Au Burkina Faso, les nombreux débits de boissons, ouverts à chaque heure de la journée, sept jours sur sept sont à croire l’engouement qu’il y est donné de voir, l’un des principaux lieux de loisirs et de détente de la plupart des Ouagalais. Ces lieux regroupent toutes les tranches d’âges de la société : jeunes, vieux, femmes et adolescents s’adonnent à volonté à l’alcool dans ces divers endroits. Ces différents espaces de divertissement que sont donc les maquis, les bars dancing et les boîtes de nuit sont des complexes de détente et de loisirs qu’il est donné de voir à chaque coin de rue de la capitale, et cela, dans une ambiance souvent de vacarme ou l’alcool et le sexe « coulent à flot », et ce, en faisant fie du besoin de tranquillité des habitants aux alentours.
Au Burkina Faso, l’article 9 de la loi n°0097-79/AN du 7 juin 1979 régissant les débits de boisson, stipule que « aucun débit de boissons ne peut être ouvert sans l’autorisation préalable du préfet ou du maire, délivrée après avis du comité local de salubrité publique et du service des impôts ». L’article 10 quant à lui, mentionne que « il est fixé un ratio d’un débit de boissons pour 2000 habitants dans les agglomérations de plus de 10 000 habitants. Dans les villes moyennes où le nombre d’habitants est compris entre 1 000 à 10 000, ce ratio est un débit de boissons pour 1 000 habitants, puis un seul pour les villes de moins de 1 000 habitants ». Mais à Ouagadougou, on déplore le non-respect de cette réglementation. Selon une enquête de la police municipale, effectuée en juin-juillet 2014, il ressort que la capitale burkinabè à elle seule, compte 3 870 débits de boissons, pour une population à l’époque estimée à 1 915 102 habitants, soit 1 débit de boissons pour 494 habitants. Mais, nombreux sont ces bars, boîtes de nuit, maquis et autres débits de boissons qui sont dans l’illégalité et ne devraient même pas exister.
Ces points de vente d’alcool et de distractions qui poussent comme des champignons dans les quartiers posent souvent de nombreux problèmes aux populations à proximité. En effet, l’animation dans les bars, les boîtes de nuit et autres buvettes, est telle que souvent, elle trouble le sommeil des habitants et leur quiétude. L’arrêté n°37/MATS/PKAD/00, prescrivant la lutte contre les nuisances sonores stipule que « les débits de boissons, bars-dancings, boîtes de nuit et tout autre lieu de spectacle doivent être aménagés de telle sorte qu’aucun bruit ne soit perceptible à l’extérieur au-delà de 23 h ». Selon l’arrêté, les buvettes doivent fermer leurs portes à 22 h. Les bars à 00 h et les dancings à 02 heures du matin les week-ends. Cette réglementation est foulée aux pieds, dans la mesure où de nombreuses plaintes régulières des riverains qui subissent les nuisances sonores sont enregistrées.
Nous nous sommes rendus dans un maquis situé dans la zone de Pissy pour faire le constat. Il est 18h, les employés du maquis ont déjà terminé la mise en place des lieux et voilà les premiers clients qui arrivent. La musique à fond, l’ambiance peut commencer du « coupé décalé » en passant par du « zouglou » et quelques musiques traditionnelles et tradi-modernes, les fidèles clients ne se font pas prier pour enflammer la piste de danse et le « DJ » sait comment faire pour prolonger cette soirée.
Un client qui a souhaité rester dans l’anonymat nous confie « je viens ici presque tous les soirs pour passer du bon temps et oublier mes problèmes, car je trouve qu’il y a une bonne ambiance ». Ces fidèles clients, obnubilés par l’ambiance et le « show », oublient que leur détente et leur lieu de loisirs trouble la tranquillité du voisinage, qui après une rude journée de travail a envie de se détendre dans le cocon familial, loin de tout le stress et le brouhaha de la journée.
Qu’il plaise à bien des égards, ces maquis à proximité des habitations, s’ils ont la magie de détendre leurs adeptes, troublent aussi la quiétude des riverains et cela à cause de l’ambiance « chaude » qui y règne. Noël KABORE et bien d’autres habitants désemparés, ne savent plus à quel saint se vouer, tant ils n’arrivent plus à se reposer et à profiter de leur « havre de paix », depuis qu’un promoteur de débits de boissons a décidé d’être leur voisin. « Il est vrai que ce sont des lieux de loisirs, mais il y a de mauvais emplacements qui jouent trop sur les habitants. Par exemple, durant l’année scolaire, les élèves n’arrivent pas à se concentrer sur les études du fait de la musique. Ils sont obligés la nuit de se diriger vers les établissements pour étudier et cela avec tous les risques. Aussi, on n’arrive pas à se reposer ou à discuter avec sa famille, une fois de retour du service à cause du bruit souvent assourdissant. Donc, je vais demander au gouvernement surtout à la mairie d’ouvrir l’œil sur ce problème », explique Noël KABORE.
Certes, les débits de boissons contribuent à diminuer le taux de chômage au regard des jeunes qu’ils emploient, mais avec les manquements de certains promoteurs, il faut nécessairement que la mairie, les services sanitaires et la police municipale multiplient les contrôles. Il faut aussi une relecture de la réglementation avec tous les acteurs, notamment les promoteurs et gérants de débits de boissons afin qu’ils puissent véritablement s’impliquer et veiller à son application, car il est impératif que chacun y trouve son compte et que « ces deux voisins » ne se regardent plus en chiens de faïence.
Edwige SANOU