Non-constitution d'infraction, absence d’éléments matériels de preuves, responsabilité pénale individuelle, clémence et acquittement du tribunal. A cette phase des plaidoiries, c’est le lexique des avocats qui assurent la défense des accusés du putsch de septembre 2015. L’audience du 05 juillet n’a pas dérogé à la règle, puisque chacun de ces avocats, arguments à l’appui, a plaidé l’acquittement de son ou de ses clients.
Maître Drissa Badini, conseil du sergent-chef Laoko Mohamed Zerbo, affirme que son client est victime d’une maladie qu’il a nommée la « Zerboïte ». En effet, lorsque le parquet ou la partie civile ne trouvait pas le nom d’un accusé, et bien c’était le nom de son client qui était cité. Un lapsus qu’il a comptabilisé onze fois. Et l’avocat de se demander pourquoi cet acharnement sur le sous-officier Zerbo. Accusé d’attentat à la sûreté de l’Etat, de coups et blessures volontaires et de meurtres, Laoko Mohamed Zerbo s’est retrouvé, selon les dires de son avocat, en Côte d’Ivoire parce qu’il était menacé de mort et non parce qu’il fuyait la justice. Pour les faits d’attentat à la sûreté de l’Etat qui lui sont reprochés, Me Badini fait observer qu’il n’existe aucun élément qui caractérise l’infraction car son client n’a participé à aucun acte constitutif. En ce qui concerne la résistance que celui-ci aurait faite pendant le désarmement, cette attitude serait due à un manque de communication et une précipitation dans le processus, censé durer trois semaines, ajoute-t-il. Pour les faits de dégradation aggravée de biens, Me Badini souligne que la responsabilité pénale ne saurait être collective, elle est personnelle et individuelle. Et en ce qui concerne son client, il assure qu’aucun élément matériel de preuve ne l’accuse comme ayant participé à la destruction du studio Abazon et de la radio Laafi de Zorgho. Et pour ce qui est de Zorgho, le conseil rappelle que le sergent-chef croyait se rendre à une mission d’escorte à Boudri ; au lieu de cela, il s’est retrouvé à la radio et n’est pas descendu de son véhicule. Appelé à la barre, l’accusé a souligné que dans les forces armées nationales, le subordonné ne décrète pas mais exécute l’ordre. Grâce à ce procès, il pourra dorénavant juger de la légalité d’un ordre avant de l’exécuter. Tout en reconnaissant ses limites humaines, il a présenté ses excuses à toute personne qu’il aurait offensée et sollicité la clémence du tribunal.
Chargé de défendre aussi l’adjudant Ardjouma Kambou, Me Drissa Badini ne voit pas pour quelle raison son client aurait posé des actes de nature à consolider le putsch, puisque le président Michel Kafando est le mari de sa tante. C’est même lui qui a pourvu à l’alimentation de celui-ci quand il était en détention. C’est sous la contrainte que l’adjudant s’est retrouvé dans l’escorte du général Diendéré, fait-il remarquer. Pour les infractions de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat et de coups et blessures volontaires qui lui sont reprochées, l’homme en robe noire affirme que son client doit purement et simplement être acquitté car il n’existe aucun élément concret qui l’incrimine et le tribunal ne saurait le condamner juste sur la base de la vraisemblance.
A sa suite, Maître Zaliatou Awoba, qui assure la défense de l’adjudant Michel Birba, a invité le président du tribunal à tenir compte du fait que le dossier à lui remis n’était pas intègre en ce sens que l’on a dû renuméroter des pièces et que des choses ont dû être soustraites ou ajoutées dans ce processus. Elle déplore également le manque d’expertise balistique, qui aurait permis de reconnaître les balles qui ont fait passer de vie à trépas les martyrs de la résistance au pronunciamiento de septembre 2015. Au lieu de cela, ce sont plutôt des expertises sur les écoutes téléphoniques qui ont été faites. A cela s’ajoute le fait qu’il a été refusé publiquement aux conseils la version électronique du procès, ce qui ne les met pas au même niveau d’information que le parquet du tribunal militaire.
Armelle Ouédraogo