Alexandre Sankara fait partie des députés du Parlement de la CEDEAO qui ont fait la déclaration de Dakar, dans laquelle ils appelaient les présidents africains à se défaire du franc CFA au profit d’une monnaie commune sous-régionale plus souveraine. Un vieux projet qui remonte au début des années 1960. Cet appel semble avoir été entendu puisque les chefs d’Etat ont adopté récemment au Nigeria l’Eco comme future monnaie commune de l’Afrique de l’Ouest. Radars Info Burkina est allé à sa rencontre.
RIB : Il y a quelques mois, vous avez fait une sortie médiatique au cours de laquelle vous avez invité les chefs d’Etat de la CEDEAO à abandonner le franc CFA. Un appel qui semble avoir été entendu.
AS : Effectivement, nous avons eu une session des parlementaires ouest-africains à l’issue de laquelle nous avons fait ce que nous avons appelé « déclaration de Dakar », dans laquelle on a invité les chefs d’Etat à tout mettre en œuvre pour que la deadline de 2020 pour la création de la monnaie unique pour l’Afrique de l’Ouest soit respectée. Et nous pensons que cet appel a été entendu, car il y a eu d’abord les Conseils des ministres qui ont adopté le nom de la monnaie, à savoir l’Eco ; ensuite ils ont adopté le taux de flexibilité de cette monnaie puis la conférence des chefs d’Etat pour sa concrétisation.
RIB : Quel sera le fonctionnement de cette monnaie, quand on sait que les pays anglophones ont un Trésor public qu’ils contrôlent en grande partie eux-mêmes, alors que les pays francophones de la zone franc ont une dépendance vis-à-vis du Trésor public français ?
AS : Il y a beaucoup de choses qui se disent sur cette monnaie : tantôt on dit qu’il y aura deux banques centrales (une banque pour les anglophones et une autre pour les francophones), ce qui sera un recul ; d’aucuns disent même que les francophones dépendront toujours du Trésor public français. Pourtant, toutes ces questions ne sont pas encore tranchées ni précisées, donc il ne faut pas tomber dans la spéculation. Mais la naissance en cours de l’Eco est une victoire d’étape.
RIB : Ces dernières années, des mouvements de jeunes activistes panafricains se sont intensifiés contre le franc CFA. Pensez-vous que l’Eco répondra à leur vision ?
AS : Nous voulons une monnaie souveraine, flexible, indépendante, qui ne dépend pas d’un quelconque pays extérieur aux pays membres de la CEDEAO et nous pensons que cette création est une étape. Mais il faut rester vigilant. Il faut que les activistes et mouvements de jeunes sur le continent continuent de faire pression sur nos chefs d’Etat pour qu’on aboutisse à une monnaie dont nous avons le contrôle.
RIB : Au niveau du Parlement de la CEDEAO, qu’est-ce que vous prévoyez concernant la création de cette monnaie ?
AS : Nous allons certainement, avec nos collègues députés de la sous-région, demander aux techniciens de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) de nous expliquer le fonctionnement de cette monnaie afin qu’on voie si elle correspond à la vision des populations à qui nous allons rendre compte à notre tour, et ensuite nous pourrons continuer à faire pression sur nos présidents pour son aboutissement.
Pema Neya (Stagiaire)