Appel au boycott des opérateurs de téléphonie mobile : « Nous irons au bout, à la satisfaction des consommateurs burkinabè » (Adama Bayala, porte-parole CADDH)
La Coalition des associations de défense des droits de l'homme (CADDH), dans un communiqué, a invité le peuple burkinabè à boycotter toutes les compagnies de téléphonie mobile le mardi 30 mai 2023 de 13h à 14h sur toute l'étendue du territoire national. Objectif de cette opération : dénoncer la cherté des services desdites compagnies et les dysfonctionnements y observés. En quoi consiste l'opération ? Pourra-t-elle vraiment impacter les mis en cause ? Comment avoir l’adhésion des populations ? Adama Bayala, porte-parole de cette coalition, apporte des éléments de réponse dans l’interview ci-après qu’il a accordée à Radars Info Burkina.
Radars Burkina : En quoi consiste cette opération de boycott ?
Adama Bayala : C’est une campagne. La première d’une série inscrite dans une opération baptisée « Vent du salut » qui appelle les utilisateurs des services de communication électronique à marquer une pause entre 13 H et 14H, le mardi 30 mai 2023. Il va s’agir de mettre les téléphones et tous les autres terminaux mobiles en mode avion pour dénoncer la cherté des services et les nombreux dysfonctionnements observés.
Radars Burkina : Comment comptez-vous faire respecter ce boycott ?
Adama Bayala : Pour assurer le succès de cette campagne, nous avons adopté une stratégie de communication. Il s’est agi d’adopter les moyens de la communication d’influence, d’élargir les bases du mouvement, en associant les associations de renommée, les blogueurs et les influenceurs. Ensemble, nous explorons tous les canaux d’information, de sensibilisation et de mobilisation des consommateurs. En cela, les médias jouent un rôle important. Nous vous remercions de votre contribution inestimable.
Radars Burkina : Pensez-vous avoir l’adhésion de toute la population, quand on sait que le téléphone est l’outil de travail de plusieurs personnes, surtout du monde des médias ?
Adama Bayala : Il n’y a pas que les acteurs des médias traditionnels. Il y a aussi les blogeurs, les influenceurs, les commerçants, les entreprises et même les anonymes qui ne peuvent plus se passer du téléphone portable. Nous le comprenons aisément ; c’est d’ailleurs pourquoi nous proposons juste 1 heure. Nous ne doutons pas que les consommateurs burkinabè accepteront de se sacrifier aujourd’hui pour arracher des prix supportables et justes. Savez-vous qu’alors que le giga coûte près de 2000 F CFA ici, il est vendu à moins de 350 F CFA au Ghana et à 1100 F CFA au Niger ? Nous voudrions donc paraphraser l’expert en leadership John Calvin Maxwell pour dire soit nous nous sacrifions aujourd’hui pour nous reposer demain, soit nous nous reposons aujourd’hui pour nous sacrifier demain. Nous avons foi en la responsabilité des consommateurs burkinabè, parfois lents à agir.
Radars Burkina : Ne serait-il pas préférable d’organiser une marche de protestation qui, peut-être, pourrait avoir rapidement plus d’impact que cette opération ?
Adama Bayala : Pas vraiment. Il faut tenir compte du contexte. Oubliez-vous que le communiqué N°3 du MPSR 2 interdit les manifestations ? On n’est pas obligé d’explorer les marches. Nous menons le combat depuis des années. Nous avons exploré en vain les voies de plaidoyer. Aujourd’hui, nous explorons une nouvelle forme de protestation qui va avoir des conséquences économiques importantes. Nous précisons que nous avons une approche méthodique et scientifique, savamment pensée. Nous avons parlé d’opération « Vent du Salut » ; Ne soyez pas pressée. Si la donne ne change pas, nous vous surprendrons agréablement. Croyez-en notre engagement et en notre sincérité. Nous irons au bout, à la satisfaction des consommateurs burkinabè.
Radars Burkina : Cette opération peut-elle réellement impacter les compagnies de téléphonie mobile ?
Adama Bayala : Absolument. Vous avez trois compagnies de téléphonie mobile, avec un parc d’abonnés de 24 millions. Pendant une heure, tous les terminaux mobiles en mode avion. Plus d’appels, plus de messages, plus de connexion internet. Sortez les calculatrices ; je n’en dis pas plus. Si le mouvement est bien suivi, les opérateurs prendront la mesure de nos frustrations et y répondront au plus vite, avec des prix justes et des services de qualité.
Radars Burkina : L'association nationale des opérateurs de télécommunications veut octroyer 10% du volume data supplémentaire aux consommateurs selon un communiqué, que pensez-vous de cette mesure ?
Adama Bayala : Une belle avancée, car nous devons dire que depuis la montée de la fièvre, jamais les opérateurs de téléphonie mobile n’ont reçu les associations de défense des consommateurs. Nous ne savons pas si les choses se passent comme cela chez eux. S’ils nous avaient reçus pour expliquer, on aurait pu comprendre de quoi il retourne. En tout état de cause, ils avaient promis de faire un benchmark dans le marché ouest-africain, on ne sait pas s’ils ont été inspirés par ses conclusions. La logique commande qu’ils publient les résultats de cette étude. Qu’à cela ne tienne, la conférence des présidents des organisations qui porte l’opération appréciera.
Toutefois, nous avons le devoir de louer l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques), car au moment où les opérateurs s’emmurent, c’est elle seule qui nous a reçus et traités comme de véritables partenaires. Avec elle, nous travaillons régulièrement pour des perspectives heureuses.
Propos recueillis par Flora Sanou