Le Conseil national de la défense a décidé de rassembler les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) au sein d’une brigade pour de meilleurs résultats dans la lutte contre le terrorisme. Le format est bien mais la formule magique pour un engagement patriotique du peuple n’a pas été encore été trouvée. Même quand l’idée trouve sa source dans la période révolutionnaire au Burkina Faso, elle s’en éloigne aussi bien dans le fond que dans la pratique.
Sous la Révolution démocratique et populaire au Burkina Faso, plusieurs actions portées par les leaders de la révolution ont suscité une forte adhésion des populations. Après la révolution, on a dénombré plus de réalisations que pendant les 27 ans de présidence de Blaise Compaoré. Des barrages, des écoles, des centres de santé et autres infrastructures sociales ont été construits grâce à la mobilisation populaire. L’Etat se contentait d’apporter l’appui technique, les ingénieurs et la matière première. Sous la révolution, la création des CDR, qui étaient porteurs de projets de l’Etat, a permis de résoudre beaucoup de problèmes de société tels que la malnutrition, la soif, la propagation de maladies et l’analphabétisme. Les exemples d’engagements patriotiques pendant cette période révolutionnaire sont légion. Tout cela a été possible grâce à une adhésion des populations, qui étaient en phase avec les actions gouvernementales de l’époque. Comment ont-ils réussi à susciter de tels engagements de la part des populations ? La réponse est toute simple : le peuple était en communion avec son autorité. L’autorité comprenait son peuple et tentait d’aller exactement dans le sens voulu par ce dernier et de gouverner par l’exemple et avec patriotisme. Si aujourd’hui au Mali, l’engagement autour de Goïta est plus poussé qu’au Burkina, c’est parce qu’il a mis en œuvre la volonté de son peuple, il a écouté le cri du cœur des intellectuels panafricanistes, le refus de la compromission.
Revenons au Burkina Faso pour dire qu’en 2018, le pouvoir du MPP s’est inscrit dans la logique des CDR, en créant les VDP. Mais sur le terrain de la mobilisation des populations, c’est un échec. Même si le problème de moyens est brandi comme raison, la confiance que les populations placent aux porteurs des projets est un facteur fondamental. Pourtant au Burkina Faso, il s’est creusé un écart d’incompréhension entre le pouvoir public et les populations, entre les populations des villes et celle des campagnes et enfin entre les instruits et les non-instruits. Alors on imagine la difficulté des gouvernants à expliquer clairement aux populations la source, l’identité et les capacités de l’ennemi en face. Qui les a amenés ? d’où viennent-ils ? Peut-on les tuer tous ? Telles sont les questions qui alimentent le débat dans nos campagnes. Les populations estiment que seuls les gouvernants savent d’où vient l’ennemi, seuls eux disposent des moyens militaires nécessaires pour le vaincre. Et ce qui rend pire cette incompréhension, c’est l’absence de l’Etat quand des populations sont en détresse. Dans cet état des faits, il est tout à fait compréhensible que nos populations soient réticentes à l’appel de l’Etat.
En effet, cette idée des VDP est un appel patriotique aux populations à lutter pour leur propre survie. Chaque citoyen peut et devait être volontaire de quelque manière que ce soit. Cependant, chaque citoyen ne trouve pas en l’autorité le patriotisme sankariste, qui l’approche du gouverné qu’il est. Ces autorités qui font leur appel à la résistance depuis la capitale sont absentes lorsque les contrées prises en tenailles par des groupes terroristes crient au secours. Alors arrêtons de remettre en cause le patriotisme des populations burkinabè. Tous les peuples sont capables de patriotisme tout comme ils le sont quand il s’agit d’incivisme. Cependant, le patriotisme d’un peuple dépend de son leader ou de celui qui le gouverne.
Etienne Lankoandé