Le délibéré du procès Kamao a été rendu ce mardi 4 octobre à la chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance (TGI) Ouaga I. Poursuivi pour « outrage à un dépositaire de l’autorité publique », il a été reconnu coupable et condamné à 6 mois de prison ainsi qu’à une amende de 300 000 FCFA, le tout avec sursis.
Les juges ont rejeté toutes les requêtes formulées par les conseils d’Ollo Mathias Kambou, alias KAMAO, et l’ont reconnu coupable. Ainsi, il a été condamné à 6 mois de prison ainsi qu’à une amende de 300 000 FCFA, le tout assorti de sursis. Me Guy Hervé Kam, l’un des avocats de KAMAO, a dit son mécontentement du verdict prononcé. Il a remis en cause la procédure de justice, qu’il a qualifiée d’injuste, tout en rappelant le rôle du juge.
« Le premier rôle du juge dans un Etat, c’est de protéger les droits de l’homme, et la procédure a été établie pour la protection des droits de l’homme. Dans le cas de Kambou, la procédure a été royalement violée par la police judiciaire. Quand on vient devant le juge et qu’il donne corps et vie à une procédure viciée, je pense qu’aucun Burkinabè ne doit se sentir en sécurité quand les juges ne font pas de leur office l’occasion de sanctionner les mauvaises procédures. KAMAO a été séquestré, il a été placé en situation de détention arbitraire. Il a été interrogé dans ces conditions. C’est inadmissible que les juges refusent d’annuler cette procédure », a-t-il affirmé.
Pour ce faire, tout le conseil, de concert avec l’accusé, ira devant les juridictions internationales s’il le faut car n’ayant pas l’intention de s’en tenir à la décision des juges, a informé Guy Hervé Kam. « Nous sommes sûr que dans cette affaire, nous n’en resterons pas là. S’il faut aller devant les juridictions internationales, nous le ferons certainement », a-t-il signifié.
« Je crains tout simplement que cette décision n’ait pas été rendue à cause des préjugés selon lesquels si on le libère, si on ne le condamne pas, les gens penseront que c’est parce que le lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba n’est plus au pouvoir. J’espère que ce n’est pas le cas. J’espère que la décision a été rendue en toute âme et conscience et qu’avec ou sans le Lt-col Damiba , les juges auraient rendu la même décision. Mais je ne peux pas sonder les cœurs des juges pour savoir ce qui les a conduits à rendre cette décision. Je constate tout simplement qu’en la rendant, ils sont totalement passés à côté de leur rôle », telle a été la réponse de Me Guy Hervé Kam lorsque des journalistes lui ont demandé s’il s’attendait à un verdict autre que celui qui a été rendu avec le départ de l’ex-président Damiba du pouvoir.
Pour le responsable à l’organisation et à la coordination du mouvement le Balai citoyen, Zinaba Rasmane, les militants de cette organisation de la société civile respectent cette décision de justice, certes, mais ils ne comptent pas en rester là car, précise-t-il, toutes les possibilités seront explorées pour que KAMAO soit lavé de tout soupçon et qu’aucune condamnation ne lui soit appliquée. « Nous nous sommes mobilisés pour obtenir la libération sans condition de notre camarade », a ajouté Zinaba.
«Le fait que ce procès sur la liberté d’opinion se soit soldé par cette condamnation ne nous satisfait pas. Nous, en tant que militants et au-delà de tout en tant que Burkinabè, attachés aux valeurs de liberté d’expression et à la liberté d’opinion, nous estimons que ce verdict n’est pas satisfaisant à cette étape parce que notre revendication reste la même, notamment concernant la liberté d’opinion au Burkina », a-t-il déploré.
« Le verdict a été rendu ; nous respectons cette décision de justice mais à partir de cet instant, c’est une deuxième étape qui commence pour que véritablement notre camarade soit lavé de tout soupçon, qu’aucune condamnation ne lui soit appliquée », a-t-il signifié.
Interrogé sur la déchéance de Damiba, à cause de qui KAMAO a été condamné pour avoir critiqué la gestion du pouvoir de celui-ci, il répond : « Si vous voulez interpréter cela comme KAMAO déclencheur d’une dynamique, libre à vous. Mais il reste que notre constance dans la lutte, de Blaise Compaoré jusqu’à Damiba, va rester la même. Nous sommes une organisation de veille citoyenne, nous sommes une force de pression et de propositions et tout ce qui va toucher à la gouvernance, aux droits fondamentaux, nous allons rester debout et mobilisés pour que ces droits soient respectés et pour qu’il y ait une bonne gouvernance. »
En rappel, le jugement d’Ollo Mathias Kambou a eu lieu le 23 septembre 2022. Le délibéré était prévu pour le 30 septembre 2022, mais ce jour a été marqué par le début du coup de force.
Flora Sanou