jeudi 21 novembre 2024

Endométriose : entre ignorance et incompréhension

témoignage uneAffection gynécologique fréquente et complexe, l'endométriose est un mal qui touche environ cent quatre-vingts millions (180 000 000) de femmes dans le monde. Elle est liée à la présence de tissu semblable à la muqueuse utérine en dehors de l'utérus.  Cette maladie peut être parfois asymptomatique. Mais dans plusieurs cas, elle provoque d'intenses douleurs, notamment pendant les règles, et est souvent cause d'infertilité. Z.O. a traîné son endométriose durant de longues années avant de bénéficier d'un diagnostic et d'un traitement. Elle s'est confiée à Radars Info Burkina (RIB) et nous a raconté la douleur et l'incompréhension auxquelles elle a dû faire face.

 « Je me nomme Z.O. et je suis âgée de trente-quatre ans. Comme la plupart des autres femmes, j'ai eu mes premières règles à onze ans. Au début, elles étaient normales, avec une durée moyenne de trois à quatre jours et surtout sans douleurs. Puis vers mes seize ans, j'ai commencé à avoir des douleurs menstruelles qui se sont intensifiées avec le temps. Pour ma famille et mes amies, c'étaient juste des règles douloureuses et rien d'autre. Pour les mères plus particulièrement qui ont souffert de dysménorrhée, c'est tout à fait normal d'avoir mal pendant cette période, donc on me disait juste de supporter, que ça allait passer. Et ce qui me frustrait le plus, c'est que je n'étais pas prise au sérieux quand j'étais alitée du fait des douleurs. Je sentais dans le regard de mon entourage qu’on trouvait que je jouais à la comédie ou que j'exagérais. On me donnait juste des calmants pour attendre que la douleur passe. Chaque mois, je souffrais le martyre. Et quand je sentais les règles arriver, j'étais abattue car le calvaire allait recommencer. Et j'ai souffert ainsi en silence pendant des années.

Quand j'ai eu vingt-trois ans, j'ai commencé à faire le tour des médecins pour au moins essayer de comprendre ce qui m'arrivait. Le premier gynécologue rencontré n'a pas voulu me faire de toucher, car comme j’étais encore vierge, il ne voulait pas me choquer. Il m'a juste prescrit des antidouleur plus forts et m'a conseillé de me reposer un peu plus pendant mes menstrues. Hélas les choses n'ont guère évolué. Les douleurs étaient toujours présentes et je les sentais quelquefois en dehors de ma période de règles. J'étais toujours incomprise et j'en suis même arrivée à conclure que soit c'est moi qui étais trop fragile, soit j'avais un problème mental.

Puis est arrivé le temps des amours, où j'ai commencé à être sexuellement active. Avoir des relations sexuelles était horrible pour moi, car source de douleur insupportable et non de plaisir. Ce qui fait que mes histoires d'amour ne duraient jamais bien longtemps. Aucun homme ne veut d'une femme qui crie à chaque fois qu'ils ont un moment d'intimité, comme s’il la violait.

J'ai fini par reprendre le chemin de l'hôpital, en allant en consultation chez un gynécologue qui m'avait été conseillé par une amie. C'était la première fois où je me suis sentie écoutée par un agent de santé. Il a été très à l'écoute, m'a permis de m'exprimer, de lui faire part de tout ce que je vivais et supportais. Et quand j'ai fini mon récit, il m'a dit qu'il soupçonnait une endométriose. Je ne savais pas du tout ce que c'était mais j'étais déjà soulagée de savoir enfin de quoi je souffrais depuis des années. Il m'a alors prescrit une batterie d'examens à faire pour confirmer le diagnostic. Quand il a reçu les résultats, tout concluait à une endométriose. Il a alors pris le temps de m'expliquer la maladie, et surtout ce qui pouvait être fait pour soulager la douleur. Mon inquiétude principale était la faible chance de concevoir, voire l'infertilité. En tant que femme, j'aspire aussi à me marier et à fonder une famille. Et ce n'est un secret pour personne que l’impossibilité pour l’un des conjoints de concevoir, surtout en Afrique, brise beaucoup de couples. J'ai alors subi une intervention chirurgicale et je suis toujours sous traitement. Je dois reconnaître que depuis le début du traitement, je me sens beaucoup mieux, et j'ai moins mal. Mon gynécologue m'a assuré que j'avais des chances de concevoir. J'ai retrouvé une vie à peu près normale si on peut le dire.

Je pense que j'ai souffert si longtemps parce que la maladie est peu connue, surtout des praticiens de la santé. Si j'avais été diagnostiquée plus tôt, je n'aurais pas traîné ma douleur toutes ces années. Et je sais que beaucoup de femmes souffrent de cette maladie et de ses conséquences, notamment de l'infertilité. Je pense que les médecins devraient être plus formés à diagnostiquer ce mal et à le soigner, car beaucoup d'entre eux ne savent même pas ce que c'est. Les jeunes filles souffrant de règles douloureuses ne doivent pas banaliser cela. Ne pas pouvoir tenir sur ses jambes ou même s'évanouir pendant sa période de menstrues n'est pas normal. Il faut toujours consulter au moindre symptôme, à la moindre inquiétude.»  

Propos recueillis par Armelle Ouédraogo (Stagiaire)

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