Le certificat médical prénuptial est une attestation délivrée par un médecin après que celui-ci a reçu un couple, discuté avec lui et réalisé un certain nombre d’examens obligatoires médicaux. C’est un document important qui a été institué par l’administration dans le souci de prévenir certaines affections. Au Burkina Faso, le certificat prénuptial, exigé par le Code des personnes et de la famille (CPF) en son article 253, fait partie des documents demandés pour la célébration des mariages civils. Le bilan prénuptial est donc un ensemble d’examens de laboratoire qui précèdent l’union qu’est le mariage. Paulin Somda, médecin, nous entretient sur le bien-fondé des examens médicaux demandés dans le cadre de l’établissement dudit certificat dans cette interview accordée à Radars Info Burkina.

Radars Infos Burkina : Quels sont les différents examens demandés pour établir le certificat prénuptial ?

Paulin Somda : Pour le cas du Burkina, ce sont le groupe sanguin Rhésus, l’électrophorèse de l’hémoglobine et la sérologie de la syphilis qui sont obligatoires. 

La connaissance du groupe sanguin et surtout du rhésus de chaque partenaire vise à préparer psychologiquement le futur couple à mieux faire face aux exigences d’un accouchement. En effet, lorsque les deux partenaires sont du même rhésus ou lorsque la future conjointe seule est de rhésus positif, il n’y a pas de problème. Mais lorsque l’homme est de rhésus positif et la femme de rhésus négatif, il faut se préparer à faire le groupage sanguin de l’enfant à la naissance. Là, il y a deux cas : si l’enfant est de rhésus négatif comme sa maman, on peut dire que ce couple a de la chance. Si, par contre, l’enfant est de rhésus positif comme son père il faut, dans les soixante-douze heures, faire une injection de sérum Anti-D à la mère, sous peine de compromettre son avenir obstétrical (risque de ne plus jamais avoir d’enfant). Et ce sérum est coûteux.

L’électrophorèse de l’hémoglobine est le test qui révèle si un individu est drépanocytaire ou porteur de traits de drépanocytose. Lorsque l’un des partenaires est d’hémoglobine AA, il n’y a alors aucun risque que ce couple ait des enfants drépanocytaires. Par contre, si les deux partenaires sont drépanocytaires ou porteurs de traits, c’est-à-dire AS, AS ; AS, SS ; AC, AS ; SC, AS ; SC, SS ; AC, SC ; SS, SS ; SS, AC ; SC, SC ; AS, SC, il existe une probabilité non négligeable (vingt-cinq à cent pour cent) qu’un enfant issu de ce couple soit drépanocytaire SS ou SC. Un enfant drépanocytaire, ce sont des crises douloureuses avec des hospitalisations à répétition. S’accepter en tant que drépanocytaires ou porteurs de traits est un choix risqué et devrait donc se faire en toute responsabilité. Pour ce qui est de la syphilis, c’est une infection sexuellement transmissible qui, mal ou non traitée, peut conduire à la stérilité. Pire, la syphilis chez la femme peut engendrer des fausses couches spontanées ou des pathologies chez le bébé à naître. Il apparaît évident de la rechercher et de la traiter avant le mariage pour le bonheur du futur couple.

Il est aussi important de faire les tests de l’hépatite B, une maladie sexuellement transmissible aux complications graves. Si le test est négatif, il faut se faire vacciner avant l’union. En cas d’atteinte de l’hépatite B, un suivi spécialisé sera entrepris. Il est conseillé de faire également les tests de l’hépatite C, bien que ces deux tests soient facultatifs.

La sérologie HIV peut aussi être faite, mais elle est facultative et ne sera jamais faite sans votre consentement.

Par ailleurs, le bilan prénuptial fait partie intégrante du bilan prénatal. Donc faire son bilan prénuptial réduit les dépenses au cours de la grossesse, car le groupage sanguin et l’électrophorèse de l’hémoglobine ne changent pas dans le temps. En attendant que la consultation pré-conceptionnelle entre dans nos habitudes, ceux qui choisissent de vivre en concubinage aussi doivent faire ce bilan. Il suffit de consulter un médecin de son choix et c’est fait.

Il arrive qu’on demande une recherche d’agglutinines irrégulières, une sérologie de la toxoplasmose et de la rubéole en raison des risques de malformations associées à ces maladies si elles se déclarent en cours de grossesse.

RIB : Qui est habilité à délivrer le certificat prénuptial ?

PS : Tout médecin peut le faire. Mais de plus en plus, nous remarquons que ce sont de faux certificats qui sont établis. Il y a des couples qui sont déjà ensemble et qui veulent régulariser leur situation. Et ils vont juste voir certains médecins qui leur délivrent le papier sans examens préalables. Un certificat prénuptial fait sans les examens demandés est un faux et condamnable par la loi. Le Code pénal condamne le faux en écriture et dans les cas du genre, il s’agit de faux en écriture. Le code de déontologie condamne également les certificats de complaisance et les faux certificats. Et aux niveaux pénal, déontologique et civil, le médecin peut être poursuivi. Le couple peut se plaindre en effet de n’avoir pas été sensibilisé.

RIB : Que faire en cas d’incompatibilité ?

PS : Le bilan prénuptial ne vise pas à séparer deux personnes qui s’aiment ; l’amour de l’une pour l’autre peut être plus fort que les difficultés à venir : le cœur a ses raisons que la science ignore. Ce bilan vise à préparer le futur couple à gérer certaines situations ou carrément à arrêter sa relation s’il le faut. L’agent de santé ne doit pas influencer la décision du couple de se marier ou de faire un enfant en cas d’incompatibilité. Son devoir est d’expliquer clairement aux conjoints la situation et les risques encourus. Quant au dernier mot, il revient aux deux.  Cela concerne surtout les enfants à venir, si les deux conjoints décident d’en avoir et aussi leur propre vie. 

RIB : Quels conseils donneriez-vous aux futurs mariés qui veulent se faire délivrer un certificat de complaisance ?

PS : Le mariage est un partenariat dans lequel chacun déclare ses biens et on décide de s’associer en connaissance de cause. C’est le plus grand bien et il est sacré. L’examen prénuptial permet à chaque conjoint de savoir ce qu’il a comme potentiel et risques. Il ne faut pas que le fruit de vos entrailles soit un problème plutôt qu’une joie pour vous. Avant de s’unir, il faut au moins faire un bilan de santé. Et concernant la procréation, il est bien de s’assurer que les enfants qu’on mettra au monde auront toutes les chances d’être en bonne santé et soient une joie pour la famille et non une source de problèmes.

Propos recueillis par Armelle Ouédraogo (Stagiaire)