Face aux députés pour son exposé sur la situation de la nation le jeudi 16 mai 2019, le Premier ministre a épluché entre autres les questions sécuritaire, économique et sanitaire. Radars info Burkina a recueilli quelques avis et appréciations de citoyens à l’issue de ce speech du chef du gouvernement.
Adama Sosso, député : « C’est un discours sur la situation de la nation donc naturellement il doit présenter les réalisations et les difficultés que traverse le gouvernement dans l’exécution de son programme. Il va sans dire qu’avec les difficultés qu’il y a aujourd’hui sur le terrain, notamment la crise sécuritaire, le résultat ne peut pas être positif puisque tout le monde reconnaît que même les déplacements sont difficiles. Il n’y a pas suffisamment de financements, les bailleurs de fonds ne se bousculent plus. Donc cela a une répercussion sur l’ensemble des projets qui doivent être exécutés. Donc naturellement nous sommes en deçà de nos attentes. On ne peut pas parler de reprise de l’activité économique, de nos jours si vous partez dans les villages, les communes et autres, il y en a beaucoup qui sont inaccessibles, donc le commerçant même pour se déplacer pour aller chercher des marchandises et autres n’arrive plus à le faire. Donc l’activité économique ne peut pas prospérer, je dirai même qu’il y a un recul à ce niveau. En ce qui concerne la trêve sociale, c’est une question d’engagement et de sincérité dans la discussion. Quand vous discutez avec des partenaires sociaux il suffit d’être sincère. Ceux qui sont dans les syndicats et autres sont des Burkinabè, ils comprennent donc la situation du Burkina Faso. Si vous êtes sincère avec eux, normalement la trêve ne devrait même pas se discuter, dans la situation actuelle d’insécurité. Mais quand on fait des promesses qu’on n’arrive pas à honorer à quoi ça sert, parce que quand vous prenez des engagements, il faut les réaliser. Nous avons l’impression que le gouvernement fait beaucoup plus dans le dilatoire : quand il voit que ça chauffe, il prend des engagements, le temps de calmer un peu en étant convaincu qu’il ne pourra pas les réaliser et c’est cela qui le rattrape tout le temps ».
Alfred Kam, journaliste : « C’est un discours qui a été suffisamment clair, et bien articulé, mais dans le fond, il y a des questions qui sont restées en suspens et qui ont été soulevées par les députés des différents groupes parlementaires. Il y a des choses qui ont été dites qui méritaient d’être éclaircies. J'ai également apprécié la manière dont les éléments de réponse ont été donnés aux questions, même si le Premier ministre n’est pas allé directement dans les détails des questions. Il a répondu par secteur en disant de façon claire ce que le gouvernement a pu faire, même si c’est en dehors d’une cartographie permettant aux députés de vérifier les réalisations faites. A mon avis, c’est une présentation qui est acceptable. Elle a permis également de se rendre compte qu’il maîtrise vraiment le pays ».
Serge Bayala, étudiant : « Je pense que c’est une pratique traditionnelle connue des Etats qui se sont affiliés à la démocratie. A chaque gouvernement qui arrive le Premier ministre se soumet à cet exercice, c’est d’abord quelque chose de très classique et très connu, c’est familier à ce qui s’intéresse à la gouvernance démocratique. Quand on compare les discours des Premier ministres Paul Kaba Thiéba pour les fois où il a été reconduit depuis la première à celle de Marie Christophe Dabiré on voit une similitude incroyable dans la reprise, la répétition des projets. On a par exemple dans le dernier discours à la nation de Paul Kaba Thiéba, le projet de construction d’amphithéâtres de 1000 et 1500 places, dans le même axe du discours prononcé par Marie Christophe Dabiré on retrouve trait pour trait cette spéculation. Je veux tout simplement dire que mon impression reste inchangée, les émotions restent les mêmes quand on sait que ces défis ont été relatés plusieurs fois à travers des discours. Je pense que le surplus de son action et de sa sincérité par rapport à ses propos officiels contenus dans son discours viendra de sa capacité à traduire cela en actes ; en dehors de cela, je pense que c’est la même littérature ».
Alice Tuina, communicatrice : « À mon avis, le Premier ministre Christophe Marie Joseph ne s'est pas démarqué de son prédécesseur en ce qui concerne les chiffres avancés et le vécu des Burkinabè. Pendant que le gouvernement se jette des fleurs, le peuple voit ses conditions de vie se dégrader de jour en jour. Le fossé entre le sommet et la base s'agrandit de jour en jour. Il y a une crise de confiance entre gouvernés et gouvernants et le laxisme au sommet de l'Etat sur certains maux ne fait qu'accentuer cela. Je suis restée sur ma soif en ce qui concerne les actions fortes à mener pour calmer la fronde sociale et améliorer le vivre-ensemble. Même si le PM a annoncé des avancées concernant le drame de Yirgou, beaucoup de choses restent à faire pour que les Burkinabè puissent à nouveau manger sereinement ensemble dans le même plat. C'est un Premier ministre qui s'est voulu rassurant et optimiste, mais la situation est devenue telle que sans action concrète, il sera difficile pour lui de convaincre et de bénéficier de la confiance des uns et des autres ».
Propos recueillis par Edwige Sanou