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Moumina Chériff Sy à la barre : « Nous avons toujours su que la transition n’arriverait jamais à son terme si le RSP n’était pas dissous. Nous savions qu’à un moment donné, ils allaient agir », dixit le témoin

moumina uneA la suite de l’ancien président Jean Baptiste Ouédraogo (JBO), c’est l’actuel ministre de la Défense nationale et des Anciens Combattants, Moumina Chériff Sy, qui était à la barre du tribunal militaire ce jour en sa qualité de témoin. Président du Conseil national de la Transition (CNT) pendant le putsch manqué de 2015, l’actuel ministre d’Etat a livré sa version des faits.

Dans sa narration des faits, Moumina Chériff Sy soutient que le 16 septembre, date à laquelle le putsch manqué a été perpétré, c’est vers 14h qu’il a appris que le président Michel Kafando ainsi que certains de ses ministres avaient été arrêtés. Il a tenté alors en vain de joindre le général Pingrenoma Zagré, alors chef d’état-major général des armées (CEMGA). C’est finalement son directeur de cabinet qui arrivera à entrer en contact avec son collègue de la présidence du Faso pour confirmer l’information. C’est bien plus tard que le CEMGA a confirmé être au courant de ce qui se passait. Il confie d’ailleurs qu’il a appelé le président JBO, Monseigneur ainsi que les membres de la CRAD. Pour le témoin, le CEMGA pensait vivre une mutinerie mais, lui, a vite fait de lui dire que c’était un coup d’Etat.

Etant convaincu qu’il s’agissait d’un coup d’Etat, Chériff Sy, alors président du CNT, l’équivalent de l’Assemblée nationale, va prendre ses responsabilités. « Pour nous, dès le 16 septembre, c’était clair que c’était un coup d’Etat. Donc avec nos camarades, nous nous sommes organisés pour la résistance. La proclamation du CND le 17 septembre a confirmé ce que nous pensions. Durant les évènements, nous avons apporté toute la résistance nécessaire avec les patriotes et les démocrates par rapport à ce coup d’Etat», soutient-il. Evoquant la radio de la résistance qui émettait sur la 108.0, le témoin affirme que c’est une radio créée par un certain nombre de « camarades » comme outil de lutte et de résistance.

L’ex-haut représentant du président du Faso dit avoir vu venir le coup d’Etat manqué de septembre 2015. « Nous avons toujours su que la transition n’arriverait jamais à son terme si le RSP n’était pas dissous. Il était pratiquement la seule force armée et je doutais fort que des gens qui ont eu le pouvoir pendant 27 ans le perdent sans rien faire. Nous savions qu’à un moment donné, ils allaient agir… en permanence, nous cherchions à nous informer et nous prenions les dispositions pratiques pour faire face…J’ai transmis ces informations au président du Faso et au Premier ministre, mais je ne sais pas ce qu’ils en ont fait », confie-t-il au parquet.

moumina 2Le témoin affirme également que dès le 16 septembre, le général Zagré lui a signifié sa désapprobation du coup de force. Une assertion qui contredit le général Diendéré, lequel soutient que la hiérarchie militaire lui a demandé d’assumer la vacance du pouvoir et lui a même apporté son accompagnement.

Revenant sur les échanges téléphoniques entre le général de division Djibril Bassolé et l’ex-président de l’Assemblée nationale ivoirienne Guillaume Soro, Moumina Chériff Sy dit avoir rencontré le dernier cité à Paris en octobre 2015 lors d’une conférence des présidents de Parlements francophones. « Il reconnaît avoir eu des échanges avec le général Bassolé, mais c’étaient des incompréhensions ». Il s’étonne donc que certaines personnes présentes dans le box des accusés remettent en cause la véracité desdites écoutes.

Confronté au témoin qui soutient qu’il affirmait qu’aucune élection n’était possible sans eux, ancien parti au pouvoir, Léonce Koné, cadre du CDP, dit avoir condamné tout le long de la transition, les dérives de ses dirigeants. « Pour moi, Chériff Sy n’était pas le symbole de la résistance mais le symbole d’une ségrégation qui excluait des Burkinabè du jeu électoral », a-t-il lâché.

Répondant à l’avocat de la partie civile Prosper Farama, qui a souhaité être édifié sur le processus d’adoption de la loi qui a permis au Premier ministre Yacouba Isaac Zida, alors lieutenant-colonel, de passer directement au grade de général de division, l’actuel ministre de la Défense nationale et des Anciens Combattants a répondu en ces termes : « Si le général Diendéré dit qu’on m’a glissé un papier pendant l’adoption de cette loi, je crois que ça devait être pour détendre l’atmosphère. Après la conférence des présidents, c’est la commission des affaires institutionnelles qui a auditionné par la suite les acteurs de cette loi. C’est dire donc que l’armée a été auditionnée par la commission. Quand la loi arrive en plénière, on ne peut rien changer. Je doute fort qu’on puisse glisser quoi que ce soit pour changer cette loi. Le président Kafando lui-même a dit que l’armée approuvait cette loi. Comment moi, singleton, je pouvais changer quoi que ce soit ? J’ai même demandé au président de retirer cette loi, car j’estimais qu’il y avait des choses à discuter. La loi a donc été retirée et est revenue après avoir été revue par le président et votée ».

Candys Solange Pilabré/Yaro, Armelle Ouédraogo