Le procès Thomas Sankara et 12 autres s’est poursuivi ce mercredi 22 mars au tribunal militaire de Ouagadougou, délocalisé à la salle des Banquets de Ouaga 2000. Au cours de l’audience du jour, les avocats de la défense, en l’occurrence Mes Natacha Kaboré, Mamoudou Sombié, Maria Kanyili et Hien Ollo Larousse, ont plaidé la cause de leurs clients, à savoir Yamba Elisé Ilboudo, Nabonswendé Ouédraogo, Bossobè Traoré et Ninda Pascal Tondé.
Maître Natacha Éliane Kaboré a plaidé pour l'acquittement de son client Yamba Elisé Ilboudo qui, d'ailleurs, n’a pas nié les faits et, mieux, a donné des détails sur le drame du 15 octobre 1987 au Conseil de l'entente, lui qui était le chauffeur du chef du commando Hyacinthe Kafando, qui a donné l'assaut. Les avocats de la partie civile avaient même félicité l’accusé pour cela. Pour maître Kaboré, il ne faut pas condamner quelqu’un qui a obéi à un ordre légal, celui de conduire son chef (NDLR : Kafando). Elle ajoute que son client est devenu veuf pendant qu’il était en prison.
L’accusé Nabonswendé Ouédraogo, lui, a été défendu par Me Mamadou Sombié. Après avoir dressé la biographie et le portrait moral et physique du capitaine Thomas Sankara, l’avocat a affirmé que le procès a été mal préparé et mal monté. Pour lui, les vrais coupables sont là mais on ne cherche pas à les interroger. A son avis, le tribunal pouvait prendre des mesures pour que Blaise Compaoré soit entendu par un juge ivoirien. Maître Sombié déclare par ailleurs que l’intitulé « Procès Thomas Sankara et 12 autres » n’est pas juridiquement normal. Il soutient qu’il ne s’agit pas d’un procès de morts mais de vivants. La preuve, ce n’est pas ceux qui sont morts qu’on juge mais les vivants. Selon lui, on aurait pu dire « Procès Blaise Compaoré et autres ». Si c’est de Blaise Compaoré aussi qu’on a peur, qu’on dise « Procès Hyacinthe Kafando et autres », a-t-il indiqué. S’agissant des chefs d’accusation qui pèsent contre son client, l’homme en robe noire les rejette en bloc, soutenant que l’attentat à la sûreté de l’Etat est prescrite et qu’il n’y a pas de preuves contre Nabonswendé. Par conséquent, il rejette les témoignages de Yamba Elisé Ilboudo et d’Eugène Somda qui soutiennent que Nabonswendé faisait partie du commando qui a assassiné Thomas Sankara et ses compagnons. Maître Sombié a donc plaidé pour l’acquittement de son client ou, le cas échéant, une condamnation avec sursis.
Après Me Sombié, ce fut le tour de Me Maria Kanyili de défendre l’accusé Bossobè Traoré, poursuivi pour complicité d’assassinat et attentat à la sûreté de l’Etat. Membre de la garde rapprochée du président Thomas Sankara, Bossobè est accusé d’avoir donné l’alerte au commando qui a assassiné le père de la révolution et ses compagnons. Des faits que son avocate a rejetés en martelant que le dossier est seulement basé sur les déclarations de témoins, ce qui, d’après elle, n’est pas une preuve concrète. Elle a poursuivi en affirmant que Bossobè entretenait de bonnes relations avec Thomas Sankara, donc qu’il ne peut avoir trahi ce dernier. En raison de cette relation avec Sankara, Bossobè aurait même gardé la tenue de sport qu’il portait le 15 octobre 1987 pour témoigner son attachement au président, une tenue de couleur verte que l’avocate a brandie dans la salle. Maître Kanyili plaide pour l’acquittement de son client au bénéfice du doute ou pour infraction non constituée et, dans le pire des cas, pour une condamnation avec un sursis.
Me Ahoga Zalyata, quant à elle, a défendu l’accusé Idrissa Savadogo, poursuivi pour attentat à la sûreté de l’Etat et assassinat. Son client est accusé d’avoir fait partie du commando qui a assassiné Thomas Sankara et ses 12 compagnons le 15 octobre. L’avocate rejette les faits, soutenant qu’il y a des contradictions dans les déclarations des témoins, donc pas de preuves contre son client. C’est pourquoi elle plaide pour la prescription subsidiaire et la non-constitution des faits.
C’est Me Hien Ollo Larousse qui a défendu Ninda Pascal Tondé, accusé de subornation. Ce dernier aurait été envoyé par le général Diendéré pour dire à Zetyenga de ne pas révéler la vérité s’il est interrogé par le juge sur le drame survenu le 15 octobre 1987. Mais Zetyenga avait pris le soin d’enregistrer la conversation sur son téléphone. Son avocat rejette les faits et plaide pour son acquittement. Suspendue, l’audience reprend le jeudi 24 mars.
Barthélémy Paul Tindano