Le dernier conseil des ministres de l’année 2018, a vu l’adoption d’un décret portant gratuité de la planification familiale. La mesure de gratuité qui sera effective dès le 1er juin 2019, coûtera au gouvernement la bagatelle de 6 milliards 271 millions 328 milles francs CFA. Selon le gouvernement, elle vise l’amélioration de la qualité de vie des populations à travers la réduction de la mortalité infantile et maternelle et l’amélioration des conditions économiques de la famille. L’adoption de ce décret est fortement appréciée par les acteurs des structures œuvrant pour la promotion des droits sexuels et reproductifs, qui y voit une grande avancée.
Cécile THIOMBIANO/YOUGBARE, juriste, analyste des politiques de santé : « C’est un grand pas, un pas de leader, une parole donnée, une promesse tenue. C'est le signe et les critères de dirigeants convaincus et engagés pour le droit de leur peuple. Le gouvernement burkinabè est à féliciter pour cette décision politique forte et courageuse qui est l'adoption du décret portant gratuité de la planification familiale au Burkina Faso. Malgré les défis qui se présenteront toujours (financement, accessibilité géographique, logistiques contraceptives, adhésion des populations...), l'application effective de ce cadre juridique aura des bénéfices pour la santé de la femme et de l'homme. Elle permettra aux personnes d'avoir les écarts voulus et adéquats entre les grossesses, tout en réduisant le risque de morbi-mortalité infantile et maternelle. Le nombre de grossesses non désirées et d’avortements à risques va aussi régresser. Vivement que tous les acteurs œuvrant pour les droits en PF, pour le financement et le suivi des politiques publiques de santé s'engagent aux côtés des autorités ».
Belele Joseph IDO, chargé de programmes à Réseau africain jeunesse santé et développement au Burkina Faso : « Il faudrait d’abord que la décision soit concrétisée, car la gratuité avait déjà été annoncée pour 2018, mais cela n’a pas pu se faire. Pour nous acteurs œuvrant pour l’accès des populations à des services de planification familiale de qualité, l’adoption de ce décret est une victoire car la question a fait l’objet de plusieurs actions de plaidoyer. Nous estimons que c’est ainsi que nous pourrons amorcer le dividende démographique tant recherché. Si la gratuité est effective et que les gens vont vers les services de santé pour cela, nous pouvons aboutir à quelque chose. Un autre aspect important à prendre en compte est l’accessibilité géographique et sociale. Pour ce qui est de l’accessibilité géographique, pour les méthodes de longue durée par exemple tous les agents de santé ne sont pas habilités à offrir ces services. Même si la méthode est gratuite et que la femme ne peut pas y avoir accès cela pose toujours problème. C’est vrai qu’il y a la délégation des tâches qui est envisagée mais il n y a pas plus de précisions là-dessus pour le moment. Si elle est effective, cela peut favoriser cette gratuité car même au niveau des CSPS, les femmes auront accès aux méthodes de longue durée. Par rapport aux jeunes, il faut des services adaptés avec des centres où ils pourront aller sans être discriminés avec un bon accueil. La gratuité annoncée est déjà un grand pas qu’il faut reconnaitre, mais il ne faut pas oublier d’autres paramètres. La mesure annoncée va coûter plusieurs milliards de nos francs, quelle est la part contributive du budget de l’Etat ? Parce que si la contribution de la partie nationale ne dépasse pas celle des partenaires au développement, nous risquons un jour d’assister à un revirement de situation où la gratuité sera délaissée au profit d’autres priorités. Il faut donc prendre des dispositions pour que cette gratuité soit effective et bénéfique à longue durée aux populations ».
Moukailou OUEDRAOGO, président du Réseau des Jeunes Ambassadeurs pour la planification familiale : « Par cette gratuité, le gouvernement burkinabè vient assurer le respect d'un de ces engagements en faveur de la planification familiale. Par cet acte, les barrières liées au coût des produits contraceptifs seront levées. La population de manière générale, les jeunes et adolescents en particulier pourront se procurer les produits contraceptifs de leur choix. Cependant une chose est d'adopter le décret relatif a cette gratuite, une autre est de veiller aussi à la disponibilité des produits contraceptifs de manière effective ».
Célestin COMPAORE, coordonnateur SOS Jeunesse et Défis : « C’est une très belle décision qui va permettre l’accès des femmes à la contraception et d’améliorer la qualité en matière de prestations. L’adoption de ce décret va aussi permettre aux femmes qui ont besoin de services de planification familiale et qui n’en ont pas les moyens d’y avoir accès. Toute chose qui va améliorer les conditions de la femme de manière globale. Une chose est de rendre gratuit les services, mais une autre est de créer la demande au niveau communautaire et de s’assurer aussi que ce n’est pas une décision politique. Et notre rôle en tant qu’acteurs de la société civile, sera de vérifier l’effectivité de la gratuité sur le terrain pour les femmes qui en exprimeront le besoin. Un autre aspect important c’est notre accompagnement à apporter au gouvernement pour la mise en ouvre de cette mesure de gratuité, cela, en travaillant à créer la demande au niveau communautaire à travers la sensibilisation et à mobiliser des ressources pour soutenir l’action du gouvernement. En tant que société civile, nous devons accompagner ».
Armelle OUEDRAOGO