La dépigmentation a la peau dure au Burkina Faso. Connue comme étant une pratique féminine, le phénomène touche désormais la gente masculine. La dépigmentation masculine prend de nos jours une ampleur inquiétante. Certains hommes semblent ne pas pouvoir résister au désir de changer la couleur de leur peau pour paraître « beau ».
L’un des nouveaux critères de la beauté masculine semble être lié au blanchissement de la peau. Complexe, effet de mode ou choix esthétique, les justifications varient d’une personne à une autre. JB, jeune coiffeur âgé de 23 ans, qui préfère garder l’anonymat, nous a confié qu’il a débuté la dépigmentation très tôt à l’âge de 10 ans. « J’oignais mon corps avec les produits éclaircissants de mes grandes sœurs. C’est par la suite que j’ai remarqué les effets sur moi, j’ai pris goût et je suis allé payer pour moi. Actuellement ça me plaît je me sens à l’aise avec », a-t-il expliqué.
JB, témoigne également que l’entretien du corps n’est pas seulement réservé aux femmes. Les produits qu’il utile embellissent son corps. « Je fais le mélange des pommades moi-même avec les huiles éclaircissantes, je n’utilise pas les tubes et ça rend ma peau jolie».
Selon lui, les meilleurs résultats sont facteurs d’une routine d’entretien du corps. « J’utilise les produits éclaircissants seulement les nuits. Les matins, j’utile des huiles essentielles naturelles. Pour ce qui est du savon je l’utilise à chaque fois que je me douche ».
Toutefois, le résultat n’est pas tout à fait à l’attente de JB, cela à cause du climat qui souvent est source de problèmes. « Le soleil nous rend la tâche difficile. Au moment de la chaleur il y a des boutons, des fards, des taches noires qui apparaissent sur mon corps. En ces temps de chaleur j’ai arrêté d’utiliser les produits éclaircissants pour rependre à la saison pluvieuse ».
Si la dépigmentation passe quasiment pour naturelle chez les femmes, elle suscite souvent dégoût lorsqu’elle est pratiquée par les hommes. « Une femme qui se dépigmente déjà je ne cautionne pas donc pour un homme c’est insensé. Je trouve qu’il est ridicule et inconscient », déplore Oumou KONATE. Pour elle, c’est juste un effet de mode. Avec le phénomène de l’homosexualité au Burkina, a-t-elle expliqué, les jeunes se sont laissé embarquer dans la dépigmentation pour plaire et attirer.
Il en de même pour Bouba TRAORE qui qualifie cette pratique de « manque d’acceptation de soi ».
Quoi qu’il en soit, le phénomène de la dépigmentation évolue avec son lot de conséquences les unes aussi désastreuses que les autres. Les produits utilisés contiennent souvent des substances telles que le corticoïde ou l’hydroquinone.
Les acnés, les brûlures, les mycoses et les eczémas ne sont que la partie visible de l’iceberg. La dépigmentation ne limite pas ses conséquences à la simple complication au niveau esthétique. Les produits utilisés augmentent les risques d’hypertension artérielle, de diabète et de cancer de la peau… Sur le plan social, ce phénomène peut être également une source d’exclusion et stigmatisation.
Préserver sa peau c’est préserver son identité. Il est temps que les Burkinabè voire les Africains s’approprient leurs identités culturelles et acceptent leur peau noire. Ils doivent retrouver les voies de la véritable beauté africaine magnifiée par le poète sénégalais Léopold Sedar Senghor lorsqu’il affirme ceci : « quand je suis né, j’étais noir ; quand j’ai grandi, j’étais noir…quand je mourrai, je serai noir ».
Judith TCHIMADI