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Province de la Gnagna : Focus sur ces territoires dits terroristes

terrOn les qualifie de territoires terroristes, une façon de traduire leur "appartenance" aux groupes armés terroristes, qui s’en sont rendus maîtres. Ces localités, qui sont des villages de la province de la Gnagna, comme tant d’autres au Burkina, ont échappé au contrôle de l’Etat burkinabè depuis environ quatre années. Capi (nom d’emprunt) nous a rappelé la situation qui prévaut dans son village, situé au sud-est de la province.

La montée en puissance de l'armée burkinabè ressassée par le gouvernement est un leurre pour certaines localités du pays. Dans la Gnagna, région de l'Est, dans plusieurs villages c'est le statu quo, si ce n'est pire. C’est le cas de Souloungou, village de la commune de Liptougou dont les écoles sont fermées depuis 2018. Depuis lors, les habitants et les terroristes vivent ensemble et ce sont les derniers cités qui dictent leur loi dans cette partie de la province, voire dans toute la commune. Aucune représentation de l'Etat n’étant plus présente dans cette contrée, les villageois sont autorisés à vaquer à leurs occupations sans être inquiétés mais à deux conditions. La première, selon un natif de la localité que nous nommons Capi, c’est qu'ils ne mettent pas en place des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), sous peine de subir le même sort que Solhan en juin 2021, ou d’autres encore dans la Komondjari. Le cas de Solhan, dans le Yagha, hante encore les villageois, qui ne croient pas que l’Etat sera capable de les protéger du courroux des Groupes armés terroristes (GAT). La seconde exigence de ces terroristes, toujours selon Capi, c’est que les villageois ne collaborent jamais avec les Forces de défense et de sécurité (FDS), au cas où ces derniers investiraient la province. Tant que ces deux conditionnalités sont respectées, les villageois n'ont rien à craindre des « maîtres des lieux ». Mais s’agissant de la seconde condition, les terroristes eux-mêmes avaient assuré aux populations qu’aucune force de défense n’oserait s’aventurer dans la localité, qu’ils considèrent désormais comme leur propriété. Ces ainsi que ces individus armés imposent leur diktat dans lesdites zones, commettant parfois des atrocités sur les pauvres populations abandonnées à leur triste sort. « En fin 2021, les terroristes sont venus égorger deux personnes à Koguina en prétextant que ces derniers étaient des voleurs », s’indigne Capi. Il ajoute qu’un autre a été « cloué à son pantalon » dans un autre village situé à 20 km de Koguina. Pour notre interlocuteur, ces malfaiteurs sont des « capitaines » qui ont l’air imperturbables et sûrs d’eux. A Koguina, comme dans presque toutes les autres bourgades de la province, ces groupes armés terroristes s’en sont d’abord pris aux pylônes des réseaux de téléphonie mobile afin de couper le village du reste du Burkina.

Quid de l’appel du gouvernement à la formation des volontaires pour la défense de la patrie ?

Les volontaires pour la défense de la patrie sont une bonne initiative, selon Capi, mais personne ne croit que le gouvernement ait les moyens de combattre ces forces terroristes. « Et c’est à juste titre parce que l’Etat a montré son impuissance en laissant massacrer les habitants de certains villages qui n’ont pas respecté la consigne des terroristes de déguerpir des lieux et de ne plus y remettre les pieds », justifie-t-il. Pour lui, l’Etat a toujours été absent comme le relèvent chaque fois des analystes. En effet, souligne-t-il, avant même le terrorisme, les villages de cette partie du Burkina s’étaient toujours organisés pour lutter contre le banditisme sans l’appui de l’Etat. Et ce dernier cas dépasse l’entendement. Capi croit fermement que les villages qui attendent que l’Etat les libère risquent la disparition. Pour lui, cet Etat est resté sourd aux cris de détresses de ses populations les plus meurtries, ce ne sont pas des cas comme les villages de la Gnagna qui vont faire exception. Cependant, se dit-il, il faut un appui de taille de cet Etat, il faut qu’il montre des exemples de sa force dans des localités du Burkina afin de rétablir la confiance des populations. C’est à ce prix que le gouvernement pourra obtenir l’engagement des populations car, conclut-il, « les populations souhaitent être libérées de l’emprise terroriste afin que leur vie reprenne son cours normal ».

Etienne Lankoandé