dimanche 24 novembre 2024

Violences au Sénégal : « On aurait pu éviter cela en ne tombant pas dans l'abus de pouvoir » (Dieudonné Tankoano, sociologue enseignant-écrivain

zsocio uneLe tribunal de grande instance de Dakar a condamné l’opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse » le jeudi 1er juin 2023. Ce verdict, c’est le moins qu’on puisse dire, a embrasé le Sénégal. On y enregistre en effet des pertes en vie humaine et des blessés. Dans cet entretien, Dieudonné Tankoano, sociologue, enseignant et écrivain, affirme que ces tensions auraient pu être évitées si on n'était pas tombé dans l'abus de pouvoir au pays de la Teranga.

Radars Burkina : Comment avez-vous accueilli la condamnation par la justice de l'opposant sénégalais Ousmane Sonko ?

Dieudonné Tankoano : La condamnation par la justice de l'opposant Sonko du Sénégal est la conséquence de son engagement ferme et infaillible en tant qu'opposant et espoir futur de la jeunesse sénégalaise. Rappelez-vous qu'il avait été condamné à 6 mois avec sursis dans le même ordre pour d'autres fait. En Afrique les opposants authentiques sont pris pour ennemis à abattre par les tenants du pouvoir. C'est regrettable.  Cela résulte autrement d'ambitions dictatoriales pour les auteurs de cette haine.

Radars Burkina : Cette condamnation exclut Ousmane Sonko de la course pour les élections de 2024 car selon la loi sénégalaise, quand on est condamné à plus de trois mois de prison ferme, on devient inéligible. Êtes-vous d'avis avec ceux qui disent que ce qui arrive à Sonko est une cabale purement politique ?

Dieudonné Tankoano : "La germination de la plupart des végétaux commence par la floraison" pour vous dire que cette condamnation a pour but de de salir sa réputation, impacter son capital humain et briser sa carrière politique. Évidemment la suite c'est de l'exclure des élections prochaines pour demeurer l'unique maître du palais sans égal. Je me demande ce que vaut la démocratie pour l'Afrique. Juste une gangrène. Je veux juste dire qu’exclure Sonko des élections de 2024 est un abus politique à but ostentatoire dictatorial et malhonnête de la part des auteurs. Macky Sall vaut mieux que ça. J'ai envie de croire que le pouvoir est une drogue corruptible qui rend ivre. Ce n'est pas au Sénégal seulement. L’Afrique dans son ensemble souffre de l'application d'une réelle contradiction de position. La preuve en est que même au Burkina les gens sont contraints à tout applaudir s'ils ne veulent pas avoir le régime en place sur leur dos. L'opposition n'est pas permise en Afrique.

zsocio 2Radars Burkina : Quelle est votre appréciation des violentes manifestations au pays de la Teranga ?

Dieudonné Tankoano : C'est avec regret et consternation que j'observe les dernières émeutes qui ont lieu au Sénégal. On aurait pu éviter en ne tombant pas dans le complexe d'abus de pouvoir. A cette allure les acquis de l'Afrique depuis les indépendances sont sans doute remis en cause. Si Wade avait abusé de son pouvoir en enfermant Macky Sall opposant en son temps et en l'empêchant de se présenter comme candidat il ne serait point président aujourd'hui.

Radars Burkina : On parle de déjà de mort d'homme dans ces heurts.  Pensez-vous que le Sénégal pourrait être au bord du précipice si les manifestations perdurent ?

Dieudonné Tankoano : Pourquoi les politiciens africains font de la gestion du pouvoir un bien privé ? J'ai des connaissances au Sénégal et je sais que cette jeunesse veut du nouveau pour garantir son avenir. Est-ce Sonko en prison aujourd’hui, le probable Messi ? Qui sait.

 Même si ce qui s'y passe est regrettable sachez que l'élan de la jeunesse ne sera jamais freiné tant qu'elle n'a pas atteint son objectif, celui d'opérer le changement. Le pouvoir de Macky Sall est inquiété. Ces jeunes ne vont pas rengainer.

Radars Burkina : Quelle est votre analyse de la situation politique du Sénégal ?

Dieudonné Tankoano : Je préconise le dialogue à temps entre les deux camps pour trouver un consensus et sauver les acquis d'investissement de ce beau pays qu'est le Sénégal. Quant à la jeunesse, qu'elle use de tact et d'intelligence pour ne pas se faire du tort. Les édifices qu'elle détruit sont conséquence des efforts des générations passées. Il faut les épargner.

Le plus regrettable est que ces événements ont commencé à prendre une tournure inquiétante. Je parle de mort d'homme. Jusqu'à quand la jeunesse va arrêter de s'immoler pour des faits politiques. C'est regrettable. Ni Sonko ni Macky Sall n'est mort ni même blessé c'est la jeunesse qui est prise pour bouclier. Jeunesse africaine ouvre l'œil !

Propos recueillis par Flora Sanou

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