autres besoins domestiques, ne doit pas être jeté dans la rue. Il en est de même pour les excreta, c’est-à-dire le mélange de selles et d'urines humaines, ainsi que pour les excréments et urines d’animaux. Et ces pratiques insalubres, quoique interdites par la loi, ont court sous les yeux des autorités compétentes et de la population sans que leurs auteurs en soient inquiétés. L’article 137 du Code de l’hygiène publique dispose qu’en matière répressive, les agents de la police de l'hygiène publique notifient et perçoivent des amendes n'excédant pas cinquante mille (50 000) F CFA. Selon cette même disposition réglementaire, toute personne physique ou morale qui produit ou détient des déchets, dans des conditions de nature à produire des effets nocifs sur le sol, la flore ou la faune, à dégrader les paysages, à polluer l'air ou les eaux, à engendrer des bruits ou des odeurs et d'une façon générale à porter atteinte à la santé de l'homme, de l'animal et à l'environnement, est tenue d'en assurer ou d'en faire assurer l'élimination conformément aux dispositions de la présente loi dans les conditions propres à éviter lesdits effets.
Quand on compare ce qui se passe sur le terrain à ce qui est prescrit par la loi, on est tenté de se demander pourquoi ce silence coupable des autorités et de la population. Pour Jocelyne Traoré, résidente de l’arrondissement 6 de la capitale, le silence des riverains s’explique par le fait que quand quelqu’un intervient à ce propos, il devient de facto l’ennemi juré de bon nombre de personnes.
Face à cette situation, il est important de s’interroger sur les activités que mènent plusieurs Organisations non gouvernementales (ONG) en matière d’hygiène publique et en vue du changement de comportement. De même, la distribution massive de moustiquaires imprégnées chaque année pour combattre le paludisme n’est-elle pas vaine, au regard du constat qui est fait a posteriori ?
Une chose est certaine, sans une véritable prise de conscience des populations de leur contribution à un cadre de vie sain, dans une dizaine d’années nous en serons encore à déplorer cette insalubrité préjudiciable à la santé humaine et ce serait bien dommage.
Saâhar-Iyaon Christian Somé Békuoné