Au Conseil des ministres du 25 janvier 2023, le gouvernement a adopté un rapport relatif à l’organisation d’une opération de contrôle de présence, de service fait et des éléments de rémunération des agents de l’Etat. Cette opération, selon l’exécutif, s’inscrit dans le cadre des mesures d’assainissement du fichier de paie et se fait tous les cinq (5) ans au plus, conformément à la norme Programme d’examen des dépenses publiques et d’évaluation de la responsabilité financière (PEFA). Elle vise également à s’assurer de la réalité des effectifs payés et de la régularité des éléments de rémunération perçus par chaque agent. Suite à cette décision, une équipe de radarsburkina.net a tendu son micro à quelques agents du public pour recueillir leurs avis. Tous pensent que l’opération causera un manque à gagner dans les caisses de l’Etat.
Sur le sujet, T.R., inspecteur en télécommunications, pense que les contrôleurs doivent s’intéresser à ce que les agents font dans les services avant de vouloir contrôler leur présence. « Il y a plusieurs agents qui ne viennent pas au travail ou qui quittent le service parce qu’ils n’ont rien à faire. Il y a certains qui n’ont même pas de bureau », affirme-t-il. « On ne s’attaque pas à ça ! Est-ce que les gens vont venir s’asseoir pour ne rien faire ou bien c’est leur présence seulement que le gouvernement veut ? Est-ce que le travail est bien réparti ? Est-ce que les agents ont de quoi faire au bureau ? Est-ce que les chefs des services travaillent normalement à responsabiliser les agents ? Est-ce que les directeurs, les ministres jouent leur rôle ? » s’interroge notre interlocuteur.
Selon lui, c’est la réponse à ces interrogations qui permettra de savoir que tel agent n’a pas exécuté son travail ou qu’il ne vient pas au travail.
Il révèle qu’il y a plusieurs ministères où rien ne marche parce que quelquefois, il n'y a pas de budget pour travailler.
« Je ne sais pas comment ils vont résoudre le problème d’absentéisme mais il faut que les décideurs soient responsabilisés », a-t-il souhaité.
Par ailleurs, T.R. estime que cette opération va permettre de déceler les agents fictifs parce qu’« il y a certains qui sont décédés, d’autres ont eu un autre emploi mieux rémunéré, il y en qui ont pris des disponibilités et sont partis sans signaler. Mais les salaires de toutes ces personnes continuent d’être virés dans leurs comptes ».
Pour K.T., conseiller d’éducation, il est bien de faire des contrôles pour vérifier si les agents sont toujours là. Cela permettra non seulement de déceler les postes vacants mais aussi, en termes de finances, de mettre fin aux salaires qui étaient attribués injustement à des agents fictifs. Sa conviction est que cette opération de contrôle favorisera le service bien fait, car les agents seront amenés à bien faire leur travail. Cependant, il s’inquiète de la procédure de l’opération. « Si ce sont quelques agents du ministère de la Fonction publique ou des personnes qui seront recrutés pour sillonner dans les différents services sur toute l’étendue du territoire, l’opération pourrait réussir. Mais si c’est pour demander aux agents de venir au ministère comme cela a été le cas en 2015, ou si c’est pour aller dans les directions régionales ou provinciales, cela occasionnera beaucoup de déplacements des agents et au regard de la situation sécuritaire, les terroristes peuvent en profiter pour faire davantage du mal », a-t-il dit.
Quant à P.L., technicien supérieur en génie civile, il trouve l’initiative bonne. Cela va contraindre, d’après lui, certains bureaucrates à être disciplinés, à respecter les horaires de travail et à exercer convenablement leur tâche. « Lorsque nous prenons l’exemple d’un agent du privé qui demande une permission d’1h à son supérieur pour résoudre un problème dans un service public, ce dernier peut arriver trouver que l’agent qui doit s’occuper des dossiers est absent de son poste. La plupart du temps, c’est sans autorisation d’absence, ni cas de force majeure alors que cet agent est probablement assis en train de boire la bière. L’agent du privé sera obligé de repartir et le lendemain, c’est le même scénario », se justifie-t-il.
A son avis, cette opération va permettre d’éviter ‘’les lourdeurs administratives’’, car l’absentéisme ne fait pas avancer un pays.
Tout compte fait, P.L. estime que l’Etat a sa part de responsabilité puisque certains agents n’ont pas d’occupations au bureau, même si cela n’est pas une bonne raison.
« Des agents viennent passer la journée en spectateurs. Ainsi, dès qu’il y a une opportunité d’activité hors du service, ceux-ci vont y aller. Un agent qui vient s’asseoir du matin au soir et n’a rien à faire, c’est comme si l’État le payait pour qu’il soit présent seulement », a-t-il soutenu.
Flora Sanou