Il fait partie des artistes comédiens burkinabè les plus visibles sur plusieurs médias nationaux et internationaux. Eugène Bayala, dit Oyou, s’est révélé au public par sa talentueuse façon d’incarner les ivrognes, les policiers et bien d’autres personnages dans les films. Radars info Burkina est allé à sa rencontre. L’acteur de cinéma parle, dans cet entretien, de son parcours, de son actualité et de ses projets.
Radars Infos Burkina (RIB) : Comment se porte l’agent Oyou ?
Oyou : Je me porte très bien ainsi que ma carrière. Aujourd’hui c’est le week-end, donc j’en profite pour rencontrer mes fans.
RIB : Comment êtes-vous venu à la comédie et à l’humour ?
Oyou : J’ai fait mes premiers pas dans le théâtre en 1977. A cette époque, j’étais encore au primaire et déjà j’étais dans les troupes de théâtre de mon école et de l’église. En 1981, j’ai fait ma première mise en scène. Depuis 1992 j’ai été dans plusieurs troupes de théâtre qui m’ont formé. Et en 2001, Missa Hébié, dont je salue la mémoire, a remarqué mon talent et m’a retenu lors d’un casting pour une série. Plus tard en 2005, il m’a encore retenu pour le premier épisode de la série télévisuelle « Commissariat de Tampy » ainsi que les autres épisodes. C’est cette série qui m’a révélé au niveau international. J’ai joué dans une quarantaine de films mais la série « Commissariat de Tampy » est celle à qui je dois ma célébrité. Elle m’a permis de jouer en France, en Belgique en Côte d’Ivoire, au Mali…
RIB : On remarque que vous jouez très souvent le rôle d’alcoolique et vous le jouez tellement bien qu’on pourrait même penser que vous êtes un ivrogne dans la vraie vie.
Oyou : C’est justement cela, l’art ! C’est le fruit de plusieurs années de formation et d’expérience. D’ailleurs, je joue plusieurs rôles et un acteur doit être capable d’incarner réellement son personnage. Plusieurs séries ratées ont de bons scénarios mais les acteurs ne sont pas formés à la mise en scène et il faut se former parce que les téléspectateurs ne sont pas dupes : si vous jouez mal votre rôle, ils le verront et vous le diront. Il faut avoir le sens de l’observation des comportements des gens, car même le rôle d’ivrogne il y a plusieurs façons de le jouer d’autant plus qu’il y a plusieurs types d’ivrognes. Pour savoir tout cela, il faut que l’acteur se forme.
RIB : Parlant de formation, que pensez-vous de la nouvelle génération de comédiens, surtout avec les réseaux sociaux ?
Oyou : Beaucoup sont pressés et cherchent à avoir ici et maintenant la même célébrité que les anciens. Pourtant, certains parmi nous ont une expérience de 20 à 30 ans, voire plus. En ce qui me concerne, j’ai marché de Karpala à Gounghin en sandales trouées avec des cacahuètes comme déjeuner pour aller jouer au théâtre et repartir à la maison autour de 3h du matin. Tout cela, afin d’acquérir de l’expérience. Aujourd’hui, il existe beaucoup d’écoles de formation et de troupes. Il faut que les jeunes se forment s’ils veulent être performants. C’est à ce prix qu’ils seront respectés aux niveaux national et international.
RIB : Justement, comment vous êtes considéré à l’international ?
Oyou : Ailleurs, on nous respecte. Je ne dis pas qu’on ne nous respecte pas au Burkina, mais quand nous nous rendons par exemple en Côte d’Ivoire, au Mali et même en Europe, nous sommes très respectés et bien accueillis. A titre d’exemple, j’ai été reçu sur le plateau de C-midi à la RTI. Souvent des enfants, du dos de leur mère, nous appellent avec joie par notre nom quand ils nous voient. Même nos collègues de l’étranger nous admirent pour notre talent, mais le traitement n’y est pas.
RIB : Selon vous, le traitement des acteurs n’est pas décent ?
Oyou : Comparez vous-même la vie d’un acteur burkinabè, celle d’un acteur ivoirien ou nigérian et vous verrez que la différence est grande. Pourtant, nous avons des acteurs très talentueux qui jouent aussi bien que ces acteurs d’autres pays là, mais qui vivent dans la misère. Au Nigeria, il y a même une cité pour les acteurs. Mais malgré toutes ces difficultés, on se bat pour le cinéma burkinabè partout dans le monde.
RIB : Le Fespaco a célébré ses 50 ans cette année. Que pensez-vous du cinéma burkinabè ?
Oyou : On devrait aujourd’hui avoir une chaîne de télévision Fasollywood pour la production et la diffusion des films du pays. Regardez : les USA et le Nigeria ont des chaînes pour la diffusion. Nous sommes la capitale du cinéma, mais nous n’avons pas de chaîne de télévision. Ce n’est pas sérieux ! On ne peut pas comparer une production qui a coûté 1 franc à une autre qui a coûté 100 F. On ne recrute pas un comédien par affinité ni par plaisir mais pour sa compétence. Il faut également que les producteurs recrutent des comédiens bien formés et qu’ils leur accordent un traitement décent.
RIB : Quels sont vos projets ?
Oyou : J’ai mis sur pied une maison de production et je compte réaliser une série. Je profite de votre micro pour lancer un appel aux bonnes volontés à m’aider à réaliser cette série.
RIB : Pour terminer, un mot à l’endroit de Chocho, que nous allons interviewer bientôt ?
Oyou : Bon ! Actuellement je l’ai mis en prison (rires). Il faut que je donne l’autorisation de le libérer avant qu’il puisse vous accorder une interview.
Propos recueillis par Pema Neya