Triple Z, de son vrai nom Ousmane Zaré, est un artiste burkinabè résidant en France. Danseur, chanteur et rappeur, il est adepte de fusion. Il est influencé par le rap, le reggae et la world music. Son inspiration, il dit la tirer du vécu quotidien et s’investit pour le bien-être de son prochain, que ce soit au Burkina ou ailleurs. Après «Le soleil brille pour tous» en 2010, Triple Z sort en 2016 un album solo de 8 titres, « Là d’où je viens », qui est bien accueilli au Burkina Faso et en France. Afin de rendre hommage à Nick Domby, artiste burkinabè renommé décédé à Paris le 11 septembre 2004, Triple Z a décidé de reprendre un de ses titres, "M'paatayé", en featuring avec Bassitey Négroïdes. Dans cet entretien qu’il nous a accordé, il est question de sa carrière artistique, du showbiz burkinabè et de son engagement social.
Radars info Burkina (RIB) : Comment êtes-vous venu à la musique ?
Triple Z (TZ) : Ce sont les encouragements d'un ami d'enfance qui m'ont motivé à écrire mes propres textes de rap au départ. Par la suite, il y a eu le chant. Ce fut avec un ami avec qui je faisais de la danse funk ou du break dance, aujourd'hui appelée danse hip-hop. Un jour, j'ai été invité à faire une prestation play-back du titre « Matière grasse contre la Matière grise » de Mc Solar dans un bar de notre quartier, et en mêlant rap et danse, ma prestation a été celle qui a le plus marqué les gens dans le bar.
RIB : Qu’est-ce qui vous a motivé à reprendre le titre « M'paatayé » de Nick Domby ?
TZ : Avant de répondre à cette question, j'aimerais rendre un vibrant hommage à cet illustre homme, à son caractère et à son humanisme. L'une des raisons qui m'ont poussé à reprendre le titre « M'paatayé », c’est que l’histoire qu'il raconte dans le titre est une situation vécue personnellement et je sais qu’aujourd'hui encore beaucoup de jeunes vivent cette situation, tant chez les hommes que chez les femmes. Le personnage dans cette chanson refusait déjà la femme que les vieux depuis le village lui avaient trouvée, quoiqu’elle fût belle, puisque n'ayant pas les moyens économiques de s'en occuper. Ce qui marque déjà une évolution des habitudes et des attitudes. C'est un titre qui résiste au temps parce qu'il relate une situation qui n'est malheureusement pas près de disparaître malgré l'évolution des mentalités, que ce soit en Afrique ou ailleurs.
RIB : Comment êtes-vous arrivé à collaborer avec Bassitey Négroïdes?
TZ : J'ai cherché sur YouTube, sur Itunes et sur Amazon le titre « M'paatayé » de Nick Domby mais je ne l'ai trouvé nulle part. La seule version de cette chanson que j'ai pu trouver sur Itunes, c'était une reprise d'un artiste burkinabè vivant en France et dont je ne me souviens plus du nom. Alors, j'ai fait un post dans un groupe Facebook dédié à l’émergence de la culture burkinabè dont Bassitey fait partie pour demander si quelqu'un aurait par hasard cette chanson dans sa collection musicale parce que je ne la trouve nulle part. Bassitey m'a écrit en privé pour me demander, si je trouvais la chanson, de lui en faire profiter parce qu'il est un grand fan, tout comme moi, de Nick Domby. Par chance, des gens, particulièrement un ami animateur et Dj et un animateur radio, m’ont tous deux envoyé la version que je cherchais. J'en ai fait part à Bassitey et je lui ai dit ce que j’avais comme projet. Il m'a tout de suite demandé de lui accorder deux jours pour qu’il me propose quelque chose. C’est ainsi qu’ensemble nous avons fait le single.
RIB : Avez-vous en projet un nouvel album ?
TZ : Un nouvel album, ça me tente bien, mais je ne vis pour le moment pas de la musique. Après quelques expériences de sorties d'albums, dont « Le soleil brille pour tous » et « Là d'où je viens », je ne vois plus de la même manière les choses. Mais si j'ai un projet bien élaboré avec les moyens financiers qui vont avec, je le ferai.
RIP : Depuis combien de temps résidez-vous en France ?
TZ : Officiellement je suis en France depuis 9 ans. Entre 2005 et 2010, j’y allais déjà mais pour des tournées de danse, des concerts avec mon groupe Waguess Family ou pour rendre visite à des amis. Ensuite j'ai eu une proposition d'embauche pour travailler dans le social, ce qui m'a permis d'obtenir un visa de travail et grâce à cela, je suis officiellement reconnu comme résident depuis 2010.
RIB : Comptez-vous y rester définitivement ?
TZ : J'ai beaucoup de choses à faire au Burkina Faso, tant pour les artistes et la culture que pour ma famille. Je ne souhaite donc pas m’établir définitivement en France et je ne pense pas non plus rentrer définitivement au Burkina Faso avant ma retraite.
RIB : En quoi consiste votre engagement dans le social ?
TZ : J'ai occupé plusieurs postes dans le social : coordonnateur de projet en santé publique dans la lutte contre le VIH, animateur de musique dans un centre socioculturel, médiateur urbain et, aujourd'hui, agent éducateur dans un foyer de jeunes travailleurs. J’ai donc un engagement social qui a pour objet premier le bien-être de mon prochain, ce depuis le Burkina Faso où j'ai créé le « Collectif 11 49 » pour les jeunes qui avaient envie d'évoluer dans la danse ou la musique, avant de faire le choix de vivre en France où cet engagement ne m'a jamais quitté.
RIB : Quelle appréciation faites-vous du showbiz burkinabè?
TZ : Nous sommes aujourd'hui en passe de devenir le pays de la sous-région où il y a le plus d'artistes chanteurs et je ne peux qu’apprécier cela. Mon seul regret est que depuis longtemps, espérons voir un artiste burkinabè qui sortira du lot pour être connu sur l'échiquier mondial comme certains artistes de pays voisins. Nous avons encore beaucoup à faire à ce niveau. Mais je suis convaincu que cela arrivera bientôt si nous prenons le temps de construire des bases solides.
Propos recueillis par Aly Tinto (Stagiaire)