Les instruits de l’ancienne génération ont exercé tout dans leur domaine professionnel. C’est le cas du professeur titulaire en sciences de l’information à la retraite Serge Théophile Balima. De journaliste à la télévision nationale, où il a fait des reportages même pendant la guerre Burkina-Mali, il devint ministre de l’Information avant de passer à la recherche pour devenir Pr titulaire. Dans le monde du journalisme, ce sont des milliers de professionnels qui sont passés à son école. Septuagénaire aujourd’hui, l’homme semble avoir toujours la fougue de servir le milieu de la presse burkinabè. Portrait
Né le 1er février 1949 à Bobo-Dioulasso, Serge Théophile Balima est aujourd’hui professeur titulaire à la retraite. Après le Baccalauréat philosophie-lettres, il est admis à faire du journalisme à Strasbourg en France. Après deux années dans cette université, il va chercher à poursuivre l’aventure dans une université pour convenance personnelle. « J’ai senti qu’il y avait un certain nombre de choses qui ne me convenaient pas. J’ai donc demandé à transférer mes dossiers à l’université de Bordeaux où avec un de mes camarades, aujourd’hui disparu, Yaya Drabo, nous avons fait un parcours sans heurts jusqu’au doctorat », a expliqué le professeur. Ce doctorat de troisième cycle n’étant pas suffisant pour lui, Serge Théophile Balima fera un doctorat d’Etat 10 ans après. De retour en Haute-Volta, il est affecté comme fonctionnaire de l’Etat à la télévision nationale où il va gravir tous les échelons jusqu’au poste de directeur de la télévision. A l’avènement de la révolution, le leader de cette révolution va l’appeler auprès de lui pour s’occuper des relations avec la presse internationale. « C’était un homme très organisé qui avait également bien organisé son service de communication et moi j’étais chargé des relations avec la presse internationale », renseigne-t-il.
Son poste à la présidence ne le dédouanait pas cependant de son travail à la télévision nationale où il continuait à servir, à la demande du président Sankara. « Cela m’a amené à faire beaucoup de reportages avec lui à l’extérieur et j’ai eu aussi l’opportunité de participer à des opérations de guerre avec le Mali, hélas, et on allait sur le front pour faire des reportages de guerre. Et chaque fois que je devais y aller, je faisais mes adieux aux membres de ma famille parce que je n’étais pas sûr de revenir vivant », raconte-t-il. Après la révolution, Serge Théophile Balima va se retrouver, par ce qu’il appelle « le jeu des circonstances ou un accident de l’histoire », ministre de l’Information et de la Culture puis ambassadeur du Burkina en France pour faciliter la compréhension entre Paris et Ouagadougou, qui n’était pas au beau fixe. Il va réussir sa mission à Paris qui fut tout de même périlleuse avec les assassinats qu’il y avait dans le pays et la grogne sociale. « C’était la période la plus difficile de ma vie parce que aussitôt arrivé à Paris, il y avait des problèmes avec Henry Zongo, Lengani et j’étais tout le temps interpellé par les Affaires étrangères de France qui ne comprenaient pas cette brutalité qui était utilisée comme méthode de gouvernement. Je n’ai pas eu de chance et encore y a eu la catastrophe avec l’assassinat du Pr Clément Oumarou et là aussi, j’ai été interpellé parce que j’étais en même temps délégué permanent du Burkina Faso auprès de l’UNESCO. Il fallait tout le temps aller s’expliquer sans pouvoir défendre les assassinats », se souvient-il.
C’est après cette période que le titulaire de deux doctorats décide de se lancer dans la recherche à l’université de Ouagadougou : d’abord comme assistant, puis maître-assistant, maître de conférences et enfin professeur titulaire.
Dans le combat pour la liberté de la presse, la période qui a le plus marqué le professeur était celle sous le Conseil national de la révolution (CNR), où certains révolutionnaires voulaient appliquer une sorte de centralisme démocratique pour faire taire les voix discordantes. « C’était un combat difficile, mais le capitaine Sankara était un homme très ouvert qui acceptait tous les points de vue », confie-t-il. Le Professeur ajoute qu’il l’avait d’ailleurs sympathiquement surnommé « le Parisien » à cause de ses habitudes vestimentaires. C’est d’ailleurs son intransigeance sur le bien-fondé de la pluralité des points de vue qui l’a conduit à la tête du ministère de l’Information et de la Culture, où il a aussitôt cherché à élaborer un code de l’information qui serait semi-libéral afin de permettre à l’initiative privée de se développer. C’est d’ailleurs sous son ministère que des médias comme L’Observateur paalga ont vu le jour et cela a ouvert la voie à d’autres médias.
A la retraite aujourd’hui, le Pr Balima se dit toujours disponible pour accompagner les professionnels à travers des avis, des conseils, etc. Il a d’ailleurs mis en place un bureau d’études conseil pour venir en appui aux structures qui ont besoin de réflexion et d’orienter leur communication.
Etienne Lankoandé