L’affaire dite de « charbon fin » d’Essakane connaît des développements depuis hier, mardi 6 août, avec la sortie médiatique du Procureur général près la Cour d’appel de Ouagadougou, Laurent Poda, qui a fait cas de poursuites judiciaires engagées contre des personnes morales et physiques et annoncé la comparution des prévenus ce jour 7 août au Tribunal de grande instance de Ouagadougou. Mais pour composition irrégulière de la juridiction spécialisée dans les infractions économiques, et à la demande des avocats des prévenus, le dossier a été renvoyé à la première audience du mois d’octobre 2019.
Nombreux étaient les citoyens, population civile comme hommes en béret noir, à prendre d’assaut ce matin la cour du Tribunal de grande instance de Ouagadougou pour assister à la comparution des personnes poursuivies dans l’affaire dite de « charbon fin » d’IAM Gold Essakane. Il était également donné de constater la présence en grand nombre d’avocats de la défense.
Mais le procès a été renvoyé au mois d’octobre car il se trouve qu’un des magistrats nommés dans le pôle judiciaire spécialisé pour les infractions économiques et financières est empêché. Par conséquent, la composition du parquet pour connaître de ces infractions était irrégulière. En outre, les avocats des différents prévenus, qu’il s’agisse des personnes morales ou physiques, ont souhaité le renvoi du jugement pour mieux prendre connaissance du dossier. Les différentes parties ont pris du temps pour déterminer à l’unanimité la date du renvoi. Le parquet a d’abord proposé le 14 août, date qui a été rejetée par les avocats de la défense. Ces derniers ont estimé que cette date ne va pas leur permettre de prendre connaissance du dossier et en plus le mois d’août, c’est la période des vacances judiciaires. Ils ont alors proposé le mois d’octobre, afin de pouvoir préparer la défense de leurs clients.
Les avocats de la partie civile, qui défendent les intérêts de l’Etat dans le dossier, quant à eux, se sont offusqués de la non-comparution de certains mis en cause.
«Nous avons constaté malheureusement ce matin qu’il y avait des personnes morales poursuivies, notamment IAM GOLD, qui n’étaient pas représentées alors que la loi pénale impose qu’elles soient assistées de leurs avocats.
Les avocats ne peuvent pas représenter une personne poursuivie sur le plan pénal. Il revient au procureur du Faso de prendre toutes les dispositions pour qu’une personne qui est citée à comparaître devant une juridiction, par respect pour cette juridiction, par respect pour la justice de notre pays, se présente d’abord devant cette juridiction», a martelé Me Edasso Rodrigue Bayala, un des avocats de la partie civile.
Quant aux avocats de la défense, en l’occurrence ceux de la société IAM Gold Essakane, par la voix de Me Moumini Kopiho ils ont longuement expliqué la non-comparution de leur client en ces termes : «C’est nous qui sommes chargés d’assurer la défense d’IAM GOLD Essakane. Notre client n’a pas comparu ce matin parce que l’audience n’était pas utile par le fait que la juridiction n’était pas régulière et nous étions venus pour demander un renvoi. La ligne de défense d’Essakane a toujours été de contester les faits qui lui sont reprochés. Essakane est une société citoyenne et fait partie des plus importantes sociétés minières au monde et au niveau du Burkina, elle est la première employeuse privée avec 2500 emplois permanents. Elle a reversé au titre de la contribution au Trésor public l’année dernière 45 milliards de F CFA. Toute la production annuelle d’or du Burkina Faso se situe autour de 50 000 kg et Essakane à elle seule produit 15 000 kg. Lorsqu’on vient dire qu’elle a fraudé pour moins de 100 kg d’or, c’est difficile à admettre d’autant plus que le charbon fin, c’est des résidus qui étaient anciennement abandonnés comme des ordures. Donc c’est Essakane qui a trouvé l’idée novatrice d’exploiter ces résidus puisqu’il y a toujours des traces d’or. Maintenant que l’on dit que ce charbon fin n’est pas un résidu mais un minerai qui contient des quantités énormes d’or, nous pensons que ce qui pourra nous départager, c’est l’expertise indépendante que nous avons demandée. Les rapports sur la base desquels on poursuit Essakane sont irréguliers et scientifiquement mensongers. Nous ne comprenons pas pourquoi ils refusent qu’un deuxième expert nous départage.»
Rendez-vous donc en octobre prochain pour la suite de cette affaire de « charbon fin » qui fait couler beaucoup d’encre au pays des hommes intègres.
Aly Tinto (Stagiaire)