vendredi 6 décembre 2024

Reprise du procès du putsch manqué de septembre 2015 : les avocats de la défense dénoncent une violation de la constitution

20180319 143155Aussitôt ouverte le 27 février dernier, la première page du dossier « ministère public et général Gilbert DIENDERE et 83 autres », s’est aussitôt refermée. Les avocats de la défense avaient vidé la salle en soulevant des questions de forme, notamment l’inexistence de la chambre de jugement ainsi que la légalité et la légitimité des juges du tribunal militaire. Ce qui avait obligé le président du tribunal, Seydou OUEDRAOGO à revoir sa copie en suspendant le procès. La deuxième page de ce procès doit en principe s’ouvrir le 21 mars prochain, toujours dans la salle des banquets de Ouagadougou. A 72 h de l’ouverture des pourparlers, les avocats de la défense dénoncent une immixtion de l’exécutif dans le judiciaire et une violation de la constitution.

 

Ouvert le 27 février dernier, le procès du putsch manqué de septembre 2015 contre les autorités de la Transition, avait été suspendu après le retrait de la salle, de tous les avocats de la défense. Ces derniers contestaient non seulement des anomalies dans la procédure, mais aussi et surtout la légalité du tribunal militaire. En effet, ils avaient dénoncé une situation inconfortable liée au fait que leurs clients étaient appelés à comparaître devant la chambre de jugement qui est inexistante depuis la loi modificative de juillet 2007 qui l’avait supprimée et remplacée par la première chambre. Aussi, ils ont noté que le décret nommant les juges du tribunal militaire n’avait pas force exécutoire, puisque le délai pour son entrée en vigueur n’était pas arrivé..

Programmé reprendre, le mercredi 21 mars prochain, les couleurs de la réouverture de ce procès tant attendu par les Burkinabè ont été annoncées ce lundi 19 mars 2018 aux hommes de média par les avocats de la défense. En effet, selon Me Mathieu SOME et ses camarades, ce procès bien que suspendu pour corriger les quelques anomalies soulevées à son ouverture, risque de reprendre mercredi, avec toujours des vices de forme.

Certains actes, notamment les citations à comparaître ont été corrigées, donc les prévenus doivent pour ce mercredi, comparaître devant la première chambre et non devant la défunte chambre de jugement, comme c’était le cas le 27 février dernier à l’ouverture du procès. Cette anomalie corrigée, soulève ipso facto, une autre anomalie liée au décret.

Pour cette reprise, le grief majeur soulevé par les avocats de la défense, c’est la légitimité du président du tribunal, le magistrat Seydou OUEDRAOGO. En effet, selon les avocats de la défense, le décret nominatif de Seydou OUEDRAOGO, le fait président de la chambre de jugement, et non président de la première chambre, juridiction devant laquelle les prévenus sont appelés à comparaître. Ce qui fait que selon eux, Seydou OUEDRAOGO, en l’état actuel des choses, ne peut présider la première chambre, car n’étant pas vêtu de ses habits. Pour Me Mathieu SOME et ses camarades, la correction des actes de citations, devait aller de paire avec la reprise du décret nominatif des juges devant siéger au procès pour permettre au procès de se dérouler sans embûches. Mais, à 72h, de la reprise du procès, les avocats de la défense, s’offusquent que tel ne soit pas encore le cas. « Nous ne savons pas pourquoi, ils n’ont pas pris le soin de reprendre un autre décret. Ce qui fait que j’ai l’impression qu’il y a quelqu’un d’autre qui n’a pas intérêt que ce dossier soit jugé. Il faut qu’on arrête de dire que ce sont nos clients qui ne veulent pas être jugés », a martelé Me SOME.

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D’ailleurs, les avocats, poussent leur analyse plus loin en affirmant que Ce décret viole l’article 134 de la constitution qui dit comment les magistrats sont désignés.  En effet, selon eux, l’article 134 de la constitution stipule qu’aucun magistrat ne peut être nommé par décret. Cela doit être une décision du Conseil supérieur de la magistrature. Pour eux, nous assistons à une réapparition de ce qu’un syndicat des magistrats avait appelé le phénomène des juges acquis. « Lorsque le pouvoir exécutif fait nommer des juges et en défait d’autres, c’est  une immixtion de l’exécutif dans le judiciaire, et ce, malgré le fait qu’on s’est battu pour une séparation des pouvoirs », ont-ils déploré

Les avocats invitent par ailleurs au gouvernement à ne pas céder à la pression des organisations de la société civile (OSC), en foulant au pied la constitution ; d’où ces interrogations de la défense : « Où est leur place ? Est ce que ce sont eux qui doivent programmer les dossiers ? » Du reste, en tant que praticiens du droits, ces avocats ne comptent pas fermer les yeux sur une quelconque anomalie afin d’assurer à leurs clients, un procès juste et équitable qui permettra de faire la lumière et la justice sur ce qui s’est passé le 16 septembre 2015.

Par rapport au ministre en charge de la justice, Réné BAGORO, les avocats dénoncent qu’il soit à la fois partie civile et l’une des personnes signataire du décret nommant les juges du tribunal militaire. « Il ne peut pas nous juger par personne interposée. Il ne peut pas choisir son juge pour son procès, car c’est clair que l’issu sera sans équivoque. Ce n’est pas parce que le décret est signé par quatre personnes que cela change la donne. Pour un procès équitable, cela n’est pas permis. Et si c’est pour tenir le procès dans ces conditions, mieux vaut arrêter tout, toute de suite, et donner les sanctions », ont déclaré les avocats de la défense.

Le 21 mars prochain, ce sont donc ces questions de forme et de vice de procédure qui seront soulevées par la défense. Et pour ces avocats, le droit administratif a donné la voie à suivre pour y trouver des solutions. En effet, lorsqu’une autorité administrative prend un décret, ou un acte administratif quelconque, qui fait l’objet d’un recours, cette autorité a la possibilité de retirer son acte. Pour la défense, la balle est maintenant dans le camp des autorités pour que ce procès se tienne dans la légalité et sans embûches. D’ailleurs, Me SOME et ses camarades pour ne pas faire du dilatoire, affirme avoir écrit au Bâtonnier pour que celui-ci prenne des mesures pour régulariser la situation.

 

Candys Solange PILABRE

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