Il est fortement conseillé de manger au moins cinq fruits et légumes par jour, pour leur apport nutritionnel riche en fibres, en vitamines et minéraux. Les fruits, il n’en manque pas à Ouagadougou tout comme dans les autres villes du Burkina. Certains étals de fruits donnent simplement envie d’en consommer au regard des belles couleurs qu’ils présentent. Cependant, force est de reconnaître que des produits chimiques sont utilisés par les vendeurs/euses pour accélérer le processus de mûrissement de la plupart des fruits. Cette pratique n’est pourtant pas sans effets sur la santé humaine.
Autrefois, c’est le carbure de calcium, plus connu sous l’appellation « carbure », qui était utilisé dans le processus de maturation des fruits. Aujourd’hui, il est remplacé par l'éthéphon, communément appelé Callel 480 SL. Le produit est mesuré et mélangé à de l’eau en fonction de la quantité des fruits. Le mélange ainsi obtenu est aspergé là-dessus et les fruits recouverts d’une bâche ou de pagnes pendant deux à quatre jours et le pari est gagné.
Il intervient dans le mûrissement de fruits comme la banane douce, la papaye, la mangue et l’avocat pour ne citer que ceux-ci.
Le Callel 480 SL est un régulateur de croissance de maturation, concentré soluble. Il est doté de propriétés systémiques et dérive de l'acide phosphorique.
Une jeune fille, une vacancière vendant aux côtés de sa mère, nous a confié que « certains fruits comme les mangues et les avocats arrivent non mûrs » quand nous lui avons demandé dans quel état leurs fruits sont achetés avant d’être vendus. Sans pour autant le nommer, elle a affirmé qu’un produit est utilisé dans le processus de maturation. Excepté cette jeune fille, aucune vendeuse n’a voulu s’exprimer sur le sujet.
Bien qu’indispensables à la santé, les fruits sont de plus en plus impropres à la consommation parce que leur maturité a été forcée. Leurs nutriments deviennent, dans ce cas, de moindre qualité et ils perdent de leur saveur.
En outre, même s’il est de moins en moins utilisé pour faire mûrir des fruits, le « carbure » semble encore utilisé pour accélérer la cuisson des pois de terre en vue de réduire les coûts en bois de chauffe.
Aux abords des voies publiques ou dans les quartiers, l'on constate que les pois de terre sont vendus chaque jour par les restauratrices « par terre ». Dès 6 h chez certaines et à partir de 12 h chez d’autres, cette légumineuse surnommée « journée continue », compte tenu du fait que ceux qui en consomment peuvent tenir pendant d’interminables heures, est prête au bonheur de la clientèle.
Or, dans les familles, le pois de terre est généralement préparé au-delà d'un jour pour une bonne cuisson.
Ainsi, on ne peut s’empêcher de se demander comment ces femmes arrivent à faire cuire les pois de terre pour les vendre au quotidien. Une question à laquelle nous n’avons pu obtenir de réponse adéquate.
Même si certaines vendeuses ont confié qu'elles mettent le pois de terre au feu la nuit en y ajoutant de la potasse, ce temps suffit-il pour que dès 6 h du matin il soit prêt ? À l'issue d'échanges avec une ancienne du domaine, celle-ci a révélé que pour « accélérer la cuisson, généralement c'est le carbure qui est utilisé comme potasse et en 2 h tout au plus, c’est prêt ».
Dans la foulée, une autre dame présente lors des échanges a également témoigné que lors des préparatifs d'une cérémonie de baptême, pour accélérer la cuisson de la viande, une plaquette de paracétamol a été déversée dans la marmite.
Un problème de santé public auquel les services d'hygiène et de santé doivent véritablement s’attaquer pour préserver la santé des citoyens, car ces pratiques tuent à petit feu.
Recourir aux produits chimiques pour accélérer la cuisson d’aliments ou le mûrissement de fruits est très nocif pour la santé, indique le Dr Ousmane Ouédraogo, nutritionniste. Selon lui, l’usage du carbure dans la préparation de certains repas est un danger pour la santé.
« En effet, le carbure peut provoquer une intoxication pouvant entraîner des migraines, des troubles de la concentration et de la mémoire, des vertiges et des nausées, une irritation de la peau, des lésions des muqueuses du nez et des yeux, des symptômes respiratoires et des crampes musculaires ou encore des troubles de l'humeur et une fatigue inhabituelle », a-t-il énuméré.
L'éthéphon (callel 480 SL) utilisé dans le processus de maturation forcée des fruits et légumes est également dangereux pour la santé humaine. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), en 2022, l'éthéphon a été classé comme légèrement dangereux. « Il peut provoquer la diarrhée, des crampes d'estomac ou l'augmentation de l'appétit », a précisé le médecin qui préconise plutôt la technique biochimique pour faire mûrir les fruits, car c’est une méthode naturelle.
Flora Sanou