A l'instar de bon nombre de villes du Burkina Faso, Bobo-Dioulasso est une cité qui a vu son secteur du transport urbain subir une profonde transformation avec l'arrivée massive, dans les années 2010, des tricycles. Ces engins à moteur, initialement dédiés au transport de bagages et de marchandises, ont vite été transformés en taxis, transportant ainsi des personnes. Au regard des accidents graves enregistrés et des nombreux dangers liés à ce mode de transport, un décret interdit, depuis 2012, aux chauffeurs de tricycles des villes de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso de transporter des personnes. Si ce décret est peu ou prou respecté à Ouagadougou, tel n'est pas du tout le cas dans la ville de Sya.
En arrivant à Bobo-Dioulasso, l'un des premiers constats que l'on fait, c'est l'omniprésence dans la circulation des tricycles communément appelés « taxi-motos ». Certains transportent des bagages, des marchandises, mais la grande majorité s'illustre dans le transport des personnes (majoritairement des femmes). Cette pratique est pourtant interdite par le décret n°2012-559 du 05 juillet 2012 portant conditions et modalités d'exploitation à titre onéreux et pour compte propre des vélomoteurs, motocyclettes, tricycles et quadricycles, en son article 4, dans les villes de Ouagadougou et Bobo-Dioulasso.
Malgré l'entrée en vigueur de ce décret depuis plus de sept ans et les nombreuses sensibilisations sur les risques d'un tel transport à Bobo-Dioulasso, la pratique perdure, pis, elle se développe de façon exponentielle. Ses principaux acteurs que sont les chauffeurs, n'ignorent pourtant pas l'interdiction qui leur est faite de transporter des personnes. « J'ai en tout cas entendu dire que c'est interdit. Mais je n'ai pas le choix. Si je ne dois transporter que des bagages ou des marchandises, le soir, je n'aurais même pas mille (1000) francs CFA dans la poche. C'est le transport des personnes qui nous fait gagner un peu d'argent » déclare Lassané ZONGO, chauffeur de moto-taxi.
Lorsque la police effectue des sorties inopinées pour faire respecter le décret, les chauffeurs de « taxi-motos » ont une parade. « Quand ils sortent pour faire des contrôles, très vite, entre chauffeurs, on se passe des coups de fils pour se prévenir afin de ne pas se laisser », confie Lassané.
Du côté des usagers, si beaucoup ignorent l'existence du décret, d’autres par contre, s’indignent de ce décret. « Interdire les taxi-motos de transporter des personnes n'est pas juste. Nous sommes pauvres et avec eux nous ne payons que cent (100) ou cent cinquante (150) francs CFA seulement. Les temps sont durs et tout le monde ne peut pas débourser trois cents (300) francs CFA pour emprunter les taxis ordinaires. C'est injuste d'interdire ce qu'ils font », explique Aminta COULIBALY, une cliente des « taxi-motos ».
Les conducteurs de taxis ordinaires, eux, sont catégoriques. Si le décret n'est pas respecté à Bobo-Dioulasso, c’est parce qu'il y a du laxisme du coté des autorités locales qui ne feraient pas assez de contrôles, car certains « taxi-motos » travailleraient sous leur coupole.
Yéssy BAKO (correspondant Bobo-Dioulasso)