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JNLP : La liberté de presse en régression au Burkina

jnlp uneLa célébration de la 24e édition de la Journée nationale de la liberté de presse (JNLP) s’est tenue ce jeudi 20 octobre 2022 à Ouagadougou. Certains acteurs du secteur de l’information se sont prononcés sur l’état de la liberté de la presse. Un rapport a également été présenté sur l’état de la liberté de la presse en 2021.

La liberté de la presse au Burkina Faso semble en régression, le pays occupant le 41e rang sur 180,  selon un classement de Reporter sans frontières. A l’occasion de la Journée nationale de la liberté de la presse, le rapport sur l’état de celle-ci courant 2021 a été présenté par le Dr Lassané Yaméogo, chercheur en information et communication au Centre national de la recherche scientifique et technologique (CNRST). Selon lui, ledit rapport indique une régression sans précédent de l’indice de la liberté de la presse.

Ce recul est dû aux actes de violation de la liberté de la liberté de la presse. Par exemple en 2021, il y a eu l’assassinat de deux journalistes espagnols à l’est du Burkina Faso, dans l’exercice de leurs fonctions. Toujours en 2021, il y a eu l’enlèvement d’animateurs de radio à l’Est et au Sahel.

A cela s’ajoutent le saccage des installations de radios communautaires et la coupure d’Internet intervenue en novembre 2021 ainsi qu’en janvier 2022. Au-delà de tout cela, il y a la question du traitement salarial des journalistes parce qu’une formation de qualité suppose qu’évidemment celui qui la porte à la connaissance de l’opinion soit indépendant des pouvoirs établis, des lobbies et des forces politiques établies.

jnlp2Malheureusement, il se trouve que le constat est qu’il y a une précarité qui met les journalistes dans une situation où l’exercice de la liberté de la presse se trouve un peu dévoyée. Face au contexte actuel du pays, il sied d’améliorer les textes et lois pour faciliter l’exercice du métier de journalisme, selon Abdoulaye Diallo.  « Les nouvelles autorités disent qu’elles veulent aller vite et nous leur demander d’aller vite pour faire adopter ces textes et lois que nous avons relues pour empêcher les lourdeurs administratives dont elles parlent afin que les journalistes ne soient plus bloqués et qu’ils aient plus facilement accès à l’information pour faire leur travail ; car, la matière première du journaliste, c’est l’information. Donc il a besoin d’y avoir accès », soutient Abdoulaye Diallo.

A son avis, quand on permet aux journalistes d’exercer le métier librement, c’est une sorte de pression qu’on leur met. Ainsi, la meilleure façon, le meilleur service qu’on puisse rendre aux journalistes, c’est de créer les conditions de liberté d’exercice de leurs fonctions, créer un environnement favorable à l’exercice du métier.

Interrogé sur la liberté d’expression des journalistes burkinabè, Boureima Salouka, journaliste-formateur, estime que le journaliste burkinabè est assez libre mais certaines contraintes l’empêchent d’être totalement libre dans le sens d’exercer convenablement son métier au service des citoyens. Parmi ces contraintes, il y a les conditions matérielles dans lesquelles les journalistes évoluent avec des salaires qui ne permettent pas de s’épanouir tant individuellement que professionnellement. Il y a aussi l’arsenal juridique souvent qui empêche les journalistes de donner les meilleurs d’eux-mêmes avec des restrictions, notamment avec cette situation sécuritaire qui est fortement dégradée.

jnlp3Enfin, il y a l’ensemble des contraintes liées à notre société où jusqu’à présent, nombreux sont des Burkinabè qui n’ont pas encore compris ce qu’est un journaliste, quels sont son rôle et son utilité. Ainsi, ils ont une tendance à vouloir régenter ces journalistes, à les menacer comme ce à quoi nous assistons ces derniers temps dans notre pays. Outre ces contraintes, d’autres facteurs entrent en jeu. En effet, selon Boureima Salouka, la situation est rendue difficile pour les journalistes en ce sens que la pratique journalistique au Burkina est beaucoup plus du journalisme institutionnel où malheureusement les hommes de médias sont à la remorque des autorités où les organisations de la société civile qui organisent à longueur de journée des conférences de presse où généralement il n’y a pas grand-chose à dire. Au regard de cela, « il faut que les journalistes se disent eux-mêmes que ce n’est pas aux autres de tenir le micro et la plume et d’écrire à leur place. C’est à eux de pouvoir déterminer c’est quoi une information, qu’est-ce qui est important, qu’est-ce qui mérite d’être sur la place publique », a-t-il souligné.

Cependant, « cela est rendu difficile dans un contexte où on a l’impression qu’il n’y a pas d’autorité directe qui s’adresse aux journalistes en ce sens qu’il y a des évènements qui se passent où les journalistes ont besoin d’informations mais il n’y a pas de répondant. Cela laisse place à la rumeur et à tout ce qu’il y a comme désinformation qui contribue malheureusement à tout ce que nous avons comme problème aujourd’hui ».

Pour améliorer les conditions de travail des journalistes burkinabè, Boureima Salouka pense qu’il y a beaucoup de choses à faire.

« Il y a beaucoup de choses à faire pour améliorer les conditions de travail des journalistes parce que ce n’est pas uniquement au niveau des autorités qu’on travaille à améliorer le cadre juridique d’exercice du métier de journalisme », a-t-il avancé.

Pour lui, l’ensemble de ceux qui sont promoteurs de médias doivent réfléchir à des modèles économiques qui soient beaucoup plus innovants et adaptés à la réalité de notre pays pour permettre à ces entreprises d’être viables mais pas être viables dans le sens que de faire du profit et ne pas être au service des citoyens parce qu’être journaliste, c’est être au service des citoyens.

Par ailleurs, les journalistes ont eux-mêmes un grand effort intellectuel à faire :  celui d’être humbles, d’aller à l’écoute des citoyens et aussi d’accepter de s’engager à produire l’information de qualité de terrain et dans les langues nationales pour la majorité des citoyens qui ne comprennent pas français.

Flora Sanou