Le procès Thomas et 12 autres, débuté le 11 octobre dernier, tire inexorablement à sa fin. En effet, les réquisitions du parquet militaire ont pris fin ce mardi 8 février 2022 à la chambre criminelle du tribunal militaire de Ouagadougou. 30 ans de prison, c’est la peine requise contre Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando, absents du procès. 20 ans contre le général Gilbert Dienderé, Nabonswendé Ouédraogo, Bossobè Traoré et Idrissa Sawadogo, 11 ans contre Yamba Elisé Ilboudo. Il a été requis 11 ans avec sursis contre Jean-Pierre Palm et 3 ans de prison plus 900 000 F CFA d’amende contre Ninda Pascal Tondé. En revanche, le parquet militaire plaide pour l’acquittement de Tibo Ouédraogo, Zakalia Démé et Albert Pascal Belemgniliga pour infractions non constituées et celle des médecins Hamado Kafando et Alidou Jean Christophe Guébré pour prescription de l’action publique.
S’il y a des accusés dont les peines requises ne satisfont guère la partie civile à ce procès, c’est bien Jean-Pierre Palm ainsi que Tibo Ouédraogo. En effet, Jean-Pierre Palm est considéré comme l’un des acteurs-clés des événements du 15 octobre 1987 par un grand nombre de témoins. 11 ans de prison avec sursis, c’est ce qu’a requis contre cet officier supérieur de gendarmerie à la retraite le parquet militaire. Mais de l’avis des avocats des victimes, le prévenu mérite plus que cela comme peine. Par contre, la partie civile trouve que le parquet devrait atténuer la peine d’un accusé comme Yamba Elisé Ilboudo, car c’est l’accusé qui a accepté d’avouer sa participation aux événements, chose qui a permis de comprendre comment les choses se sont passées il y a 35 ans.
« On est en partie d’accord avec les peines requises par le parquet, notamment en ce qui concerne certains accusés comme Blaise Compaoré et Gilbert Diendéré… Ce qui nous pose problème, c’est le quantum des peines, même si on est de la partie civile (…). Nous estimons qu’au regard de l’implication de Jean-Pierre Palm dans l’affaire, requérir contre lui 11 ans assortis de sursis alors qu’on a requis par exemple 11 ans ferme contre un accusé comme Yamba Elisé Ilboudo qui a permis vraiment à la juridiction de savoir tout ce qui s’était passé à la date de 15 octobre pose problème. L’autre élément concerne le cas Tibo Ouédraogo. Le parquet a estimé qu’il n’y avait pas d’élément de nature à mettre en accusation aujourd’hui l’intéressé. Or, nous savons bien que Tibo Ouédraogo est la personne qui a été désignée comme étant celle-là même qui devait exécuter le président le 2 octobre », déclare Julien Lalgo de le partie civile.
Même son de cloche chez Mariam Sankara, épouse du défunt président Thomas Sankara. « Ce que je déplore, c’est la peine requise contre Jean-Pierre Palm (NDLR : 11 ans avec sursis requis). Je ne sais pas pourquoi le sursis, mais on verra bien. J’espère que le tribunal va corriger cela parce qu’il y a beaucoup d’éléments quand même qui montrent sa culpabilité. En outre, il y a Tibo Ouédraogo qui a été acquitté (…). On attend la délibération pour voir quel sera le verdict », a déclaré la veuve Sankara.
La défense, quant à elle, reste confiante car ce ne sont, tout compte fait, que des réquisitions. « Même les parties civiles n’ont pas demandé une quelconque vengeance, elles ont demandé que justice soit faite et je pense que dans la balance de la justice, on doit mettre tous les éléments pour prendre ce genre de décision. Bon ! Ce ne sont que des réquisitions, elles sont soumises à la juridiction et jusqu’à présent nous faisons confiance à cette juridiction. Nous faisons confiance à la justice pour nos clients. Nous espérons que les peines, au final, seront un peu plus clémentes que celles demandées par le parquet », soutient pour sa part Me Aouga Compaoré.
Suspendue, l’audience reprendra le 1er mars par les plaidoiries de la défense, après lesquelles interviendra le verdict final.
Barthélémy Paul Tindano