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Insomnie : un trouble du sommeil très souvent banalisé

insomnLe sommeil occupe un tiers de la vie et ses troubles ont des répercussions sur le quotidien du sujet qui en souffre. Selon les spécialistes de la santé mentale, tout le monde peut souffrir d’insomnie au moins une fois dans sa vie. Elle débute généralement d’une façon occasionnelle et peut se prolonger si elle n’est pas prise en charge de manière adéquate. L’insomnie affecte non seulement la personne qui en souffre, mais aussi son entourage immédiat et son milieu professionnel. C’est donc un véritable problème de santé publique si l’on considère son impact socio-économique. Radars Info Burkina (RIB) a pris langue avec Richard Ouédraogo, psychiatre-addictologue, pour mieux comprendre ce trouble du sommeil qu’est l’insomnie et surtout savoir quelle attitude adopter pour le prévenir.

Radars Info Burkina : Qu’est-ce que l’insomnie ?

Richard Ouédraogo (RO) : C’est un trouble du sommeil. Certains spécialistes  considèrent l’insomnie comme un sommeil d’une durée de moins de 6h, alors qu’il y a des gens qu’on appelle « petits dormeurs » qui peuvent se satisfaire de 4h de sommeil. Mais d’un point de vue clinique, dans l’insomnie le sommeil n’est pas récupérateur. Le sujet peut donc dormir 6h ou plus, mais le matin se sent fatigué ou a du mal à se concentrer et s’énerve facilement.

RIB : Quels sont les différents types d’insomnies ?

RO : On a l’insomnie qui intéresse l’endormissement par rapport aux stades du sommeil, l’insomnie de maintien qui se caractérise par des réveils nocturnes multiples et le réveil précoce. On peut aussi considérer les causes des insomnies pour les classer. On a donc l’insomnie occasionnelle et celle chronique. Pour dire qu’une personne est insomniaque, il faut que les insomnies se répètent et attendre au moins un mois avant de retenir le diagnostic, mais dans certaines situations on n’en a pas besoin. Une personne qui fait par exemple une insomnie totale, c'est-à-dire qui ne dort pas du tout, on ne peut pas attendre un mois avant de poser le diagnostic ! Mais pour les insomnies partielles qui n’ont pas trop de conséquences, si l’on n’arrive pas à identifier l’élément de stress, c’est vraiment après un mois qu’il faut considérer que c’est problématique et qu’il faut prendre en charge le cas.

RIB : Qu’est-ce qui peut provoquer l’insomnie chez un sujet ?

RO : Pour ce qui est de l’insomnie occasionnelle, il peut y avoir plusieurs causes. Tout ce qui peut entraîner un stress comme la perte d’un être cher ou des problèmes personnels peut provoquer une insomnie. Voyager, changer de cadre peut également être à la base d’une insomnie. En ce qui concerne les insomnies chroniques, elles sont essentiellement liées à des pathologies psychiatriques ou organiques. Dans pratiquement toutes les pathologies psychiatriques on retrouve de l’insomnie : les troubles anxieux, la dépression, l’hystérie, les phobies, les psychoses ou encore la démence. Pour ce qui est des organicités, une personne qui a une douleur aiguë ne pourra pas dormir. De plus, une personne qui prend des somnifères et qui au bout d’un certain temps, qui est généralement 4 semaines,  arrête brutalement,  va forcément développer des insomnies. A partir d’un mois de prise de somnifère, l’arrêt doit se faire progressivement. Et la prise prolongée des somnifères crée une dépendance qui va se manifester par des insomnies et vous ne pouvez plus dormir de vous-même.

RIB : Quelles sont les conséquences de l’insomnie sur le quotidien du patient ?

RO : Quand on ne dort pas, on a du mal à se concentrer, ce qui peut jouer sur le rendement scolaire ou sur le travail. On a une sensation de fatigue le matin au réveil et on est très irritable, et éventuellement on peut faire une crise. Si par exemple vous avez des antécédents de dépression, faire plusieurs nuits sans dormir peut ramener ces crises.

RIB : Plusieurs personnes souffrant d’insomnie ont très souvent recours aux somnifères, est-ce qu’à la longue cela ne peut pas représenter un danger pour la santé ?

RO : Généralement l’insomnie a une cause. Si vous avez par exemple un trouble anxieux qui entraîne une insomnie et qu’on vous prescrit juste un médicament pour dormir, cela ne résoudra que partiellement le problème. Donc le jour où vous n’en prenez pas, vous n’arrivez pas à dormir et vous aurez tendance à en reprendre. Ainsi, petit à petit vous allez développer une dépendance. Les gens abusent généralement des somnifères et malheureusement les agents de santé qui les prescrivent ne savent pas toujours bien les manipuler. Alors que les somnifères, qui sont des psychotropes, sont des produits très dangereux, parce qu’ils peuvent entraîner un arrêt cardiaque si vous avez une prédisposition. Et cette prédisposition va se dépister à l’électrocardiogramme. Normalement on ne doit pas prescrire un psychotrope à un patient sans avoir au préalable fait cet examen. Mais ce n’est pas ce qui est constaté.

RIB : Quel est alors le traitement approprié pour venir à bout des insomnies ?

RO : Il faut confier le traitement à un spécialiste. Généralement, l’insomnie est banalisée, on se dit juste que le médecin généraliste peut prendre cela en charge facilement. C’est pourtant un symptôme à prendre au sérieux et qui nécessite une prise en charge spécialisée. Il faut un spécialiste pour faire une bonne évaluation d’une insomnie pour savoir sa cause, et comment la traiter et traiter sa cause. Il existe plusieurs moyens de prise en charge, notamment les mesures hygiéno-diététiques à travers l’hygiène du sommeil, qui entrent aussi dans le cadre de la prévention. C’est principalement dormir à des heures régulières, éviter d’utiliser un écran (ordinateur, portable, télévision) deux heures avant le sommeil, parce que les écrans donnent ce qu’on appelle une lumière bleue qui bloque la sécrétion de mélatonine. Alors que c’est cette hormone qui induit le sommeil. La lumière dans les chambres doit aussi être tamisée car la lumière vive bloque aussi la sécrétion de mélatonine. Les aliments consommés jouent également un rôle important dans le sommeil. Il faut éviter de manger des aliments trop lourds au coucher ainsi que des aliments trop légers au risque d’avoir faim et de ne pas pouvoir dormir. Pour la lecture qui stimule le sommeil, il faut opter pour une lumière rouge (veilleuse) pas trop agressive. Il faut conditionner le cerveau à avoir des heures régulières d’endormissement et de réveil et éviter les siestes quand on a du mal à dormir la nuit. Nous avons également les médicaments qu’on prescrit en respectant un certain nombre de règles comme ne pas aller au-delà de 04 semaines. On ne doit pas non plus prescrire un produit sans prendre en charge la cause de l’insomnie qui peut être pathologique. L’arrêt à partir des 04 semaines doit se faire progressivement et non brutalement, histoire de permettre à l’organisme d’éliminer l’excès de récepteurs petit à petit. Il faut donc une prise en charge complète et ne pas banaliser l’insomnie.

Propos recueillis par Armelle Ouédraogo