La Côte d’Ivoire s’apprête à rendre un vibrant hommage à Arafat DJ, décédé le 12 août dernier à la suite d’un accident de circulation. C’est au stade Félix Houphouët Boigny, le plus grand du pays, qu’aura lieu l’événement. De grandes personnalités sont annoncées, dont le commissaire général des Kundé, Salfo Soré, plus connu sous le nom de Jah Press. Il a accordé un entretien à Radars Info Burkina avant son départ en terre ivoirienne. Lisez plutôt.
RIB : Arafat DJ n’est plus. Comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?
Jah Press : C’est dommage... C’est vrai qu’on meurt à tous les âges mais à 33 ans, c’est dommage. Il n’est pas mort sur son lit.
RIB : Quels étaient vos rapports avec Arafat DJ ?
Jah Press : J’avais des rapports avec lui comme j’en ai avec beaucoup d’autres artistes. Vous savez, je fais de l’événementiel, dont les Kundé. Je l’ai sollicité dans le cadre de mes activités. En 2010, je l’ai contacté pour une activité à Dédougou. On a signé le contrat, il a pris une partie de son cachet mais n’est jamais venu. Cela a donc créé un précédent entre nous. Après, il ne pouvait plus mettre les pieds au Burkina. Il était très sollicité à Bobo-Dioulasso, Banfora mais il ne pouvait pas venir parce qu’il savait bien que je l’attendais de pied ferme. Il a fini par expliquer+ à son père, Houon Pierre, qu’il ne pouvait pas venir à Ouagadougou car il avait un problème avec Jah Press. Son père était lui-même un artiste et un grand de la musique ivoirienne qui a travaillé avec Meiway, un autre artiste avec qui j’ai beaucoup collaboré. Houon Pierre m’a appelé pour qu’on trouve un compromis. J’ai dit à son père qu’il faut qu’Arafat respecte ses engagements quand on signe un contrat avec lui et qu’au lieu qu’il me rembourse ce qu’il me devait, il allait venir jouer aux Kundé 2011. Je l’ai invité aux Kundé en 2011 où il a remporté le prix du meilleur artiste ouest-africain haut la main parce qu’il était populaire. Il a même fait l’une des meilleures prestations lors du dîner gala. On avait, par ailleurs, programmé un spectacle à Faso Parc. Arafat passe sur les medias pour confirmer sa présence, le lendemain il y envoie son manager qui constate la grande mobilisation des enfants. L’artiste me fait alors du chantage en me signifiant que si je n’augmente pas son cachet il ne jouera pas. Ce que j’ai refusé en menaçant de l’envoyer en prison. Il se rend à l’aéroport où il tente de prendre un billet pour quitter le pays. Mais j’avais déjà contacté le commissaire de police de l’aéroport, qui l’a fait arrêter. Je l’ai rejoint et j’ai récupéré mon argent qu’il avait en sa possession avant qu’il ne prenne son vol pour Abidjan.
RIB : Au-delà de cette anecdote, peut-on dire qu’il était un artiste très capricieux ?
Jah Press : Arafat, c’était deux facettes. Il a révolutionné la musique coupé décalé. Il était l’un des meilleurs instrumentistes de ce genre musical. Il jouait de presque tous les instruments. C’était tout de même le fils de Houon Pierre, un grand ingénieur du son ! Pour le buzz, il racontait que son père ne s’était pas bien occupé de lui, mais où il a appris à jouer de tous ces instruments ? Il a eu quand même un minimum de formation à la base. Il était également un bon danseur.
RIB : Quelle est la part de contribution d’Arafat à la musique africaine ?
Jah Press : Au niveau du concept coupé décalé, Douk Saga était le créateur du mouvement, il aimait la belle vie et autres. Arafat a révolutionné le mouvement. Il a hissé le coupé décalé à un plus haut niveau que Douk Saga.
RIB : Sa mort a suscité de nombreuses réactions. En êtes-vous surpris ?
Jah Press : Non, parce que je savais déjà ce qu’il représentait. Plusieurs jeunes qui ont connu une enfance difficile sans leur père avec leur mère qui les a abandonnés pour refaire sa vie et beaucoup d'autres personnes se reconnaissent en lui.
RIB : En tant qu’observateur avisé de la musique burkinabè, estimez-vous qu’un artiste de ce pays peut avoir le même profil qu’Arafat et vivre un succès retentissant ?
Jah Press : Non ! La société burkinabè ne tolère pas les écarts de comportement. Les Burkinabè veulent des artistes ayant un comportement de prêtre. Pourtant un artiste, c’est également les folies. Il faut souvent faire un choix entre l’artiste et son œuvre. Par exemple, un artiste comme Koffi Olomidé est toujours dans des frasques. Est-ce pour autant qu’il n’est pas un grand chanteur ?
Un artiste comme Floby ne fera pas au Burkina le tiers de ce qu’Arafat a fait en Côte d’Ivoire en termes de comportement.
Pema Neya (Stagiaire)